Sans partager sa réponse, Paris Marx pose cependant la bonne question, quelle est notre vision de l’avenir et des réponses à apporter aux défis actuels de notre monde ? C’est ici que se situe en réalité la ligne de clivage que marque des entrepreneurs-innovateurs tels qu’Elon Musk. Cette catégorie particulière d’entrepreneurs que Joseph Schumpeter, économiste et penseur de l’innovation, place au cœur du système de transformation et d’adaptation économique. Par leur goût du risque et de l’exploration d’espaces inconnus, leur imagination et leur capacité à innover, ces entrepreneurs identifient et exploitent en permanence de nouvelles opportunités économiques dans leur environnement et provoquent cette « destruction créatrice » nécessaire aux dynamiques économiques et au progrès technologique.
L’écologie n’a rien d’un monolithe idéologique, c’est au contraire un espace traversé par de nombreux courants. À la croisée des chemins pour l’humanité, l’entrepreneur-innovateur incarne un chemin différent pour l’écologie face aux pessimistes, déclinistes ou collapsologues, celui de l’éco-modernisme. Entre les « effondristes » d’un côté et ceux qui nient la réalité du changement climatique et de l’anthropocène de l’autre, l’éco-modernisme, ou éco-pragmatisme, ouvre, parmi d’autres, une autre voie à la pensée et expression écologique. Ce courant affirme ainsi l’exigence pour les humains d’utiliser « leurs capacités techniques, économiques et sociales, sans cesse grandissantes, pour améliorer la condition humaine, stabiliser le climat, et protéger la nature ».
Affirmer l’impératif de répondre au réchauffement climatique et à la perte de biodiversité n’est pas incompatible avec la mise en lumière de tout ce que la modernité nous a apporté. Car, en la matière, les chiffres et les séries statistiques sont têtus. Steven Pinker le souligne dans son ouvrage Le triomphe des Lumières, en considérant les tendances longues, l’humanité vit la période la plus paisible et heureuse de son Histoire : espérance de vie, sécurité, paix et prospérité sont en hausse à travers la planète, n’en déplaise aux pessimistes et déclinistes. Et il va falloir attendre avant de juger de l’impact réels sur ces tendances à long terme des crises du Covid-19 ou encore de la guerre en Ukraine.
Sous cette perspective, la question est donc bien de savoir comment répondre aux enjeux écologiques sans faire pour autant dérailler le moteur du progrès qui a permis toutes ces réalisations au bénéfice de l’humain, et au cœur duquel se trouve la figure de l’entrepreneur-innovateur chère à Schumpeter. Comment accélérer le découplage, c’est-à-dire la dissociation entre la prospérité économique et la consommation de ressources et les impacts sur l’environnement ? En commençant par avoir confiance en nos capacités.
Cette confiance dans les capacités de l’humanité à relever ce défi est partagée par le groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), qui l’affirme en 2022, lors de la remise de son dernier rapport : « Depuis 2010, les coûts de l’énergie solaire, de l’énergie éolienne et des batteries n’ont cessé de diminuer, parfois jusqu’à 85 %. Un arsenal de plus en plus riche de lois et de politiques améliore le rendement énergétique, réduit les taux de déboisement et accélère la mise en place d’énergies renouvelables. » Hoesung Lee, le président du GIEC, va même plus loin : « En prenant les bonnes décisions aujourd’hui, nous pouvons garantir un avenir vivable. Nous disposons des outils et du savoir-faire nécessaires pour limiter le réchauffement. Les mesures climatiques prises dans de nombreux pays me rendent optimiste. Plusieurs politiques, réglementations et instruments du marché se révèlent efficaces. Si nous les appliquons plus systématiquement, à plus grande échelle et de manière plus équitable, ils pourront contribuer à réduire radicalement les émissions et à stimuler l’innovation ».
N’en déplaise à leurs détracteurs, les entrepreneurs tels Elon Musk sont des humanistes et des écologistes. Des humanistes au sens où leurs ambitions sont celles de femmes et d’hommes cherchant à marquer l’Histoire par de grandes réalisations au service de l’humanité, avec l’égo démesuré et la recherche de reconnaissance qu’impliquent naturellement une telle quête. Des écologistes qui souhaitent développer des innovations et solutions technologiques pour répondre aux défis de notre époque, au premier rang desquels le réchauffement climatique.
Contrairement à la caricature qui en est souvent faite, Musk n’a jamais eu pour objectif de se rendre sur Mars pour abandonner la Terre. La volonté de l’entrepreneur d’origine sud-africaine est de sauver la planète Terre, mais également de transmettre à l’humanité une seconde planète rendue habitable avec Mars : « Mon idéologie consiste à préserver la planète, d’une part, avec les énergies renouvelables, et à améliorer les technologies spatiales, d’autre part, afin d’établir une ville autosuffisante sur Mars. » Et difficile de douter de sa sincérité tant ses efforts et les risques qu’il prend s’articulent avec détermination vers ces objectifs.
Le sujet écologique l’habite depuis sa jeunesse et sa vie d’étudiant, son biographe Ashlee Vance soulignant ainsi que « déjà, on décèle ce cocktail de rêve et de rationalité scientifique dans un travail étudiant sur l’avenir de l’énergie solaire, intitulé facétieusement “De l’importance d’être solaire” ». Affirmation écologique qu’il répétera de nouveau en 2017, en quittant le groupe des conseillers économiques du président Trump après sa décision de sortir des accords de Paris sur le climat : « Je quitte le conseil présidentiel. Le changement climatique est réel. Quitter les accords de Paris n’est pas bon pour l’Amérique ou le monde. »
Musk porte la conviction que l’avenir ne pourra s’écrire sans le développement massif et radical des technologies électriques et il agit en conséquence. En 2004, après la revente de PayPal, c’est dans cette perspective qu’il investit une large partie de sa fortune dans Tesla avant d’en prendre le contrôle, « Notre intention avec Tesla a toujours été de servir d’exemple à l’industrie automobile et d’espérer qu’elle fabrique également des voitures électriques, afin que nous puissions accélérer la transition vers une technologie durable ».
Tesla devient une arme industrielle dans la lutte contre le réchauffement climatique, car là où l’énergie électrique est décarbonée, les véhicules électriques, sur l’ensemble de leur vie (incluant le coût écologique de fabrication des batteries avec les technologies actuelles et leur recyclage en fin de vie), ont déjà un bilan environnemental meilleur que les véhicules thermiques. Les autres groupes industriels automobiles se retrouvent à présent dans l’obligation d’accélérer le développement des véhicules électriques qu’ils avaient délaissé jusque-là. Cette réaction ne se faisant pas en premier lieu en réaction à des réglementations, mais bel et bien en raison du risque de se retrouver relégués sur un marché dont s’est emparé Musk, au bénéfice de la planète.
Par son rôle de défricheur, capable de prendre des risques là où personne ne s’était aventuré, démontrant qu’il était possible de remettre en cause des industries puissantes supposées indéboulonnables, l’entrepreneur inspire également d’autres acteurs qui œuvrent à présent dans l’univers des technologies électriques ou encore hydrogènes. Probablement plus important que le développement des véhicules électriques, les prises de risques de l’entrepreneur américain ont surtout fait progresser la technologie des batteries qui sera au cœur du développement des énergies renouvelables. Quel que soit l’avenir d’Elon Musk et de Tesla, un cercle vertueux est d’ores et déjà enclenché sur le marché de la mobilité électrique.
Pour l’éco-moderniste, face aux défis et problématiques qui se présentent à l’être humain, la solution n’est jamais moins de technique, mais au contraire plus d’innovation et de technologie. Le réchauffement climatique est l’enjeu du siècle ? C’est en transformant nos habitudes de consommation, en réduisant notre recours aux énergies fossiles, mais également par le développement de technologies décarbonées et de décarbonation que nous y répondrons. La technologie ne pourra pas tout faire, mais nous ne pourrons faire sans, comme nous ne pourrons faire sans les entrepreneurs-innovateurs.
L’écologie n’a rien d’un monolithe idéologique, c’est au contraire un espace traversé par de nombreux courants. À la croisée des chemins pour l’humanité, l’entrepreneur-innovateur incarne un chemin différent pour l’écologie face aux pessimistes, déclinistes ou collapsologues, celui de l’éco-modernisme. Entre les « effondristes » d’un côté et ceux qui nient la réalité du changement climatique et de l’anthropocène de l’autre, l’éco-modernisme, ou éco-pragmatisme, ouvre, parmi d’autres, une autre voie à la pensée et expression écologique. Ce courant affirme ainsi l’exigence pour les humains d’utiliser « leurs capacités techniques, économiques et sociales, sans cesse grandissantes, pour améliorer la condition humaine, stabiliser le climat, et protéger la nature ».
Affirmer l’impératif de répondre au réchauffement climatique et à la perte de biodiversité n’est pas incompatible avec la mise en lumière de tout ce que la modernité nous a apporté. Car, en la matière, les chiffres et les séries statistiques sont têtus. Steven Pinker le souligne dans son ouvrage Le triomphe des Lumières, en considérant les tendances longues, l’humanité vit la période la plus paisible et heureuse de son Histoire : espérance de vie, sécurité, paix et prospérité sont en hausse à travers la planète, n’en déplaise aux pessimistes et déclinistes. Et il va falloir attendre avant de juger de l’impact réels sur ces tendances à long terme des crises du Covid-19 ou encore de la guerre en Ukraine.
Sous cette perspective, la question est donc bien de savoir comment répondre aux enjeux écologiques sans faire pour autant dérailler le moteur du progrès qui a permis toutes ces réalisations au bénéfice de l’humain, et au cœur duquel se trouve la figure de l’entrepreneur-innovateur chère à Schumpeter. Comment accélérer le découplage, c’est-à-dire la dissociation entre la prospérité économique et la consommation de ressources et les impacts sur l’environnement ? En commençant par avoir confiance en nos capacités.
Cette confiance dans les capacités de l’humanité à relever ce défi est partagée par le groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), qui l’affirme en 2022, lors de la remise de son dernier rapport : « Depuis 2010, les coûts de l’énergie solaire, de l’énergie éolienne et des batteries n’ont cessé de diminuer, parfois jusqu’à 85 %. Un arsenal de plus en plus riche de lois et de politiques améliore le rendement énergétique, réduit les taux de déboisement et accélère la mise en place d’énergies renouvelables. » Hoesung Lee, le président du GIEC, va même plus loin : « En prenant les bonnes décisions aujourd’hui, nous pouvons garantir un avenir vivable. Nous disposons des outils et du savoir-faire nécessaires pour limiter le réchauffement. Les mesures climatiques prises dans de nombreux pays me rendent optimiste. Plusieurs politiques, réglementations et instruments du marché se révèlent efficaces. Si nous les appliquons plus systématiquement, à plus grande échelle et de manière plus équitable, ils pourront contribuer à réduire radicalement les émissions et à stimuler l’innovation ».
N’en déplaise à leurs détracteurs, les entrepreneurs tels Elon Musk sont des humanistes et des écologistes. Des humanistes au sens où leurs ambitions sont celles de femmes et d’hommes cherchant à marquer l’Histoire par de grandes réalisations au service de l’humanité, avec l’égo démesuré et la recherche de reconnaissance qu’impliquent naturellement une telle quête. Des écologistes qui souhaitent développer des innovations et solutions technologiques pour répondre aux défis de notre époque, au premier rang desquels le réchauffement climatique.
Contrairement à la caricature qui en est souvent faite, Musk n’a jamais eu pour objectif de se rendre sur Mars pour abandonner la Terre. La volonté de l’entrepreneur d’origine sud-africaine est de sauver la planète Terre, mais également de transmettre à l’humanité une seconde planète rendue habitable avec Mars : « Mon idéologie consiste à préserver la planète, d’une part, avec les énergies renouvelables, et à améliorer les technologies spatiales, d’autre part, afin d’établir une ville autosuffisante sur Mars. » Et difficile de douter de sa sincérité tant ses efforts et les risques qu’il prend s’articulent avec détermination vers ces objectifs.
Le sujet écologique l’habite depuis sa jeunesse et sa vie d’étudiant, son biographe Ashlee Vance soulignant ainsi que « déjà, on décèle ce cocktail de rêve et de rationalité scientifique dans un travail étudiant sur l’avenir de l’énergie solaire, intitulé facétieusement “De l’importance d’être solaire” ». Affirmation écologique qu’il répétera de nouveau en 2017, en quittant le groupe des conseillers économiques du président Trump après sa décision de sortir des accords de Paris sur le climat : « Je quitte le conseil présidentiel. Le changement climatique est réel. Quitter les accords de Paris n’est pas bon pour l’Amérique ou le monde. »
Musk porte la conviction que l’avenir ne pourra s’écrire sans le développement massif et radical des technologies électriques et il agit en conséquence. En 2004, après la revente de PayPal, c’est dans cette perspective qu’il investit une large partie de sa fortune dans Tesla avant d’en prendre le contrôle, « Notre intention avec Tesla a toujours été de servir d’exemple à l’industrie automobile et d’espérer qu’elle fabrique également des voitures électriques, afin que nous puissions accélérer la transition vers une technologie durable ».
Tesla devient une arme industrielle dans la lutte contre le réchauffement climatique, car là où l’énergie électrique est décarbonée, les véhicules électriques, sur l’ensemble de leur vie (incluant le coût écologique de fabrication des batteries avec les technologies actuelles et leur recyclage en fin de vie), ont déjà un bilan environnemental meilleur que les véhicules thermiques. Les autres groupes industriels automobiles se retrouvent à présent dans l’obligation d’accélérer le développement des véhicules électriques qu’ils avaient délaissé jusque-là. Cette réaction ne se faisant pas en premier lieu en réaction à des réglementations, mais bel et bien en raison du risque de se retrouver relégués sur un marché dont s’est emparé Musk, au bénéfice de la planète.
Par son rôle de défricheur, capable de prendre des risques là où personne ne s’était aventuré, démontrant qu’il était possible de remettre en cause des industries puissantes supposées indéboulonnables, l’entrepreneur inspire également d’autres acteurs qui œuvrent à présent dans l’univers des technologies électriques ou encore hydrogènes. Probablement plus important que le développement des véhicules électriques, les prises de risques de l’entrepreneur américain ont surtout fait progresser la technologie des batteries qui sera au cœur du développement des énergies renouvelables. Quel que soit l’avenir d’Elon Musk et de Tesla, un cercle vertueux est d’ores et déjà enclenché sur le marché de la mobilité électrique.
Pour l’éco-moderniste, face aux défis et problématiques qui se présentent à l’être humain, la solution n’est jamais moins de technique, mais au contraire plus d’innovation et de technologie. Le réchauffement climatique est l’enjeu du siècle ? C’est en transformant nos habitudes de consommation, en réduisant notre recours aux énergies fossiles, mais également par le développement de technologies décarbonées et de décarbonation que nous y répondrons. La technologie ne pourra pas tout faire, mais nous ne pourrons faire sans, comme nous ne pourrons faire sans les entrepreneurs-innovateurs.
Cyril de Sousa Cardoso, auteur du livre « Elon Musk – Les secrets d’une réussite insolente » aux Editions Mardaga
Il est aussi entrepreneur et le fondateur du groupe Audalom – Les petits bots qui œuvre dans la transformation numérique et managériale des organisations. Il est cofondateur et président du mouvement Innovation Commando. Il est également conférencier et auteur de plusieurs ouvrages sur les thèmes de l’innovation.
Il est aussi entrepreneur et le fondateur du groupe Audalom – Les petits bots qui œuvre dans la transformation numérique et managériale des organisations. Il est cofondateur et président du mouvement Innovation Commando. Il est également conférencier et auteur de plusieurs ouvrages sur les thèmes de l’innovation.