En décembre 2013, vous révéliez aux parlementaires que la sécurité de notre pays n’était pas assurée comme elle le devrait. Presque cinq ans après, quelque chose a-t-il changé ?
Rien. Résultat, le divorce d’avec les Français s’aggrave… La première chose que les gens attendent c’est que l’État assure la sécurité et la justice, au nom du principe de délégation de la violence légitime. L’État doit « faire son job » dans ce domaine. Mais le contrat social, au fondement de cette action de l’État, est aujourd’hui en grande partie rompu. De toute évidence, nos hommes politiques — de gauche comme de droite — ne connaissent pas bien les questions de sécurité intérieure. C’est bien pour cette raison qu’en 2013, à la demande des élus de l’Assemblée nationale dans le cadre de la Commission d’information sur l’insécurité en France, j’ai pu apporter mon expérience du terrain. Vous connaissez la suite : ma mise à l’écart par décret et, par voie de conséquence, mon engagement dans le débat public…
« Si ça pète dans les banlieues, on n’a pas les hommes » a déclaré Philippe de Villiers le 2 novembre dernier dans une émission de télé (disant s’inspirer des propos de son frère le Général Pierre de Villiers). Que pensez-vous d’une telle déclaration ?
Je ne partage pas du tout cette analyse de Phillipe de Villiers. Tout d’abord, le sentiment exprimé dans cette déclaration est anxiogène et décalé.
J’affirme en outre, en tant qu’expert en matière de sécurité intérieure, que nous avons les moyens humains nécessaires (Gendarmerie, Police, Réservistes, et l’Armée « en troisième catégorie ») pour répondre aux menaces actuelles. Ce qui manque, en réalité, c’est la volonté politique au sommet de l’État. Sans directives claires, les moyens disponibles sont malheureusement inopérants.
Quelles sont vos priorités pour restaurer l’ordre au quotidien dans les quartiers « ghettoïsés » ?
Il faut en effet mettre de l’ordre dans les quelques 1 200 quartiers défavorisés, dont une soixantaine d’entre eux considérés comme étant en « rupture totale ». L’enjeu est tel sur le plan de la sécurité intérieure qu’il nous faut une action claire et volontaire, sans céder à la dilution des responsabilités. C’est une question de pure logique face à des gens qui utilisent des armes de guerre…
Je préconise dans un premier temps d’identifier précisément les quartiers prioritaires, en s’appuyant sur un diagnostic réalisé avec l’aide des élus, des bailleurs sociaux et les divers acteurs sociaux, et de tracer le périmètre exact des quartiers à traiter.
Je propose ensuite d’appliquer à ces zones bien circonscrites un « régime de contrôle renforcé » qui n’existe pas aujourd’hui et qui devrait être institué par la loi. Ce « régime de contrôle renforcé » pourrait alors être décrété par le Premier ministre, en tant que de besoin, pour une durée limitée à trois ou quatre mois renouvelables, mais pas plus de six mois.
Sur cette base, il est essentiel de désigner dans chaque quartier ciblé un chef opérationnel, qui travaillera 24 heures/24 à la tête d’une task force en contact avec les 800 à 1 000 personnes qui comptent sur le terrain, y compris les juges qui pourraient travailler la nuit… Et ce chef rendra des comptes.
De quoi les forces de l’ordre ont-elles le plus besoin pour restaurer l’ordre ?
Pour restaurer l’ordre, il faut avant tout de la fermeté. D’abord au niveau de la décision politique, mais aussi au niveau du soutien apporté aux forces de l’ordre : ces dernières doivent être convaincues qu’elles sont soutenues par leur hiérarchie et par le Gouvernement si quelque chose se passait mal. Voilà l’essentiel.
Rien d’autre que de la fermeté ?
Il faut aussi avancer sur des sujets très concrets.
Par exemple, je considère que les affaires judiciaires liées à l’exercice des missions des forces de l’ordre devraient être confiées à une juridiction spéciale de la Cour d’appel, une juridiction "dépaysée" — et plus sereine — de façon que la présomption d’innocence existe réellement pour ceux qui ont la charge de nous protéger. Actuellement, le temps médiatique empêche de se former une opinion sur ce que j’appelle les “cas non conformes” (car je refuse de parler a priori de “bavures”)… Pour autant, si la faute est établie, il convient d’être sans pitié.
Il y a en outre un effort à faire en matière de renseignement dans la profondeur. Le travail d’une police de proximité ne peut pas suffire.
Autre élément très important, je juge que les conditions juridiques permettant pour les gendarmes et les policiers d’ouvrir le feu sont trop restrictives.
Que proposez-vous exactement en matière de détention et de port d’arme ?
Il faut simplement étendre le port d’arme, l’étendre aux réservistes et l’étendre aussi à toutes les forces en dehors des heures de service. Une telle mesure s’impose face aux dangers actuels qui minent la société française. Le moment est venu de prendre des risques pour ne pas perdre le contrôle de certains territoires. Il y a urgence.
Que pensez-vous de la “journée de blocage” du 17 novembre ?
Je redoute cette journée. Et j’appelle au ressaisissement : traitons les vrais problèmes, ne poussons pas les Français à la révolte.
Rien. Résultat, le divorce d’avec les Français s’aggrave… La première chose que les gens attendent c’est que l’État assure la sécurité et la justice, au nom du principe de délégation de la violence légitime. L’État doit « faire son job » dans ce domaine. Mais le contrat social, au fondement de cette action de l’État, est aujourd’hui en grande partie rompu. De toute évidence, nos hommes politiques — de gauche comme de droite — ne connaissent pas bien les questions de sécurité intérieure. C’est bien pour cette raison qu’en 2013, à la demande des élus de l’Assemblée nationale dans le cadre de la Commission d’information sur l’insécurité en France, j’ai pu apporter mon expérience du terrain. Vous connaissez la suite : ma mise à l’écart par décret et, par voie de conséquence, mon engagement dans le débat public…
« Si ça pète dans les banlieues, on n’a pas les hommes » a déclaré Philippe de Villiers le 2 novembre dernier dans une émission de télé (disant s’inspirer des propos de son frère le Général Pierre de Villiers). Que pensez-vous d’une telle déclaration ?
Je ne partage pas du tout cette analyse de Phillipe de Villiers. Tout d’abord, le sentiment exprimé dans cette déclaration est anxiogène et décalé.
J’affirme en outre, en tant qu’expert en matière de sécurité intérieure, que nous avons les moyens humains nécessaires (Gendarmerie, Police, Réservistes, et l’Armée « en troisième catégorie ») pour répondre aux menaces actuelles. Ce qui manque, en réalité, c’est la volonté politique au sommet de l’État. Sans directives claires, les moyens disponibles sont malheureusement inopérants.
Quelles sont vos priorités pour restaurer l’ordre au quotidien dans les quartiers « ghettoïsés » ?
Il faut en effet mettre de l’ordre dans les quelques 1 200 quartiers défavorisés, dont une soixantaine d’entre eux considérés comme étant en « rupture totale ». L’enjeu est tel sur le plan de la sécurité intérieure qu’il nous faut une action claire et volontaire, sans céder à la dilution des responsabilités. C’est une question de pure logique face à des gens qui utilisent des armes de guerre…
Je préconise dans un premier temps d’identifier précisément les quartiers prioritaires, en s’appuyant sur un diagnostic réalisé avec l’aide des élus, des bailleurs sociaux et les divers acteurs sociaux, et de tracer le périmètre exact des quartiers à traiter.
Je propose ensuite d’appliquer à ces zones bien circonscrites un « régime de contrôle renforcé » qui n’existe pas aujourd’hui et qui devrait être institué par la loi. Ce « régime de contrôle renforcé » pourrait alors être décrété par le Premier ministre, en tant que de besoin, pour une durée limitée à trois ou quatre mois renouvelables, mais pas plus de six mois.
Sur cette base, il est essentiel de désigner dans chaque quartier ciblé un chef opérationnel, qui travaillera 24 heures/24 à la tête d’une task force en contact avec les 800 à 1 000 personnes qui comptent sur le terrain, y compris les juges qui pourraient travailler la nuit… Et ce chef rendra des comptes.
De quoi les forces de l’ordre ont-elles le plus besoin pour restaurer l’ordre ?
Pour restaurer l’ordre, il faut avant tout de la fermeté. D’abord au niveau de la décision politique, mais aussi au niveau du soutien apporté aux forces de l’ordre : ces dernières doivent être convaincues qu’elles sont soutenues par leur hiérarchie et par le Gouvernement si quelque chose se passait mal. Voilà l’essentiel.
Rien d’autre que de la fermeté ?
Il faut aussi avancer sur des sujets très concrets.
Par exemple, je considère que les affaires judiciaires liées à l’exercice des missions des forces de l’ordre devraient être confiées à une juridiction spéciale de la Cour d’appel, une juridiction "dépaysée" — et plus sereine — de façon que la présomption d’innocence existe réellement pour ceux qui ont la charge de nous protéger. Actuellement, le temps médiatique empêche de se former une opinion sur ce que j’appelle les “cas non conformes” (car je refuse de parler a priori de “bavures”)… Pour autant, si la faute est établie, il convient d’être sans pitié.
Il y a en outre un effort à faire en matière de renseignement dans la profondeur. Le travail d’une police de proximité ne peut pas suffire.
Autre élément très important, je juge que les conditions juridiques permettant pour les gendarmes et les policiers d’ouvrir le feu sont trop restrictives.
Que proposez-vous exactement en matière de détention et de port d’arme ?
Il faut simplement étendre le port d’arme, l’étendre aux réservistes et l’étendre aussi à toutes les forces en dehors des heures de service. Une telle mesure s’impose face aux dangers actuels qui minent la société française. Le moment est venu de prendre des risques pour ne pas perdre le contrôle de certains territoires. Il y a urgence.
Que pensez-vous de la “journée de blocage” du 17 novembre ?
Je redoute cette journée. Et j’appelle au ressaisissement : traitons les vrais problèmes, ne poussons pas les Français à la révolte.