Journal de l'économie

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Un temps de guerres… d’ailleurs on s’y prépare





Le 12 Novembre 2021, par Nicolas Lerègle

L’adage romain « ci vis pacem para bellum » n’a jamais été autant à la mode à travers le monde, avec la question de savoir si la volonté de paix prédomine au travers des signaux qui sont adressés. On a plutôt le sentiment que le souhait serait d’une Blitzkrieg triomphante que d’une paix assimilée à un statu quo. On s’aperçoit d’ailleurs que les recettes du passé sont ressorties ou revisitées selon les pays.


Un temps de guerres… d’ailleurs on s’y prépare
L’Opération Fortitude visant à désinformer les Allemands quant à l’emplacement exact du débarquement avec ses maquettes commandées par Patton ressemble furieusement aux maquettes de navires identifiées dans les déserts chinois et qui servent aux entrainements antinavires de l’armée chinoise, par exemple dans l’hypothèse, de plus en plus crédible, d’une opération d’invasion de Taiwan. Les Chinois ont beau jeu de jouer aux vierges effarouchées, semblant ignorer la situation, le message délivré et adressé aux Occidentaux est pour le moins limpide « qui s’y frotterait s’y piquerait ». Le président américain, ayant oublié la maxime du cardinal de Retz qui posait qu’« on ne sort de l’ambiguïté qu’à son détriment », déclarant qu’en cas d’attaque de Taiwan les États-Unis d’Amérique ne seraient pas inactifs, la réponse ne s’est pas fait attendre.
 
La croyance très occidentale que personne n’a intérêt à un conflit qui serait par trop meurtrier oublie que les dirigeants chinois et principalement leur actuel leader ne pensent pas de la sorte. Il y a 60 ans Mao avait théorisé qu’un conflit avec la Chine ferait peut-être quelques centaines de millions de morts de part et d’autre, mais qu’en Chine il subsisterait encore plusieurs centaines de millions d’habitants ce qui ne serait assurément pas le cas dans les autres pays. Avec 1,4 milliard d’habitants, la donne est identique. Sun Tzu préconisait de raisonner avec l’esprit de son adversaire, n’oublions pas ce conseil.
 
Pour mémoire en 2050 la Chine sera la première puissance militaire mondiale et on fait rarement cela pour rester dans le cadre étriqué de ses frontières et, tous les 4 ans la Chine renforce sa marine d’un tonnage équivalent à celui de la Royale française !
 
La situation en Europe n’est pas nécessairement plus calme. Le président Macron a beau jeu de rappeler que la qualité de vie que nous connaissons aujourd’hui nous la devons essentiellement à l’Union européenne il a, hélas, trop tendance à s’exprimer dans le vide. Aujourd’hui les échos sont au nationalisme qui ferait de la France une puissance à même de relever seule les défis géopolitiques du moment. Discours séduisant, mais assurément faux.
 
Aux marches de l’Europe, les menaces sont réelles.
La Turquie ne manque pas une occasion de se chicoter avec la Grèce, mais, histoire de faire oublier une situation économique déliquescente, Erdogan titille aussi ses soi-disant alliés de l’OTAN, dont la France, et ne manque pas une occasion d’afficher sa proximité avec V. Poutine.
 
Poutine qui avec la Crimée et l’Ukraine joue un jeu trouble ressassant les prétentions territoriales d’un temps passé, voulant rattacher les russophones de Crimée comme avant un certain avait souhaité rattacher les Allemands des Sudètes au Reich.
 
Poutine qui est justement à tirer les fils de la Biélorussie dont l’autocrate est preneur de toutes idées qui lui permettraient de préserver son siège et, en ce domaine, il n’est rien de mieux qu’une situation de tension armée propre à ressouder, du moins le croit-il, une population derrière lui. Ce qui se passe aux frontières de la Pologne avec des afflux massifs d’émigrés souhaitant rentrer en Europe est révélateur de cette volonté.
 
Les pays baltes sont eux aussi confrontés à une situation identique qui amène, paradoxe et retournement de l’Histoire, ces derniers à ériger des rideaux de fer (barbelés) pour se prémunir !
 
Aux frontières de l’Europe, nous avons aussi l’Algérie et le Maroc qui sont en état de guerre froide, mais les caractères méditerranéens étant ce qu’ils sont un dérapage n’est pas à écarter qui ne serait pas sans conséquence en Europe.  D’ores et déjà l’Espagne s’inquiète pour ses approvisionnements en gaz, le gazoduc traversant, depuis l’Algérie le Maroc, Alger a décidé de le fermer. On peut aussi s’inquiéter de flux migratoires massifs si la situation venait à s’envenimer. De même la France au regard de son histoire et intérêt pourrait-elle rester étrangère à un conflit alors même que nous avons trouvé logique de nous mêler des affaires libyennes ? J’angoisse en prévision du moment où B Henri-Levy va s’intéresser à la question lui qui, ignorant de beaucoup de choses, mais croyant tout savoir se pose en philosophe humaniste privilégiant les interventions armées aux débats d’idées !
 
On ne peut être qu’affligé par l’absence de parole sur ces sujets d’une classe politique qui ne semble pas voir au-delà de son voisinage immédiat. Quand E. Macron a commencé à glisser quelques considérations géopolitiques lors de sa dernière intervention cela a semblé décaler à beaucoup alors même que ce sujet va devenir majeur au cours des prochaines années. Il ne s’agit pas de stocker l’huile, l’eau, les pâtes et le papier-toilette, mais de prendre conscience que l’environnement est mouvant et que notre tranquillité est comme la bonne santé du Dr Knock, « un état transitoire qui ne présage rien de bon » ! Cette politique de l’autruche est justifiée par le caractère anxiogène d’un discours qui ne peut que faire fuir les électeurs, du moins le croit-on. Mais la peur n’éloigne pas le danger. Espérons simplement que Macron réélu ou celui qui le sera saura poursuivre l’effort budgétaire consenti à nos armées pour se doter de toute la panoplie nécessaire à la dissuasion et à l’efficacité opérationnelle de nos forces là où nos intérêts sont présents.
 
Je me demandais ce que j’allais faire le 11 novembre, au-delà des commémorations mémorielles bienvenues en guise de rappel des conséquences des fausses certitudes et excès de confiance, je pense regarder « les Chinois à Paris » de Jean Yanne, toujours plus amusant que « Paris brûle-t-il ? » de René Clément.

Nicolas Lerègle
 


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