Résidences secondaires : la réduction du délai d’exonération de la plus-value, un signal fiscal fort

L’Assemblée nationale a voté un amendement réduisant de cinq ans la durée de détention nécessaire pour obtenir une exonération totale de la plus-value immobilière lors de la revente des résidences secondaires. Présentée comme une mesure de fluidification du marché, cette décision pourrait modifier l’équilibre fiscal du patrimoine immobilier en France.

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Une mesure inscrite dans le projet de loi de finances 2026

Adopté le 3 novembre 2025 dans le cadre du budget 2026, l’amendement propose de ramener de vingt-deux à dix-sept ans la durée de détention ouvrant droit à l’exonération totale de l’impôt sur la plus-value lors de la cession des résidences secondaires. L’objectif est simple : encourager la remise sur le marché de biens immobilisés depuis des décennies.

Le député Corentin Le Fur, porteur du texte, a défendu une initiative « pragmatique » permettant d’« alléger une fiscalité devenue trop dissuasive pour les propriétaires ». Selon lui, « attendre plus de vingt ans pour vendre un bien sans être imposé sur la plus-value n’a plus de sens dans le contexte actuel du logement ». La mesure a été adoptée malgré les réticences de la commission des finances et du ministère des Comptes publics, qui ont souligné la nécessité d’une période transitoire afin d’éviter une application brutale du nouveau barème.

Un allègement partiel d’une fiscalité toujours complexe

Actuellement, la cession des résidences secondaires est imposée à 19 % au titre de l’impôt sur le revenu, auxquels s’ajoutent 17,2 % de prélèvements sociaux, soit un taux global de 36,2 %. Un abattement progressif réduit la charge fiscale selon la durée de détention : l’exonération totale de l’impôt sur le revenu intervient au bout de 22 ans, celle des prélèvements sociaux à 30 ans.

En abaissant le premier seuil à 17 ans, les députés espèrent réduire l’effet de blocage observé sur le marché des résidences secondaires. Le mécanisme d’abattement resterait inchangé : 6 % par an à partir de la 6ᵉ année jusqu’à la 21ᵉ, puis 4 % la 22ᵉ année. L’application pratique du nouveau calendrier fera l’objet d’un décret précisant la transition entre les régimes.

Un marché des résidences secondaires en perte de dynamisme

Selon les notaires de France, les ventes dans l’ancien ont chuté d’environ 25 % depuis 2023. Les résidences secondaires, qui représentent plus de 10 % du parc immobilier national, ne sont pas épargnées. Dans certaines zones touristiques, leur part dépasse 40 % des logements : plus d’un logement sur deux à Arcachon, près de 45 % à La Baule ou à Saint-Malo. Cette concentration renforce les tensions sur le logement local, les biens restant souvent vacants ou peu utilisés.

L’allongement des durées de détention, motivé par le poids de la fiscalité sur la plus-value des résidences secondaires, a contribué à figer le marché. En ramenant le délai d’exonération à dix-sept ans, le gouvernement espère inciter les propriétaires à arbitrer plus tôt leur patrimoine immobilier, libérant ainsi une partie de l’offre et stimulant les transactions. Cette orientation s’inscrit dans une logique de « choc d’offre » pour redynamiser un secteur en recul depuis la remontée des taux d’intérêt en 2022.

Des effets économiques à court terme incertains

Les économistes restent partagés sur l’efficacité réelle de la mesure. D’un côté, une réduction du délai pourrait accélérer les ventes des résidences secondaires, générant un surcroît temporaire de recettes fiscales liées aux transactions. De l’autre, l’impact structurel sur la disponibilité des logements reste limité : dix-sept ans demeure un horizon long pour la majorité des investisseurs.

Le coût budgétaire potentiel inquiète également : les plus-values immobilières rapportent chaque année plusieurs centaines de millions d’euros à l’État. Si la mesure entraîne une baisse des recettes sans compenser par une hausse significative du volume de ventes, son équilibre financier pourrait être remis en cause. Les ajustements à venir lors de la navette parlementaire — notamment au Sénat — préciseront les modalités d’entrée en vigueur et les éventuelles clauses de sauvegarde budgétaire.

Un geste fiscal à portée symbolique

Cette réduction du délai d’exonération traduit une volonté politique claire : redonner confiance aux propriétaires dans un contexte de crise du logement et de recul de la mobilité résidentielle. Elle s’ajoute à une série de mesures ciblées du projet de loi de finances visant à relancer la construction, simplifier la fiscalité du patrimoine et soutenir les collectivités confrontées à la tension immobilière.

Pour autant, les acteurs du secteur rappellent qu’un ajustement de cinq ans ne suffira pas à redresser un marché affecté par la hausse du coût du crédit, la baisse du pouvoir d’achat et la prudence des investisseurs. L’amendement, s’il est confirmé par le Sénat, constituera un premier signal politique en faveur d’une fiscalité plus flexible, mais non une réforme structurelle de fond.

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