Le déclenchement de cette cyber-attaque s’inscrit dans un contexte de tensions exacerbées entre l’Iran et l’Occident, notamment à la suite de l’attaque Stuxnet en 2010. Ce malware, de paternités américaines et israéliennes, qui a ciblé les infrastructures nucléaires iraniennes, a mis hors service près de 40,000 ordinateurs, mettant complètement à l’arrêt le programme nucléaire iranien pour plusieurs mois et démontrant ainsi la vulnérabilité des nations aux cyberattaques. En réponse, l’Iran a élaboré une stratégie de riposte, ciblant Saudi Aramco, entreprise reliée aux Etats-Unis et importante dans l’économie mondiale avec son chiffre d’affaires de 260 milliards de dollars et ses 55,000 employés. Condamnant cette entreprise à n’utiliser que les fax pendant plusieurs semaines, perturbant le marché boursier du pétrole. Cette attaque n’était pas seulement une démonstration de force mais aussi un avertissement aux organisations dépendantes de la technologie pour leur sécurité et leur viabilité.
Une riposte calculée dans l’ombre numérique
Cette attaque a utilisé un malware nommé Shamoon, démontrant une capacité offensive sérieuse de la part de l’Iran dans le cyberespace. Pour paralyser 30,000 postes de travail, cette attaque a remplacé leurs MBR (Main Boot Record, partie d’un disque dur unique et permettant sa lecture) par des images du drapeau américain qui brule, ajoutant une dimension symbolique à l’attaque. Les experts américains dépêchés sur place ont rapidement attribué cette cyberattaque à l’Iran, soulignant la sophistication croissante des outils et méthodes employés par les nations pour mener ce genre d’actions. On estime aujourd’hui que les Iraniens ont pu arriver à une telle sophistication majoritairement grâce à de la rétro-ingénierie du virus Flame, un autre virus américain ayant nui à l’Iran début 2012.
Entre déni et affirmation : la guerre de l’information
Cette cyberattaque a aussi mis en lumière la guerre de l’information qui se joue parallèlement aux affrontements numériques. Bien que l’Iran ait officiellement nié toute implication, l’attribution de l’attaque par les experts américains et les symboles utilisés sur les ordinateurs infectés ont contribué à un climat de méfiance et d’accusations croisées. Cette dimension de la guerre cybernétique révèle combien la perception et l’information sont devenues des armes aussi puissantes que les codes malveillants eux-mêmes dans la guerre économique comme dans les conflits politiques.
Les leçons apprises et l’avenir de la cybersécurité
L’attaque contre Saudi Aramco a agi comme un catalyseur pour la communauté internationale et les entreprises, soulignant l’urgence de renforcer les défenses numériques. La nécessité d’une coopération internationale en matière de cybersécurité est devenue évidente, car les infrastructures critiques et les économies nationales sont devenues des cibles privilégiées dans les conflits géopolitiques. Les gouvernements et les entreprises du monde entier ont dû réévaluer leurs stratégies de sécurité informatique, investissant dans des technologies avancées et formant des spécialistes pour anticiper et réagir aux menaces numériques.
Vers un nouveau paradigme de la guerre cybernétique
L’incident Saudi Aramco a également ouvert un débat sur la nature et les règles de la guerre cybernétique. Les attaques numériques entre nations et sur organisations posent de nouveaux défis éthiques et légaux. La communauté internationale doit définir les limites acceptables dans le cyberespace, une dimension où les frontières géographiques sont rendues obsolètes par la portée et la vitesse des technologies numériques, et ou les capacités opérationnelles ou les réputations des organisations sont menacées par de nouveaux acteurs.
Bibliographie :
https://www.latribune.fr/entreprises-finance/industrie/energie-environnement/20130527trib000766725/les-majors-americaines-visees-par-des-cyber-attaques-iraniennes.html
https://www.lepoint.fr/high-tech-internet/l-arabie-saoudite-sous-le-feu-de-hackers-25-01-2017-2099955_47.php
https://fr.vectra.ai/blog/an-analysis-of-the-shamoon-2-malware-attack
https://www.lemonde.fr/economie/article/2012/08/31/energie-un-virus-informatique-frappe-des-societes-du-golfe_1754128_3234.html#
https://www.lesechos.fr/2016/08/saudi-aramco-perd-les-donnees-de-ses-pc-223233
Cyber-attaque 2012 : La Confrontation Iran-Saudi Aramco
En 2012, le monde passait une nouvelle étape dans l’ère des cyber-attaques avec l’attaque orchestrée par l’Iran contre Saudi Aramco. Cette offensive, qui a rendu inopérants 30,000 ordinateurs et forcé une des plus grosses entreprises du monde à recourir aux fax pendant plusieurs semaines, fut décrite par Leon Panetta, ancien secrétaire à la Défense des États-Unis, « comme la plus destructrice dans l’histoire d’Internet ».
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