Le flou persiste mais l’écotaxe pourrait bientôt faire son grand retour. A moins qu’il ne s’agisse d’un dérapage incontrôlé, la ministre de l’Ecologie en a beaucoup dit, lundi 24 novembre, au sujet de cette taxe tant contestée.
Interrogée en marge d’une conférence de presse consacrée à la Conférence environnementale, Ségolène Royal a déclaré que ce qui avait été décidé le mois dernier par le gouvernement c’est « la suspension du contrat avec Ecomouv’ qui n’est pas la suspension de l’écotaxe et certainement pas la suspension non plus du principe pollueur/payeur ».
Des déclarations qui ne vont pas dans le sens de ce que la ministre avait préalablement déclaré le 9 octobre dernier, annonçant la suspension sine die de cette taxe poids lourd. Quant au contrat avec Ecomouv, la société gérant les portiques et la mise en place de cette taxe, il avait été suspendu le 3à octobre dernier.
Beaucoup de confusions, donc, autour de cette question. La ministre de l’Ecologie, pour clarifier la situation, parle donc de la suspension des modalités de l’application de cette taxe, via Ecomouv, et non pas de la taxe en elle-même. Des propos qui vont dans le sens de ceux prononcés par François Hollande, évoquant lundi dernier une expérimentation de cette mesure fiscale en Alsace et en Lorraine… L’affaire n’est donc pas finie.
« Le gouvernement a décidé de résilier le contrat de partenariat conclu avec Ecomouv’ le 20 octobre 2011 » a déclaré laconiquement, jeudi 30 octobre, devant le Sénat, le secrétaire d’Etat aux Transports, Alain Vidalies. L’écotaxe est donc bel et bien enterrée, pour ceux qui avaient encore des doutes à ce sujet.
Alain Vidalies a fait état devant la chambre haute de la République d’une lettre de résiliation, envoyée prochainement à l’entreprise Ecomouv’. D’après le secrétaire d’Etat, la missive en question fera état de « doutes » émis sur la « validité du contrat initial au regard des exigences constitutionnelles qui s’imposent à l’Etat lorsqu’il confie à des personnes privées la gestion de certaines activités ».
Un an après la suspension de l’écotaxe, c’est donc le contrat d’exploitation censé gérer les portiques écotaxe et la récolte de l’argent qui est enterré aujourd’hui. Une décision lourde de sens, et lourde également pour les finances de l’Etat. En effet, à l’époque, le gouvernement estimait à un milliard d’euros le coût de l’abandon de l’écotaxe. Une somme d’argent qui ne court pas les rues, à l’heure où le gouvernement a annoncé 3,6 milliards d’euros d’économies supplémentaires.
Ségolène Royal part en guerre contre les sociétés d’autoroutes. Accusées de pratiquer des marges insolentes, une polémique qui revient sur le tapis actuellement, ces entreprises sont reçues aujourd’hui par le Premier ministre, Manuel Valls, qui va essayer de les raisonner sur la question des prix qu’elles pratiquent.
A ce sujet, Ségolène Royal n’y va pas par quatre chemins. La ministre de l’Ecologie a ainsi proposé de baisser les prix de ces sociétés de 10 %. Une diminution des prix qui pourrait s’exercer en mettant en place un système de gratuité pendants les week-ends. Ce qui revient pour ces sociétés à tuer la poule aux oeufs d’or.
« Les discussions vont commencer pour mettre les autoroutes devant leurs responsabilités », a précisé la ministre. Ajoutant qu’un « Etat moderne est un Etat où chacun est mis devant ses responsabilités. Il n’y a pas de raison que les Français paient deux fois ». Des déclarations qui devraient sans aucun doute agiter la réunion de Manuel Valls, avec les dirigeants de ces sociétés.
Compenser le manque à gagner de la fin de l’écotaxe semble décidément bien compliqué. Surtout au sein du gouvernement qui apparaît aujourd’hui divisé sur la question. A l’image de Ségolène Royal, ministre de l’Ecologie, qui a proposé de taxer à la place les profits des sociétés d’autoroutes, et qui s’est fait recarder vendredi 10 octobre par le ministre des Finances, Michel Sapin.
Ce dernier explique en effet qu’il sera compliqué de mettre en place une telle idée. Au motif que ces sociétés, véritables poules aux oeufs d’or pas souvent bien encadrées, de concessions en raison de la solidité des contrats signés. Des contrats qui leur accordent, et cela le ministre ne l’avoue qu’à demi-mots, une certaine impunité et une grande liberté.
A cette mesure, le gouvernement préférerait apparemment augmenter de nouveau le prix du gazole, de deux centimes d’euros. Une idée à laquelle Ségolène Royal semble se refuser. L’ex-président de région précise en effet s’opposer à toute volonté « d’écologie punitive ». « Plutôt que de refaire payer les automobilistes, je préfère un prélèvement sur les sociétés d’autoroutes » précise-t-elle.
Une chose est sûre. Le conflit entre les deux mastodontes du gouvernement est loin d’être achevé. La question aujourd’hui est de savoir qui va payer un manque-à-gagner estimé à 400 millions d’euros par an, auquel se rajoute le milliard que doit l’Etat à Ecomouv, la société responsable de la gestion de cette taxe…
Circuler en poids lourds dans Paris risque de coûter de plus en plus cher. Anne Hidalgo souhaite en effet faire payer tous les camions de plus de 3,5 tonnes qui souhaiteraient emprunter le périphérique parisien. Rien de nouveau en ce qui concerne les conditions, ce sont les mêmes que celles de la taxe poids-lourds, qui a remplacé l’écotaxe tant critiquée, et notamment en Bretagne.
A l’heure actuelle, quatre portiques ont déjà été installés sur le périphérique parisien. Reste désormais au conseil de Paris de se prononcer en votant cette proposition, pour une entrée en vigueur estimée au 1er octobre prochain, selon les informations communiquées par le Journal du Dimanche.
A noter que si le texte est voté, il suivra une période d’expérimentation de trois mois, sans facturation. La véritable mise en oeuvre devrait débuter au 1er janvier 2015, a notamment précisé Christophe Najdovski, adjoint de la mairie de Paris chargé des transports.
Côté chiffres, un poids lourds serait facturé 13 centimes d’euros par kilomètre, en moyenne. La taxe poids lourds pourrait ainsi rapporter chaque année, cinq millions d’euros par an à Paris, et 550 millions d’euros pour la totalité de la France.