Quelle que soit la dynamique de votre candidat, la commenter n’est pas suffisant. Contribuez-y ! Il manquait deux voix par bureau de vote à Jospin en 2002, une dizaine à Mélenchon en 2017. Votre implication peut jouer sur ces voix. S’il y a un moment dans le quinquennat où il faut se mobiliser c’est maintenant, pour ne rien regretter le 10 avril à 20 h 1. Alors, même si nos vies sont denses, et que les candidats ne sont pas parfaits, n’allez plus seulement voter. Militez pour éviter à votre candidat de manquer le second tour ou le seuil fatidique des 5 % à une poignée de voix.
Attention, militer ne signifie pas nécessairement tracter, afficher ou poster compulsivement sur les réseaux sociaux ! Discuter est bien plus déterminant. La conversation individuelle est prouvée par les études sociologiques comme la méthode de militantisme la plus efficace, loin devant le tractage et l’affichage. Elle est la pierre angulaire des mobilisations politiques efficaces d’Obama, à Macron, de Sanders à Mélenchon et leurs porte-à-porte massifs.
Pourquoi la conversation seul à seul est-elle si puissante ? Tout d’abord, elle permet non seulement de « parler politique » mais surtout d’« écouter politique ». Au lieu d’imposer à l’autre un argumentaire générique, vous pouvez le questionner sur les sujets qui lui importent vraiment et y répondre de manière spécifique. Ensuite, discuter politique seul à seul et sans public (les autres amis autour d’un verre ou les gens sur les réseaux sociaux sont un public !) permet d’éviter de s’enfermer dans des postures. La personne en face est autorisée à changer d’avis sans risquer de perdre la face. Vous êtes autorisé à exprimer vos réserves sur votre candidat tout en expliquant pourquoi elles ne sont pas rédhibitoires, sans vous sentir acculé.
Voici une recette simple pour démultiplier votre vote dans les jours qui viennent. Réservez une heure quotidienne durant laquelle, méthodiquement, vous appelez ou écrivez à vos proches potentiellement indécis. S’ils le sont effectivement, amenez-les à cheminer vers votre candidat en répondant à leurs doutes et en partageant ce qui vous anime dans votre choix. Sachez prioriser vos conversations, ciblez les indécis plutôt que les convaincus d’un autre candidat qui changeront très difficilement d’avis. Pour vous mettre en jambe, commencez par quelqu’un de votre famille, un ami de confiance, un collègue avec qui vous parlez politique à la machine à café, votre voisin… L’important est de lui poser des questions, lui demander « qu’est-ce que tu veux voir changer dans un mois si on arrive à changer de président ? », « Quel est le sujet qui te semble essentiel ? », « si l’élection était aujourd’hui entre quels candidats tu hésiterais ? », « As-tu bien pensé à faire ta procuration ? »nnCette méthode peut faire la différence, même à quelques jours du premier tour, car elle permet de propager le soutien en faveur de votre candidat à la manière d’un virus. De façon exponentielle. Notamment parce que si vous tombez sur un convaincu de votre candidat, vous pouvez l’amener à faire comme vous. Lancez-vous des défis sur le nombre de personnes à contacter. C’est l’autre vertu de la conversation individuelle : elle permet de faire passer à l’action de façon concrète et efficace. nnVotre rôle est de faire cheminer les gens sur l’échelle de l’engagement : indécis, soutien, convaincu puis propagateur. La rapidité de l’exponentielle va donc dépendre du nombre de conversations que vous menez et de votre efficacité à faire franchir un pas sur l’échelle de l’engagement à vos interlocuteurs. Vous allez voir, cette forme de militantisme est source d’une joie particulièrement contagieuse. En particulier quand vous réaliserez que votre discussion a été déterminante pour éviter que la personne s’abstienne.
Un dernier mot. Parler politique avec ses proches ou des inconnus nécessite de faire fi de l’idée selon laquelle « c’est impoli de parler politique ». Cette rengaine péremptoire qui arrange bien les conservateurs de tous poils. Mais, admettons que ce soit le cas. Qu’est-ce qui est le plus grave ? Être un peu impoli ou prendre le risque de répéter le second tour de 2017 par manque de mobilisation ? Si, avec une machine à remonter le temps vous pouviez appeler votre père pour lui demander d’aller voter Jospin plutôt que d’aller à la pèche le 21 avril 2002, vous sentiriez-vous si impoli ?
Clément Pairot,
Militant dans les campagnes de Sanders en 2016, Mélenchon en 2017
formateur les bénévoles de la Primaire Populaire
Auteur du manuel de mobilisation N’allez plus seulement voter (VA Editions, 2021)
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