L’association pour une démocratie directe a pointé dimanche 4 janvier dernier un problème qui pourrait jeter le trouble sur les parlementaires de France. Selon l’association, environ 150 députés utiliseraient leurs indemnités parlementaires pour acheter leur permanence dans leur circonscription, ou plutôt, pour rembourser l’achat d’une permanence en leur nom propre.
Ces indemnités, de 5 770 euros mensuels, accordées au titre de l’IRFM (Indemnité Représentative de Frais de Mandat), seraient dépensées, d’après l’association, « sans aucun justificatif, aucune facture, ni quittance ». L’association met en avant le fait que « tous les citoyens français ont le droit de savoir ce que nos élus font de l’argent public ».
Or, en achetant leur permanence avec l’argent du contribuable, ces parlementaires se mettent en position de prise illégale d’intérêts. « Une fois qu’il est propriétaire, le député peut louer sa permanence. Certaines finissent en magasins de chaussures. Il peut aussi le garder ou le revendre » ajoute l’association qui envisage de saisir le Conseil d’Etat, voire de porter plainte au pénal.
Ce problème n’est pas récent. En avril 2013, quand le gouvernement prônait la transparence et publiait les déclarations de patrimoine de ses ministres, plusieurs élus locaux avaient pointé du doigt cette déviance, pourtant légale, mais bien discutable sur le plan éthique. Certains députés, à l’image de Jean-Jacques Urvoas, restent hostiles à la publication du patrimoine des élus. Avec un tel scandale en trame de fond, ce n’est guère étonnant…
Seuls quelques articles mineurs auront été censurés. Le Conseil constitutionnel a validé lundi 29 décembre dernier le Budget 2015 du gouvernement, ainsi que le Budget rectificatif 2014, quasiment dans leur ensemble.
Les Sages ont tout d’abord écarté l’argument des députés et sénateurs UMP qui avaient saisi le Conseil, arguant que le Budget 2015 n’était pas « sincère ». Une décision qui montre que cette année, le Conseil est bien moins sévère avec le gouvernement que les années précédentes. En 2009, il avait retoqué la taxe carbone, fin 2013, la taxe sur les très hauts revenus avait subi le même sort.
Le Conseil constitutionnel a néanmoins censuré l’article 79 de la loi qui voulait réprimer toute personne qui aurait facilité volontairement l’évasion et la fraude fiscale. Un article qui selon les sages aurait méconnu le principe de légalité des délits et des peines, qui oblige à définir les infractions et les peines encourues en termes suffisamment claires et précis.
Une légère censure donc, et une bonne nouvelle pour le gouvernement qui semble avoir tiré les leçons des censures des années précédentes.
Désormais les montants des prestations sociales versées seront directement échangés et recoupés avec les données de l’administration fiscale. Le résultat d’un combat de plus de quatre ans pour quelques députés, dont Pierre Morange, rapporteur de cette mesure. Une mesure votée jeudi dernier, qui intervient enfin après un combat acharné pour ces parlementaires.
Car le recoupage des données entre l’administration sociale et l’administration fiscale n’existait pas jusqu’alors, aussi surprenant que cela puisse paraître. Dans les faits, il existe bien une plateforme d’échange d’informations, au niveau informatique, mais la transmission des données ne se faisait pas de manière automatique. Autant dire qu’elle ne se faisait pas du tout.
Une décision capitale, qui pourrait bien faire économiser à l’Etat quelques milliards d’euros chaque année. En effet, on estime à 80 milliards d’euros le montant des prestations sociales versées aux Français, alors que la fraude sociale s’élèverait entre 20 et 25 milliards chaque année. Rien de moins qu’un point de PIB… Côté fraude fiscale, on l’estime en revanche entre 15 et 19 milliards d’euros pour les ménages. Soit plus de 40 milliards d’euros de manque-à-gagner pour l’Etat. Et à l’heure où il va falloir trouver 3,6 milliards pour plaire à Bruxelles, la mesure semble loin d’être inutile…
Est-ce tout, ou bien une partie émergée de l’iceberg ? Après les affaires Cahuzac et Thévenoud, les Français pourraient commencer à se poser des questions. D’après le Canard enchaîné, soixante députés et sénateurs, sur un total de 925, seraient en situation d’irrégularité fiscale.
Les noms ne sont pas connus, mais d’après le journal satirique, la liste pourrait être révélée d’ici la fin de l’année. Avant cette date, les fraudeurs doivent à tout prix avoir régularisé leur situation. Pour l’heure, Bercy semble vérifier, au cas par cas, les petits écarts fiscaux de ces parlementaires, en se basant sur la déclaration de patrimoine de chaque élu, obligatoire désormais.
En effet, depuis l’affaire Cahuzac, chaque élu est forcé de déclarer son patrimoine. Des déclarations qui sont ensuite remises à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique, qui les remet à son tour à l’administration fiscale pour vérification. Une procédure qui permet désormais de traquer les futurs Thévenoud au sein des hémicycles de la République.
Reste à savoir si les députés et sénateurs mis en cause dans cette nouvelle affaire de fraude fiscale, sont les mêmes qui à l’époque exigeaient la démission de Thomas Thévenoud…