Journal de l'économie

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Christophe Mianné, Société Générale : « Le recours aux marchés financiers va devenir la norme pour toutes les entreprises. À nous de les y aider »





Le 24 Juillet 2014, par La Rédaction


La loi de séparation et de régulation des activités bancaires a été motivée par ses artisans comme un moyen de protéger l’épargne des activités spéculatives, tandis que certains économistes la jugent inutile, voire contre-productive. Quel est votre point de vue à ce sujet ?

La première idée qui vient à l’esprit de nombre d’acteurs au sujet des banques est l’omniprésence des activités de spéculation. Or cette idée est maintenant fausse. Depuis 2008, le secteur a connu des changements fondamentaux dans les comportements des banques sur les marchés, notamment parce que la règlementation les y a obligée. Les banques doivent aujourd’hui prouver, activité par activité, qu’elles sont au service des clients et qu’il ne s’agit pas de revenus propres ; nous devons pouvoir justifier de nos marges et des prises de risques effectuées. Les banques ont également développé en interne des outils de contrôle comme les régulateurs, en plus des audits et des inspections qui passent systématiquement en revue les activités.
 
Il existe toutefois un paradoxe : les marchés apparaissent comme très risqués, alors qu’il n’est pas forcément moins risqué d’utiliser un milliards d’euros d’épargne pour prêter à une entreprise. La concentration des risques est ici très importante pour la banque, et il faut pouvoir la répartir entre plusieurs investisseurs. Pour cela, il faut avoir recours aux activités de marchés. La banque est un aiguilleur entre les différents acteurs sur ces marchés, et non un casino.

Les activités de marché sont souvent considérées comme plus profitables pour les banques que l’activité de prêt, « de terrain », en agences ? N’y-t-il pas un risque de voir les banques contourner leurs obligations légales pour revenir vers les activités spéculatives ?

Il y a une différence de chiffres d’affaires entre les acteurs bancaires, mais qui s’explique par la différence des business model. Les chiffres peuvent paraitre importants pour  les opérateurs de marchés toutefois, il ne faut pas oublier qu’ils ont derrière eux des vendeurs, des ingénieurs, des informaticiens, des personnes du backoffice et du contrôle… Pour réaliser ce chiffre d’affaires, il faut donc beaucoup de monde. Cependant au final on s’aperçoit que la répartition des revenus entre activités est très équilibrée. Société Générale compte maintenant trois activités : la banque de détail en France (Crédit du Nord, Boursorama et notre réseau France), la banque de détail internationale et la banque de Grande Clientèle et Solutions aux Investisseurs. La répartition en termes de chiffres d’affaire est d’environ un tiers par activité, fluctuant en fonction de l’activité et de la conjoncture. L’activité de marché représente ainsi 20 % du capital, mais moins de 40% du résultat. Le reste repose sur l’activité de détail. Ces rééquilibrages sont en partie dus à de nouvelles réglementations qui augmentent considérablement les capitaux nécessaires pour ce genre d’opérations : au global, nous avons été contraints de doubler notre capital. Sur les seules activités de marché, nous l’avons multiplié par trois.
 
C’est cet équilibre des activités qui fait la force du modèle de banque universelle de Société Générale, et sa capacité à offrir des services et solutions à chaque catégorie de client : particuliers, entreprises, investisseurs…
 
Le groupe Société Générale vise aujourd’hui un taux de rendement global qui se rapproche de celui de l’industrie autour de 10 %. Les activités de marchés,  ont un taux de rendement de 15 % environ  avec un profil de risques qui a beaucoup baissé. Les banques n’ont pas réussi à expliquer cette transition vers des activités moins risquées et des besoins en capital plus grands malheureusement.

Etant donné qu’il reste des acteurs spécifiques œuvrant presque exclusivement de manière spéculative sur les marchés financiers, les banques ne pâtissent-elles pas de la mise en parallèle avec ces acteurs ?

On peut en effet penser aux hedge funds ou à quelques banques aux activités nettement moins règlementées en termes de capital. La crise et les dispositions prises en conséquence de cette crise ont éliminé une partie de ces pratiques. Pour avoir une licence bancaire, il faut désormais disposer de fonds propres importants et se soumettre à un grand nombre de contrôles.
 
Il reste néanmoins quelques acteurs de la finance de l’ombre. Tant qu’ils limitent la prise de risques aux personnes qui ont investi dans ce fonds, ils respectent les règles du jeu. Mais en dehors de ça, la réglementation empêche désormais l’existence d’acteurs qui peuvent intervenir sur les marchés pour de grands investisseurs ou de grandes entreprises sans être dûment contrôlés.

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