Journal de l'économie

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Fusions-Acquisitions: la ruée vers l'or?





Le 24 Février 2016

Les perspectives de l'économie mondiale n'invitent pas à l'euphorie. Pourtant, dans certains secteurs les entreprises continuent de mettre la main au portefeuille pour absorber les plus prometteuses de leurs cibles. Analyse et perspective d’un phénomène sans précédent qui touche le marché des "Fusacqs".


Photo : IngImage
Photo : IngImage
L'année 2015 a été marquée par une croissance record du volume financier des transactions sur le marché des fusions-acquisitions (M&A). L'évolution du montant des opérations par rapport à l'année précédente est inédite depuis la décennie 80, période à partir de laquelle le marché des M&A commence à être mesuré par les cabinets spécialisés.
 
L'engouement des investisseurs s'explique en partie par l'évolution favorable des variables traditionnelles. La remontée du dollar face aux autres devises, la baisse des taux d'intérêts qui conditionnent le financement des opérations par endettement (LBO), ou encore la chute du baril de Brent, accroissent en effet la rentabilité des acquisitions et achèvent de convaincre des entreprises initiatrices qui sont sur la retenue depuis 2008. Pour autant, la conjoncture n'est pas le seul facteur explicatif. Il semblerait que l'anticipation des ruptures technologiques qui bouleverseront la structure de l'économie dans les années à venir soit la cause première de cette tendance actuelle à la concentration.
 
L'index 2015 des fusions-acquisitions publié au mois de janvier par le cabinet d'avocats d'affaire Baker & Mackenzie montre que l'ensemble des transactions financières liées à des rachats d'entreprises et autres participations croisées a atteint 4.280 milliards USD lors de l'année qui vient de s'écouler.
 
Parmi elles, ce sont les transactions transfrontalières qui ont connu l'envolée la plus significative puisque ces dernières ont représenté "39% en valeur et 32% en volume de l'ensemble de l'activité M&A atteignant 1.658 milliards USD, soit une hausse de 17% par rapport à 2014".
 
Fait intéressant, si la croissance annuelle en volume financier s'est considérablement accrue, le nombre d'opérations est resté quant à lui inférieur à celui comptabilisé au cours de l'exercice précédent. Loin d'être anodin quant aux tendances à l'œuvre, ce différentiel entre les données en volume financiers et en nombre d'opérations s'explique principalement par la forte augmentation des montants des transactions de plus 5 milliards de dollars.
 
L'enthousiasme s'est principalement fait ressentir en Amérique du nord, en Asie pacifique, et en Europe de l'ouest. Les deals entre ces trois régions du monde ont en effet représenté 65% des transactions transfrontalières du dernier trimestre 2015.
 
La timidité des opérations dans le reste du monde et notamment sur les marchés émergents a été contrebalancée par des mouvements stratégiques audacieux dans les trois zones précédemment citées. Ces mouvements  concernent en grande majorité les secteurs des TMT (Technologie, Médias, Télécom), de l'industrie pharmaceutique et de l'énergie. 
 
Dans ces secteurs, les rapprochements entre géants ont été plus nombreux qu'à l’accoutumée et se sont traduits par des transactions record. En témoigne l'acquisition d'Allergan par le géant américain Pfizer pour une valeur de 191 milliards de dollars. Cette opération, l'une des plus chères jamais réalisées marque la création du nouveau numéro 1 mondial dans le secteur pharmaceutique. 

Quid de la France sur le marché des Fusions-acquisitions 2015?

Les entreprises européennes ont été la cible prioritaire des acheteurs internationaux et notamment nord-américains. Si la France a été très active lors du dernier trimestre avec 80 opérations pour une valeur de 25,6 milliards de dollars, sa position sur les marché est restée plus timide qu'en 2014, année au cours de laquelle certains faits d'arme notables comme le deal entre Lafarge et Holcim ou encore le  rachat de la branche Alstom énergie par General Electric, l'avaient propulsée au devant des opérations.
 
Pour autant, la baisse de 30% en valeur du total des transactions impliquant la France ne semble pas inquiéter outre mesure les spécialistes. Plusieurs secteurs d'activité dans l'économie française sont relativement fragmentés et pourraient être conduits à muter ces prochains mois. A l'instar du secteur des télécoms où la rumeur laisse entendre un accord de principe entre Orange et Bouygues, la grande consommation, l'énergie ou les équipementiers automobiles pourraient être également concernés par cette logique. 

Quelles évolutions le dynamisme du marché des M&A reflète-t-il?

La 13ème édition du baromètre semestriel du marché des M&A publié au début du mois de janvier par le cabinet EY livre les perceptions de 1600 dirigeants repartis dans 53 pays et 19 secteurs d'activité. "Plus de la moitié des dirigeants interrogés indiquaient avoir eu au moins trois opérations à l'étude en 2015 et 59% d'entre eux envisageaient de concrétiser au moins une opération dans les douze mois à venir" révèle l'étude.
 
Alors qu'aucune rupture règlementaire récente n'est à constater et que les anticipations sur la croissance mondiale ne sont pas vraiment au beau fixe (le FMI a revu à la baisse ses prévisions de croissance de l'économie mondiale de 0,2 points début janvier), le marché des M&A semble avoir le vent en poupe. La dynamique d'agrégation qu'il dénote semble moins liée à l'hypothétique optimisme suscité par les perspectives économiques qu'à une évolution du positionnement stratégique des entreprises au sein de secteurs appelés à muter plus ou moins brutalement.

Olivier Meier
Olivier Meier
C'est l'explication défendue par Olivier Meier (photo ci-contre), enseignant-chercheur spécialisé dans les stratégies de Fusions-acquisitions à l'Université Paris Dauphine et auteur de Fusions acquisitions aux éditions Dunod (2016 - 5è éd). Selon lui, la tendance des M&A en 2015 dénote avant tout un revirement dans les intentions stratégiques de grands groupes prêts à casser la tirelire pour absorber les plus prometteurs de leurs concurrents. En fait explique le spécialiste, "l'évolution récente du marché des "fusacqs" traduit deux postures qui se révèlent être les deux faces d'une même réalité, la rapidité des ruptures technologiques et de leurs imprévisibles conséquences. Soit les acheteurs, guidés par une démarche défensive souhaitent consolider leurs positions sur les marchés pour faire face à des nouvelles technologies qui peuvent modifier du jour au lendemain leurs secteurs d'activité, et donc leurs modèles économiques ; soit, ils adoptent une posture transformationnelle plus offensive qui débouche sur l'achat de start-up prometteuses afin de générer de nouvelles opportunités de croissance".
 
La difficulté rencontrée ces derniers mois par les entreprises pour dégager des sources de productivité au sein de leurs unités les pousse à déployer des stratégies de croissance externe. L'idée sous-jacente est de générer de nouveaux couples "produits-services" fondés sur l'innovation et en cas de rupture technologiques dans les secteurs d'activité qui les concernent, de pouvoir fixer elles-mêmes le rythme des transformations.
 
Pour Olivier Meier, les tendances à l'œuvre au niveau structurel laissent présager une poursuite de l'envolée sur les marchés des fusions-acquisitions dans les mois à venir. La dimension technologique avec l'ensemble des contraintes et opportunités qu'elle porte en elle, tant sur le plan de l'investissement que sur celui du renouveau de l'offre et des processus de productions, devrait ainsi conditionner l'évolution qui touche nombre de secteurs de l'activité.





1.Posté par rendredescomptes99 le 13/08/2018 17:07 | Alerter
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Si l'on considère certaines grandes sociétés (côtées au CAC 40,le must)et les informations les concernant dont on dispose (Lafarge et son soutien financier à Daesh,Bolloré et le travail des enfants dans des conditions proches de l'esclavage,France-Télécom et son harcèlement institutionnalisé conduisant au suicide de dizaines de salariés,Bayer-Monsanto et la très lucrative vente de produits dangereux,toxiques tant pour les agriculteurs que pour la biodiversité,Lactalis et le lait en poudre qui menace la vie des nourrissons,Wolkswagen et le trucage de ses véhicules polluants,la banque UBS et ses paradis fiscaux,Alstom et la liquidation du patrimoine industriel français avec Kron/Macron,les laboratoires Servier et le mediator,le médicament qui tue)on peut s’interroger sur le comportement de leurs dirigeants.Ces gens ne sont-ils pas des voyous en col blanc ?Peut-on encore affirmer sans sourciller qu’ils sont des « premiers de cordée »oeuvrant pour l’intérêt général ?Si tel était le cas toute la cordée menacerait de s’effondrer.Que font les pouvoirs publics pour limiter leurs nuisances ?Quels sont le degré de connivence et le niveau de corruption entre ces puissances économiques et nombre de « responsables » politiques ?Sous le régime des premiers de cordée macronisés il faut renoncer à la biodiversité,aux droits des personnes,à l’Etat de droit,à la démocratie y compris dans l’entreprise,à la responsabilité et à l’intégrité des dirigeants.Il ne reste plus que corruption à tous les étages,lâcheté,mise en danger de la vie d’autrui,renoncement à la protection des salariés et des plus vulnérables,mépris pour le vivant,mensonge généralisé.C’est ABJECT.Surtout,ne nous taisons pas.

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