Mercredi 12 février 2025, la Commission européenne a dévoilé les principaux axes de son programme de simplification administrative pour aider et relancer la compétitivité de ses entreprises. Véritable coup de pouce, ou n’est-ce qu’un énième coup d’épée dans l’eau ?
Une baisse de 37,5 milliards d’euros d’ici à 2029
On ne compte plus les entreprises européennes qui ont appelé Bruxelles à assouplir son cadre réglementaire, et plus généralement son mille-feuille administratif. Ces derniers, bien que justifiés par des objectifs environnementaux, n’ont eu de cesse de porter atteinte à leur compétitivité. Comme le révélait en effet Eurostat, en 2022, ces contraintes réglementaires coûtaient 150 milliards d’euros par an aux entreprises européennes.
Pour alléger cette charge, la Commission européenne a présenté, le 12 février 2025, un programme de simplification comportant trois paquets de réformes « Omnibus », visant à réduire de 25 % les obligations administratives des entreprises et de 35 % pour les PME. Qualifié de « choc de simplification », ce plan n’a pour autant que l’ambition de faire économiser 37,5 milliards d’euros aux entreprises européennes, et d’ici… 2029, soit au terme du second mandat de la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen.
Un cadre allégé pour la finance durable
Un des principaux volets du plan concerne la finance durable. Actuellement, le devoir de vigilance impose aux entreprises de plus de 1 000 salariés et réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 450 millions d’euros de surveiller leurs chaînes d’approvisionnement pour éviter toute violation des droits humains et environnementaux. Ce dispositif, inspiré d’une loi française, a été durci par la commission européenne et pèse, de facto, lourdement sur les sociétés européennes. Pour Valdis Dombrovskis, commissaire européen à l’Économie et à la Simplification, il est nécessaire d’éviter que les PME soient asphyxiées par des obligations excessives. Il précise néanmoins : « Il ne s’agit pas de déréglementer, nous nous en tenons à nos normes sociales et environnementales élevées. Nous tenterons d’atteindre ces objectifs de manière plus efficace et moins coûteuse. »
L’autre point clé du plan de l’UE concerne le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (CBAM). Cette taxe impose des surcoûts aux importateurs de produits industriels fortement émetteurs de CO₂. Bruxelles envisage désormais d’en exempter une large partie des entreprises concernées. Wopke Hoekstra, commissaire au Climat, a en effet tenu à pointer du doigt l’effet contre-productif actuel de la réglementation en vigueur : « Plus de 80 % des entreprises éligibles seraient exemptées [du CBAM], car moins de 20 % sont responsables de plus de 95 % des émissions. » Toutefois, bien qu’ambitieuse, cette réduction des contraintes environnementales ne fait pas l’unanimité. Les écologistes au Parlement européen dénoncent un recul de l’UE sur ses engagements climatiques inscrits dans le cadre du Pacte vert.
Les ETI et le secteur agricole en attente de précisions
Le deuxième axe du plan de simplification administratif européen concerne les entreprises de taille intermédiaire (ETI). Actuellement, ces structures, malgré leur taille, sont soumises aux mêmes obligations que celles des grands groupes. Bruxelles propose ainsi de mettre en place un statut spécifique afin que lesdites obligations soient réellement adaptées à leur structure et qu’elles ne freinent pas leur croissance. Le second objectif de la Commission, à travers la création de ce statut spécifique, est également de leur faciliter l’accès aux financements européens. Mais cette initiative est loin de faire l’unanimité dans son application. La France veut inclure les entreprises de 250 à 1 500 salariés avec un chiffre d’affaires maximal de 1,5 milliard d’euros. La Commission européenne, quant à elle, envisage un seuil plus bas, soit de 250 à 500 employés, ce qui en limiterait de facto grandement la portée.
D’autre part, à défaut d’avoir protégé l’agriculture européenne en signant l’accord du Mercosur, la Commission prévoit un allègement des contrôles imposés à ses agriculteurs. Bruxelles souhaite en effet instaurer un seul et unique contrôle par exploitation et par an, contre plusieurs actuellement. L’UE a par ailleurs annoncé la mise en place prochaine d’un portefeuille numérique européen, censé simplifier les démarches administratives et centraliser les documents obligatoires.
Un programme à l’ambition limitée
Si ce plan de simplification représente un premier pas, il est loin de répondre aux attentes des entreprises et des agriculteurs. Avec 37,5 milliards d’économies d’ici 2029, l’effort semble insuffisant face aux lourdeurs administratives et aux défis économiques actuels.
Les entreprises européennes, qui affrontent une concurrence internationale de plus en plus féroce, attendent des mesures plus rapides, et surtout, plus ambitieuses. Preuve en est, Valdis Dombrovskis, commissaire européen à l’Économie et à la Simplification, reconnaît lui-même que : « La réglementation est considérée par plus de 60 % des entreprises de l’UE comme un obstacle à l’investissement et 55 % des PME signalent les fardeaux réglementaires et administratifs comme leur plus grand défi. »