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Paul Polman, Andrew Winston : "L'Entreprise Net Positive"





Le 19 Août 2022, par Bertrand Coty interview

Paul Polman a dirigé plusieurs multinationales dont, de 2009 à 2019, Unilever, entreprise au sein de laquelle il a mené la révolution Net Positive. Ambassadeur des objectifs de développement durable (ODD) des Nations Unies, conseiller auprès de nombreuses entreprises sur les sujets de durabilité et coprésident de la Global Commission for the Economy and Climate, il est considéré par le Financial Times comme l’un des dirigeants marquants de cette décennie.

Andrew Winston est l’un des penseurs les plus influents de notre époque en matière de modèles économiques durables. Coauteur de Green to Gold et auteur de The Big Pivot, il a également signé des centaines d’articles dans des publications aussi prestigieuses que Harvard Business Review et MIT Sloan Management Review.


Paul Polman, Andrew Winston, vous développez dans votre dernier livre publié chez Pearson, un « nouveau concept » : L’Entreprise Net Positive. Pouvez-vous nous exposer votre approche ?

Dans notre livre, nous définissons une entreprise Net Positive comme une organisation qui augmente le bien-être de tous ceux qu’elle impacte – c’est une entreprise qui fait du profit tout en résolvant les problèmes du monde au lieu d’y contribuer.

La question fondamentale que nous posons est la suivante : « Le monde est-il meilleur parce que votre entreprise y est présente ? » Les principes d’exploitation d’une entreprise Net Positive comprennent notamment la prise en charge de tous les impacts sur le monde, la recherche de valeur à long terme, le service à de multiples parties prenantes, l’adoption de partenariats porteurs de transformation et le fait de bien servir les actionnaires par l’adoption de ces principes.

Créer le bien-être au travers de ses actions -- à travers chaque produit et service, dans chaque région où vous opérez, et tout au long de la chaîne de valeur -- est en quelque sorte un Graal.

Aucune entreprise ne peut véritablement dire qu’elle en est là aujourd’hui (pour certaines, c’est même encore impossible), mais de nombreux dirigeants intègrent déjà une partie de ces objectifs pour leur entreprise.
 
Comment selon vous, l’entreprise peut-elle se détacher de l’objectif de profit à court terme et créer de la valeur porteuse de sens à long terme ?

La pression exercée par le rendement à court terme est peut-être le plus grand obstacle pour les entreprises qui veulent adopter une démarche de développement durable. Bien qu’il s’agisse en grande partie d’un mythe persistant selon lequel la durabilité coûte toujours plus cher, le changement signifie de réorienter les investissements au sein de l’entreprise.

Les bénéfices peuvent être très élevés, même si c’est un changement dans la façon de concevoir et de faire les choses. La pression pour produire des résultats trimestriels toujours meilleurs peut forcer les entreprises à ignorer tout investissement réel dans le renforcement de ses capacités et de perspectives à long terme (pas seulement sous la bannière des facteurs ESG [environnemental, social et de gouvernance], mais de tout investissement).

L’une des manières dont nous avons géré cette pression du court terme chez Unilever a été de mettre fin aux prévisions trimestrielles des bénéfices. Nous avons libéré les dirigeants de la tyrannie du suivi à 90 jours et leur avons demandé d’équilibrer leurs besoins et leurs investissements à court et à long terme.

Peut-on dire que votre pensée supplante la pensée libérale ?

Depuis des décennies, la satisfaction des actionnaires est l’objectif principal, sinon le seul, des grandes entreprises. Mais cela change, car nombre de parties prenantes exigent plus d’action et de transparence de la part de l’entreprise.

Devenir Net Positif ne va pas à l’encontre de la création de valeur pour les entreprises et les actionnaires. En fait, c’est l’un des principes clés de notre vision. Une entreprise Net Positive cherche à améliorer le bien-être de toutes les parties prenantes. Elle adopte également une vision à plus long terme. Respecter ces principes et prendre en charge ses propres répercussions sur le monde créera au fil du temps plus de valeur pour les actionnaires. Les investisseurs agiront parce que l’entreprise est Net Positive, non malgré cela. 

Comment, au-delà de votre livre, convaincre les entrepreneurs de la planète de changer le monde ?
 
Nous ne pensons pas que c’est à nous de convaincre. Les entreprises subissent d’énormes pressions de la part d’un large éventail d’intervenants.
Les clients commerciaux veulent en savoir plus sur les impacts sociaux et environnementaux de ce qu’ils achètent.
Les consommateurs recherchent des produits qui les aideront à adopter un mode de vie plus durable.
Les employés présents et futurs veulent travailler pour une entreprise qui partage leurs valeurs et qui a une vision d’avenir. Et les investisseurs, qui sont restés longtemps à l’écart de ces discussions, posent maintenant beaucoup plus de questions et exigent des données et des mesures sur le rendement ESG des entreprises.

Il est également utile de se rappeler que ce qui intéresse tous ces intervenants, ce sont les moyens mis en œuvre pour lutter contre les sujets de préoccupation comme les inégalités et les changements climatiques. Les entreprises, conjointement aux gouvernements et à la société civile, doivent changer le monde pour que nous puissions tous survivre et prospérer. C’est aussi la plus grande opportunité économique de l’histoire, car des marchés de plusieurs billions d’euros dans les bâtiments, les transports, l’alimentation et plus encore, progressent rapidement.
 
Traduit de l'Anglais par la rédaction.




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