Le 19 février 2025, le Sénat a rejeté une proposition de loi visant à indexer les salaires sur l’inflation. Défendue par le groupe communiste, la réforme avait pour objectif de garantir un ajustement automatique des rémunérations face à la hausse des prix. Comme ce qui se fait en Belgique ou au Luxembourg. Mais toujours pas en France.
Une proposition visant à sécuriser le pouvoir d’achat des salariés
Déposée par la sénatrice Cathy Apourceau-Poly et soutenue par le groupe communiste, la proposition de loi entendait mettre en place une indexation automatique des salaires sur l’inflation, à l’image de ce qui existe en Belgique et au Luxembourg. Ce mécanisme aurait concerné les salaires du secteur privé ainsi que le point d’indice des fonctionnaires, afin de garantir une adaptation systématique des rémunérations aux variations du coût de la vie.
La justification avancée par les promoteurs du texte repose sur l’érosion du pouvoir d’achat due à l’inflation des dernières années. En 2023, le salaire réel moyen en France a reculé de près de 2 %, un phénomène qui touche particulièrement les ménages les plus modestes. À l’inverse, des pays comme la Belgique et le Luxembourg ont enregistré une progression des salaires réels grâce à leur système d’indexation.
En inscrivant cette proposition dans leur « niche parlementaire », les sénateurs communistes ont cherché à relancer le débat sur la place des travailleurs dans la politique économique française. Pour eux, l’indexation salariale serait un levier pour limiter les inégalités sociales et renforcer la protection des salariés face à des périodes de forte inflation.
La droite s’y oppose, mais pourquoi ?
La proposition a été rejetée par 225 voix contre 111. Parmi les arguments avancés par les sénateurs de droite et du centre, plusieurs préoccupations majeures ont été évoquée. En premier lieur, lier les salaires à l’inflation pourrait selon eux alourdir le coût du travail et affaiblir la compétitivité des entreprises françaises sur le marché international. Une augmentation automatique des rémunérations pourrait réduire les marges des employeurs. Ces derniers, selon les sénateurs, pourraient alors se lancer dans des licenciements pour compenser la hausse de leurs coûts de production.
L’un des principaux arguments avancés est le risque d’auto-alimentation de l’inflation. Si les salaires augmentent automatiquement avec les prix, les coûts de production risquent d’être répercutés sur les prix finaux des biens et services, créant une boucle inflationniste. Un effet qui, selon certains économistes, pourrait amplifier plutôt qu’atténuer la perte de pouvoir d’achat. Mais qui, dans les faits, ne semble pas se produire ni en Belgique ni au Luxembourg.
L’indexation sur l’inflation existe déjà en France mais pas pour les salaires
En France, l’indexation est appliquée uniquement au Smic, aux pensions de retraite et aux prestations sociales. L’État laisse donc aux branches professionnelles et aux entreprises le soin de négocier les augmentations salariales. « Le smic est indexé sur l’inflation, les pensions de retraite sont indexées sur l’inflation, les prestations sociales sont indexées sur l’inflation, mais les salaires, eux, ne le sont pas. Il est grand temps que les choses changent », a dénoncé Cathy Apourceau-Poly, relayée par 20Minutes.
L’indexation des salaires sur l’inflation aurait constitué une rupture avec le modèle économique français, en instaurant une régulation automatique des rémunérations. Le choix du Sénat de rejeter cette mesure reflète une volonté de préserver le dialogue social et d’éviter une rigidification du marché du travail. Toutefois, alors que d’autres pays européens ont adopté des systèmes d’indexation avec succès, la question reste posée : le modèle français protège-t-il efficacement les travailleurs contre la perte de pouvoir d’achat ?