Dans votre ouvrage, vous opposez volontiers le marketing des Trente Glorieuses à ce qu’il devrait être aujourd’hui, et en prônez une approche systémique. Expliquez-nous ce point de vue ?
Le Marketing des Trente Glorieuses consistait à conquérir des territoires disponibles en prenant si possible une position de leader. Pour ce faire, il fallait des lancements de marques puissants déclenchant des flux d'achats suffisants pour sécuriser les distributeurs qui avaient investi dans des stocks. La réussite signifiait la conquête de linéaires chez les distributeurs qui sécurisait la marque et la protégeait des concurrents. Aujourd'hui il n'y a plus beaucoup de terrains vierges à conquérir. Les marques sont partie prenantes d'écosystèmes dont il faut comprendre les courants porteurs et les ruptures potentielles.
S'adapter à un écosystème demande une analyse fine des enjeux de consommation, une maîtrise des enjeux technologiques et de production, ainsi qu'une grande souplesse dans l'intermédiation entre la marque et le consommateur. Sur ce dernier point le relais de communautés de consommateurs peut être beaucoup plus efficace qu'une publicité coûteuse. Le succès de Tesla avec Elon Musk est l'exemple d'une marque qui ne force pas le passage mais qui est portée par un courant puissant.
S'adapter à un écosystème demande une analyse fine des enjeux de consommation, une maîtrise des enjeux technologiques et de production, ainsi qu'une grande souplesse dans l'intermédiation entre la marque et le consommateur. Sur ce dernier point le relais de communautés de consommateurs peut être beaucoup plus efficace qu'une publicité coûteuse. Le succès de Tesla avec Elon Musk est l'exemple d'une marque qui ne force pas le passage mais qui est portée par un courant puissant.
Vous suggérez aux responsables marketing d’entretenir une relation plus ténue, plus empirique, avec le « terrain ». Quel regard portez-vous sur le Big Data et la business intelligence ? Y voyez-vous une forme de scientisme dangereux pour les marques ?
La relation sensitive avec le consommateur et le terrain n'exclut pas une forte technicité dans l'analyse du comportement et des besoins du consommateur. C'est un point que je développe dans le dernier chapitre de mon livre (le système d'informations marketing). Le Marketing n'est pas qu'intuitif. Le big data permet à un système d'informations d'être beaucoup plus fin dans la réponse aux attentes des consommateurs. Mais pour maîtriser les expressions de besoin qui conditionnent ce système, Il faut une connaissance très opérationnelle du consommateur.
La crise que nous connaissons affecte-t-elle les postures marketing dans les grandes entreprises ?
La crise a forcé de nombreuses entreprise à réduire leurs coûts. Des modèles low cost sont en train de prendre le dessus dans l'aérien et les télécoms par exemple. La conséquence en est souvent la réduction des postes fonctionnels au premier rang desquels se situe le marketing. De plus, la nécessité de survivre polarise le management sur les enjeux à court terme, la réflexion à long terme pouvant être assimilée à un détachement coupable. Seule la vision et la capacité d'un dirigeant à maintenir le cap peut permettre d'éviter ces travers.
Yves Goblet, "Construire une marque leader", Editions EMS, 2014
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