Journal de l'économie

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« MAUX CROISÉS » Le monde viticole moins impliqué dans les mouvements de ras-le-bol paysan.





Le 25 Octobre 2019, par Sébastien Burel - Expert

3 lettres qui valent cher au Scrabble résument à elles seules le malaise paysan : ZNT pour Zone Non Traitée. En 4 lettres, un acronyme symbolise quant à lui l’inquiétude des agriculteurs face à la mondialisation : CETA, le traité de libre-échange entre l’UE et le Canada.


Le 22 octobre 2019, les paysans français se mobilisaient massivement pour interpeller le gouvernement sur les risques de submersion du marché européen par les produits agricoles nord-américains et pour témoigner de leur désarroi devant « l’agri-bashing » dont ils se sentent les victimes.

On a toutefois peu entendu la voix des vignerons dans le concert de klaxon des tracteurs qui ont paralysé les centres-villes lors de cette journée d’action pilotée par la FDSEA (Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles).

Force est de constater que les viticulteurs français ont globalement bien mieux vécu l’ouverture des marchés que leurs homologues céréaliers ou éleveurs, plus exposés à la concurrence. Le CETA, ou les accords avec le Mercosur et les États-Unis sont donc perçus comme des opportunités plutôt que comme des menaces. Jérémy Giroud, secrétaire général de la FDSEA du Rhône et installé sur une quinzaine d’ha en Beaujolais relativise toutefois la faible participation du monde viticole aux manifestations. « Certes, il n’y avait qu’une vingtaine de vignerons beaujolais présents à Lyon, mais à Mâcon, par exemple, la mobilisation a été bien plus importante. » Une mobilisation que le leader syndical explique par la très vive inquiétude suscitée par la consultation mise en place par le gouvernement sur la redéfinition des ZNT. Une frange importante de la population française souhaiterait une interdiction des pulvérisations de traitements phytosanitaires dans une zone de 150 mètres alentour des habitations. Cette préoccupation citoyenne a trouvé un fort écho médiatique dans l’initiative individuelle de maires ruraux qui ont pris des arrêtés dans ce sens. Ces décisions municipales ont suscité l’ire des de très nombreux vignerons et des syndicats agricoles. Selon ces derniers, 50 % de la surface agricole utile française seraient directement impactés par l’élargissement de la ZNT de 5 à 150 mètres. Les agriculteurs entendent donc maintenir la pression sur le gouvernement dans l’attente des conclusions de sa consultation.

Une tout autre mesure a largement contribué à allumer la colère des vignerons : la mise en place, le 18 octobre d’une taxe de 25 % sur les vins tranquilles (non effervescents) par le gouvernement de M. Trump sur les vins français importés aux USA (voir article). Les viticulteurs se considèrent comme les otages d’une guerre commerciale qui ne les concerne pas puisqu’elle porte sur le conflit Airbus/Boeing. Cette colère est avivée par un très fort sentiment d’injustice. En effet, les vins de Champagne, les cognacs et les armagnacs sont épargnés par les sanctions américaines. Jérémy Giroud s’indigne du manque d’anticipation du gouvernement français, qui a laissé les taxes s’abattre sur une partie de la production viticole française, alors que LVMH a su actionner les leviers nécessaires pour protéger ses champagnes et ses eaux-de-vie ! Les récents propos du ministre français des Finances, M. Bruno Le Maire, vantant à la fois la bonne santé du secteur viticole français tout en rappelant que la France privilégie la voie de la négociation avec les USA, ne vont certainement pas rassurer ma filière.

Entre la décision attendue sur la ZNT et la très incertaine levée des sanctions américaines sur les importations de vin, l’automne risque d’être très, très chaud dans le Beaujolais. Et pas seulement à cause du réchauffement climatique… 

 


crédit photo : FDSEA


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