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Grandes Ecoles de Commerce : les classes préparatoires sont-elles vouées à disparaître ?





Le 19 Juin 2017, par La Rédaction

Exigeantes, élitistes, formatrices, les classes préparatoires sont encore considérées par nombre d’étudiants (et de parents) comme la voie royale vers les grandes écoles, quelle que soit la filière. Portant ce système franco-français peine désormais à justifier sa valeur ajoutée dans un contexte d’internationalisation et de professionnalisation des cursus. Ainsi dans les 10 premières écoles européennes de management classées par le Financial Times une seule, HEC, propose une intégration par prépa.


Un impératif pour nos écoles de commerce : exister à l’international

© IngImage
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Accusées de creuser les inégalités sociales ou de trop formater les élèves, les classes préparatoires ou « prépas » sont régulièrement sur la sellette. Historiquement, elles se sont positionnées comme la voie d’accès par excellence aux écoles les plus prestigieuses, qu’il s’agisse de viser ensuite la haute fonction publique ou de grandes entreprises. L’égalité devant le concours est la pierre angulaire de ce système qui ne vise pas l’excellence mais la sélectivité afin de former des élites dirigeantes.

Pourtant ce système, hérité des 19e et 20e siècles (les premières classes préparatoires datent même du 18e), prend aujourd’hui l’eau de toute part. A peine 40 % des élèves des grandes écoles proviennent de prépas. Pour exister à l’international nos grandes écoles doivent proposer des programmes attrayants pour les étudiants étrangers. Or, le système des prépas ne veut rien dire pour un Américain ou un Indien. Alors que faire dans un contexte où, pour exister, les grandes écoles doivent impérativement s’internationaliser ? La solution trouvée est de proposer à ces étudiants étrangers d’intégrer un Master of Science directement après un Bachelor. HEC, ESSEC, ESCP, l’EM Lyon regorgent d’étudiants internationaux recrutés après un diplôme de ce type.

Autre rupture forte en passe de s’imposer en France : les programmes bachelor français. En effet, dans la plupart des pays du monde le bac +5 n’est pas un impératif. Aux Etats-Unis par exemple on fait plutôt un bachelor puis, après une expérience professionnelle, un MBA. Rares sont les grandes universités à proposer des masters pré-expérience. Harvard Business School ou encore Stanford ne proposent pas, par exemple, ce type de programme. Or, les grandes écoles françaises sont à la traîne en matière de MBA, hormis l’INSEAD, et ne proposaient pas, pour la plupart, de formation à bac+3 ou 4. Ces dernières années la vapeur s’inverse, car la plupart des grandes écoles de commerce, sauf HEC, ont anticipé ce phénomène d’internationalisation et ont créé des bachelors. Il est désormais possible de faire l’ESSEC, l’ESCP, l’EM Lyon, l’EDHEC, Néoma, etc., en bachelor. Les puristes objecteront que ce sont des formations de seconde zone. Pourtant, vus de Londres ou de Los Angeles, les diplômés de ces bachelors apparaissent comme des alumni de ces institutions et non comme des diplômés de second rang. Ces programmes sont prisés des étudiants étrangers d’excellent niveau. Il semblerait également que progressivement des étudiants français brillants, souhaitant éviter un bachotage scolaire intense de la prépa, se tournent vers ces formations d’excellence. 

La rupture de l’international

Les statistiques de certains lycées parisiens montrent que de plus en plus d’étudiants de terminale se tournent vers les grandes universités internationales. Il faut dire que cela présente de nombreux avantages : des diplômes aussi prestigieux qu’HEC ou l’ESSEC, une véritable expérience internationale permettant de maîtriser des langues, le fait de se confronter à d’autres cultures et, de quoi forger le caractère de diplômés beaucoup plus matures, selon les employeurs. Il faut reconnaître que nombre d’étudiants de nos plus grandes écoles sortent diplômés en mettant en avant l’international alors qu’au final ils ont suivi un cursus très convenu. A titre d’exemple, l’élève venant d’un lycée parisien qui, après deux années sur les bancs de la fameuse prépa Sainte Geneviève à Versailles, intègre la non moins célèbre école d’HEC à Jouy-en–Josas, passera donc quatre années et demies de scolarité intensive sur une zone couvrant à peine 20 kilomètres carrés des Yvelines. En effet, HEC propose à peine un semestre de scolarité internationale sur les trois ans de présence à l’école ; une anomalie. 

Des écoles prestigieuses

Contrairement à ce que pensent nombre de directeurs de prépa, la voie d’excellence ne passe plus nécessairement par la case concours et par les grandes écoles françaises. Dans un contexte où de plus en plus de diplômés travaillent à l'international, il faut changer de grille de lecture : est-ce que des recruteurs londonien, de Sao Paolo ou encore de Singapour considéreront un diplômé de l’ESSEC comme supérieur à celui d’un bachelor du MIT ou de IE Business School ? Evidemment non. Il sera même probablement dubitatif en lisant la ligne « classe préparatoire » du CV, s’interrogeant sur sa signification et son utilité. Prenons le classement du Financial Times qui fait autorité, en Europe. Sur les 10 premières « business school » seules deux sont françaises, dont une ne propose que des MBA :

1 London Business School (UK)
2 HEC (France)
3 Insead (France)
4 IE Business School (Espagne)
5 St Gall (Suisse)
6 ESADE (Espagne)
7 Bocconi (Italie)
8 IESE (Espagne)
9 IMD (Suisse)
10 RSM (Hollande)

Pourtant la plupart de ces écoles très élitistes n’évoquent rien à la plupart des français qui continuent de s’enfermer dans une vision hexagonale. Qui a entendu parler en France, par exemple, de IE Business School? Nous restons centrés sur nos "parisiennes". Pourtant IE Business School a été classée plusieurs années consécutives 1ere école européenne devant HEC en 2012 et 2e ex æquo avec cette même grande école en 2013. Cette prestigieuse institution jouit d’une réputation d’excellence dans une grande partie du monde, en Amérique du sud notamment ou encore en Asie. Or cette grande université Madrilène propose évidemment des bachelors avec une sélection très exigeante, comparable en terme de sélectivité à celle de HEC. Qu’aurait donc à envier un diplômé d’IE Business School à un diplômé de l’ESSEC ou à un diplômé de HEC ? Rien, si l’on se base sur ces classements objectifs et sur des recruteurs internationaux. C’est pourquoi de plus en plus d’excellents étudiants français font le choix d’intégrer ces cursus de bachelor dans les meilleures universités étrangères plutôt que de continuer à suivre une scolarité contraignante et purement théorique en classe préparatoire : Bocconi à Milan recrute de nombreux français tout comme RSM à Rotterdam ou ESADE à Barcelone. Après 3 ou 4 ans ces diplômés sont certainement beaucoup plus matures et adaptables que ceux qui ont suivi un cursus classique Grande Ecole. C’est d’ailleurs pour certains d’entre eux le moment de poursuivre un master dans une grande école française en intégrant en 2e année ou de continuer à l’étranger dans d’autres écoles élitistes comme la LBS ou des universités américaines.
 
Alors que vont devenir les prépas et les grandes écoles ? Si les prépas conservent une certaine attractivité, c’est essentiellement parce qu’elles constituent encore une référence centrale pour nombre de recruteurs hexagonaux passés par ce système. Mais il est à craindre qu’en l’espace d’une génération, ce capital de notoriété ne disparaisse progressivement : lorsque la génération actuelle, formée pour partir à l’étranger dans des cursus totalement différents ou qui auront travaillé à l’international, arrivera aux responsabilités, il n’est pas dit que les prépas auront encore la cote. Etre en poste à New York, à Tokyo ou à Shanghai permet de relativiser ce complexe de supériorité et l’arrogance de notre système éducatif.





1.Posté par Sylvie le 21/06/2017 11:28 | Alerter
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Encore un article à charge sur les classes prépas... par des auteurs qui n'y sont certainement jamais passés... Sinon ils sauraient que ces formations apportent énormément en méthodologie de travail, en apprentissage de la gestion du temps, etc.

L'article est fortement biaisé: en moyenne, sur l'ensemble des grandes écoles, seulement 40% des étudiants viennent des classes prépas, mais pour les écoles du top 5, le programme grande école est le programme phare où le pourcentage d'étudiants vient en grande majorité de prépas. Elles ne pourraient pas vivre sans ce programme, même si la plupart ont dorénavant également créé des programmes accessibles dès le BAC.

Par ailleurs, écrire que " l’élève venant d’un lycée parisien passera donc quatre années et demies de scolarité intensive sur une zone couvrant à peine 20 kilomètres carrés des Yvelines" est totalement caricatural, car ce même étudiant aura fait une année de césure et aura passé plus d'un an et demi en stage et en formation dans les universités étrangères citées dans le classement par les auteurs, car ces universités sont partenaires de nos meilleurs écoles!!

Et ceux qui seront en poste à Tokyo ou New-York auront pour beaucoup fait une prépa, seront passés par HEC ou l'ESSEC, mais auront fait un stage à Tokyo, un autre dans une ONG en Argentine et suivi un semestre à Bocconi...Au final, ils n'auront rien à envier en terme d'adaptabilité à d'autres étudiants!
Vous oubliez aussi de mentionner l'approche multi campus de l'ESCP Europe...

Pour conclure, cessez de parler d'arrogance ou de complexe de supériorité de notre système de grandes écoles, car c'est tout ce qui reste de notre système éducatif pour ceux qui souhaitent faire un parcours où l'excellence et l'exigence priment!


PS. 2 écoles françaises classées dans les meilleures écoles européennes devrait plutôt être une fierté!

2.Posté par ROYNARD le 21/06/2017 17:58 | Alerter
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Les CPGE restent, en comparaison d'autres formations, y compris étrangères, d'un bon niveau, et surtout bien moins onéreuses que les établissements concurrents étrangers de niveau égal ou supérieur. Pour les étudiants bien entendu, mais aussi en coût réel.
Pour le reste, l'article reflète davantage les mentalités régnantes (non dénuées d'arrogance elles aussi,...) que la prétendue objectivité invoquée

3.Posté par Eric le 22/06/2017 23:07 | Alerter
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Le commentaire numero 1 est symptomatique de ce que denonce l article. Non Sylvie ceux qui sont en poste a new york ou singapour n auront pas tous fait une prepa car la plupart des cadres ne sont pas francais... Pour un singapourien l Essec est d abord un Bba francais er certainement pas une grande ecole. D autre part Smu ou Nus n a rien a envier à notre systeme autocentré. Il est temps que les petits arrogants formés dans les prepas parisiennes comprennent que l elite mondiale n est pas formée à Jouy en Josas, Paris ou Cergy...

4.Posté par Luc le 23/06/2017 08:22 | Alerter
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L université française est excellente et gratuite contrairement aux grandes écoles qui sont garantes de la reproduction sociale. Les meilleurs prepas sont dans les beaux quartiers parisiens. La fin des prepas permettra de remettre de la mixité sociale. Je comprends que ce système bourgeois résiste car la classe dominante veux rester aux commandes. Les étudiants de ces écoles son tous des petits bourgeois

5.Posté par Sylvie le 23/06/2017 08:27 | Alerter
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@eric: vous déformez mes propos - quand j'écris "ceux qui seront en poste à New-York ou Singapour", je me réfère à des cadres français, formés en France, et qui pour la plupart, sont passés par une grande école et une prépa.
Ils ne forment peut-être pas l'élite mondiale, mais l'élite française (en terme de sélectivité de leur parcours) et ils ne sont ni plus ni moins arrogants que ceux qui sont passés par Oxbridge ou Harvard... Mais beaucoup moins endettés que leurs homologues américains!

6.Posté par Arnaud le 23/06/2017 13:35 | Alerter
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Les classes préparatoires sélectionnent de bons petits soldats pour les grandes entreprises. Bel exercice de,docilité de se prêter à ces règles du jeu de poursuivre une scolarité théorique qui relève de l'exercice de style pour intégrer une grande école . Ceux qui font le choix des universités internationales en business vont au final (comme le dit l article) être mieux formés, plus internationaux et plus matures. Mais je comprends c est plus facile de suivre la voie de la sécurité lorsqu'on est un bon élève: on fait comme les autres et comme les profs à vous disent de faire, on se dirige vers une classe préparatoire. C est plus dur de prendre son baluchon à 18 ans et d aller aux Usa, en Italie, en Uk ou en Espagne.

7.Posté par Celedhil le 24/06/2017 22:19 | Alerter
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@Eric, @Arnaud, tellement de caricatures dans vos commentaires...

Les personnes un tant soit peu objectives remarqueront que c'est tout le système scolaire qui est générateur d'inégalités et que celles-ci se sont creusées bien avant les classes prépas ou les Grandes Ecoles. A HEC 20% des étudiants bénéficient de bourses et ce chiffre est en augmentation. J'ai été boursier d'Etat et je remercie HEC d'avoir financé ma scolarité.

Par contre pas sûr que ceux qui aillent dans les universités internationales bénéficient de la même chance. C'est sûrement papa et maman qui vont financer les études (bien plus chères), le logement et les voyages.

Quand à dire que c'est la voie de la sécurité d'aller en prépa ou que c'est moins enrichissant... ! A titre personnel, j'ai bien plus appris en prépa que pendant mes semestres d'échange à l'université à l'étranger (par contre ils étaient beaucoup plus fun).

8.Posté par Frederic le 25/06/2017 20:13 | Alerter
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Celedhil renseignez vous un peu: il n'y pas qu'HEC qui propose des bourses (Heureusement...). L'ensemble des institutions citées dans l'article ont exactement les mêmes systèmes de financement pour les plus modestes. Aux Etats Unis certains sportifs (y compris des français) se font payer leurs études.
Renseignez vous sur les statistiques hallucinantes sur les origines sociales des étudiants à HEC, ESSEC et ESCP: Fils et filles de patrons, cadres sup et dirigeants, professions libérales et enfants d'enseignants. Ces écoles sont des modèles de reproduction sociale. Si vous avez été étudiant sur place vous avez du, nécessairement, vous en rendre compte et si vous êtes d'origine modeste bravo car vous êtes d'autant plus méritant. Science Po s'est attaqué au problème avec la voie ZEP. ESSEC et HEC ont mis en place des dispositifs cosmétiques ...

9.Posté par Romain le 25/06/2017 20:29 | Alerter
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Arrêtez de polémiquer sur les prétendues qualités de ces écoles... Evidemment HEC, ESSEC, ESCP sont des excellentes écoles (Ca m'arrange car je suis un pur produit de ce système). Mais cela n'enlève rien à IE Business School, Bocconi ou LBS qui sont des écoles équivalentes (Parfois mieux classées, parfois un peu en dessous mais en tout cas dans le même périmètre elitiste) dans leur pays respectif. Heureusement l'excellence se retrouve dans d'autres pays. Et oui les classes préparatoires sont d'excellentes écoles de la vie. J'y ai beaucoup travaillé et beaucoup appris. Mais encore une fois les étudiants des grandes européennes n'ont rien à nous envier même s'ils n'ont pas fait de prepa. Nous les avons tous, un moment ou un autre, croisées en échange ou sur nos campus certains de ces étudiants. Ils nous ressemblent beaucoup par bien des cotés. Pour ma part je pense qu'il existe une "aristocratie" d'écoles européennes qui forment les managers de demain. Donc polémique ridicule sur les prépas. Point à la ligne.

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