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Le masitinib d’AB Science à l’essai contre le Covid-19





Le 30 Mai 2020

Une nouvelle piste prometteuse dans la lutte universelle contre le Covid-19. La biotech française AB Science a reçu l’autorisation de l’Agence française du médicament (ANSM) de lancer une étude clinique de phase 2 évaluant le masitinib, sa molécule phare, en combinaison avec l’isoquercétine, dans le traitement des formes modérées et sévères du Covid-19.


masitinib et isoquercétine, combinaison gagnante contre le Covid-19 ? Un essai à suivre de près.
masitinib et isoquercétine, combinaison gagnante contre le Covid-19 ? Un essai à suivre de près.
Alors que la pandémie a déjà causé la mort de plus de 27 000 personnes en France et de plus de 300 000 dans le monde (au 15 mai), la recherche clinique s’accélère pour tenter de trouver un traitement efficace contre le Covid-19. À ce jour, il n’existe en effet aucun vaccin ni médicament ciblant spécifiquement le nouveau coronavirus, et aucune thérapie connue n’a encore fait la preuve de son efficacité optimale. Les attentes sont donc immenses dans le monde entier.
 

Recherche d’un traitement : un enjeu planétaire
 
C’est l’effervescence et la mobilisation générale dans les sociétés pharmaceutiques pour trouver le fameux « Covid-killer » qui pourrait rapporter gros. Depuis les débuts de la pandémie, petits et grands laboratoires se sont lancés dans la course. Une bataille sanitaire et économique majeure dont l’enjeu planétaire est d’arrêter ou de contrôler l’épidémie.
 
Dans le monde, plus de 800 essais cliniques sont lancés (1). Une centaine de sociétés pharmaceutiques et de biotechnologie, de groupes de recherche universitaires et d’organismes de santé sont impliqués dans le développement d’un vaccin ou d’un traitement qui atténuerait la gravité du Covid-19. La course fait rage et dans cette course mondiale, c’est la Chine qui a lancé le plus d’essais cliniques, loin devant les États-Unis et la France.
 
Malgré d’intenses efforts de recherche mondiale et même si de premiers candidats sont déjà testés chez l’homme, il faudra sans doute attendre au moins un an pour qu’un vaccin soit mis au point et arrive sur le marché. Alors, parallèlement, on cherche un traitement qui pourrait améliorer l’état des patients développant des formes graves de la maladie.
 
À court terme, on mise surtout sur le repositionnement de médicaments qui ont déjà fait leurs preuves dans d’autres maladies et sont susceptibles d’avoir de l’effet sur le Covid-19. Certains visent à empêcher la réplication du virus et d’autres à moduler une réponse immunitaire disproportionnée. Dans la première catégorie, figurent notamment l’hydroxychloroquine, le remdesivir (Gilead) ou le lopinavir/ritonavir. Dans la seconde, on trouve notamment des anticorps monoclonaux comme le tocilizumab (Roche) ou le sarilumab (Regeneron).
 

Un rationnel scientifique solide
 
Mais aujourd’hui, une nouvelle piste émerge avec une nouvelle molécule : le masitinib, molécule phare de la société AB Science, dont l’efficacité va être évaluée, en combinaison avec l’isoquercétine (Quercegen), lors d’un essai clinique de phase 2 autorisé par l’Agence française du médicament (ANSM). La biotech française a présenté le 11 mai, lors d’une web-conférence, le rationnel scientifique et le positionnement original de cette nouvelle combinaison thérapeutique, ainsi que le design et le calendrier de l’étude clinique. Une conférence animée par Alain Moussy (2), directeur général d’AB Science, et Jean-Pierre Kinet (3), co-président du comité scientifique et professeur de pathologie à la Harvard Medical School (Boston, USA).
 
Beaucoup de patients atteints de formes modérées et sévères du Covid-19 développent ce que l’on appelle un « orage de cytokines » (4). Un emballement du système immunitaire qui peut mettre en péril la vie du patient. Cette libération massive et incontrôlée de cytokines provoque en effet une inflammation pulmonaire sévère et des thromboses (formation de caillots dans le sang), associées au syndrome de détresse respiratoire aiguë. Une inflammation pathologique qui peut détruire les poumons, mais aussi d’autres organes vitaux comme les reins ou le cœur.
 
L’une des pistes thérapeutiques consiste à contrôler ces « tempêtes immunitaires ». Or il existe un faisceau d’arguments scientifiques solides pour penser que la combinaison du masitinib avec l’isoquercétine peut agir dans ce sens. Comme le souligne Pascal Chanez (5), professeur de médecine respiratoire à l’hôpital Nord de Marseille et coordonnateur principal de l’étude clinique : « D’une part, le masitinib et l’isoquercétine exercent une activité en amont pour prévenir l’orage de cytokines et les lésions pulmonaires associées, ainsi que la thrombose. Et d’autre part, la combinaison des deux produits a un effet synergique innovant (…) qui pourrait protéger la population âgée la plus vulnérable ».
 

Un mode d’action original, un positionnement unique

La combinaison masitinib - isoquercétine se différencie des autres stratégies thérapeutiques sur plusieurs points clés. D’abord, elle cible les cellules du système immunitaire inné en amont, plutôt que les cytokines libérées en aval. Ensuite, elle peut potentiellement prévenir la thrombose, synonyme de soins intensifs et de décès. Enfin, elle pourrait agir sur les symptômes neurologiques du Covid-19… Et aussi améliorer spécifiquement le trouble pulmonaire sévère des personnes âgées atteintes du Covid-19.

Le masitinib est en effet un puissant inhibiteur des mastocytes et des macrophages, cellules immunitaires qui contribuent à l’orage de cytokines. Grâce à son mode d’action unique et à son effet inhibiteur sur l’activation du processus inflammatoire, le masitinib est donc susceptible de prévenir les lésions pulmonaires. Il a d’ailleurs démontré, lors d’essais cliniques, une efficacité dans l’asthme persistant sévère (6), en oncologie, dans les maladies inflammatoires et des maladies du système nerveux central.
 
Quant à l’isoquercétine, elle réduit les neutrophiles, également associés à l’orage de cytokines, et inhibe la formation de caillots. Elle diminue le taux de D-dimères (7), un prédicteur de la gravité de la thrombose liée au Covid-19, et possède également une activité antivirale.
 
Par ailleurs, le masitinib peut aussi avoir un effet pour contrôler les symptômes neurologiques sévères et persistants, qui constituent le nouveau défi du Covid-19. Le masitinib a en effet déjà démontré, dans deux essais cliniques de phase 2b, son efficacité chez des patients atteints de sclérose latérale amyotrophique (8) et de sclérose en plaques progressive (9).
 

Une étude au potentiel considérable
 
Randomisée et comparative, l’étude clinique de phase 2 vise à évaluer la tolérance et l’efficacité du masitinib associé à l’isoquercétine chez les patients hospitalisés atteints de formes modérées et sévères de Covid-19. Elle doit recruter 200 patients sans limitation d’âge (y compris des malades de plus de 80 ans) dans des hôpitaux en France et d’autres pays. Le critère d’évaluation principal de l’étude est l’amélioration de l’état clinique des patients après 15 jours de traitement.
Ouverte en mai 2020, l’étude durera entre deux et six mois selon les vagues d’hospitalisation.
 
Ses résultats, attendus avec impatience, devraient être connus entre août et décembre 2020. S’ils sont positifs, ils devraient, compte tenu du caractère universel de la pandémie, décupler la notoriété du Masitinib et d’AB-science, déjà dopée ces derniers mois par leurs récents succès.
 





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