Nous aimerions des transitions apaisées. Ce n’est pas le cas. Les signaux faibles se multiplient pour nous alerter. Et la prospective se précipite pour éclairer nos erreurs.
La transition énergétique est symbolisée par les éoliennes et les panneaux solaires voués à disparaitre.
Ces énergies renouvelables intermittentes et insuffisantes face à l’augmentation de la demande de ces prochaines années (le tout électrique) vont être remplacées par une énergie renouvelable permanente et infinie : la géothermie. À quelques milliers de mètres sous terre (5 à 20 km), l’énergie est permanente de plusieurs centaines de degrés. Pour la capter, plusieurs techniques sont à l’étude et en test comme le gyrotron.
Comme en Chine avec des cimetières de voitures électriques neuves, mais dépassées, les cimetières d’éoliennes et de panneaux solaires vont libérer nos paysages.
La transition numérique est symbolisée par la puissance de calcul demandée par le Big Data et les dérivés de l’IA.
L’informatique quantique va bousculer la transition en cours dont l’Intelligence Artificielle est le symbole, par sa puissance de calcul surmultipliée par rapport à ce que considérons aujourd’hui comme très rapide. L’instabilité des qubits, leur « décohérence », pourrait être solutionnée d’ici peu, deux ans ou … quinze ans. Les cyberattaques pourraient devenir un mauvais souvenir par une meilleure cryptographie des systèmes.
Il restera à stocker l’information comme par exemple sur l’ADN de synthèse, encore un saut technologique dépendant de choix d’investissements, mais aussi de compétences.
Et la France découvre avec 30 ans de retard la transition commerciale.
En 14 ans après son apparition en France en 1989 (Lidl), le hard discount a pris 1 % de part de marché par an. Les hypermarchés ont mis plus de 20 ans pour diminuer leurs surfaces de vente d’au moins 14 %, pour aboutir à la déconfiture de l’enseigne Casino.
En 10 ans après son apparition en France, les ultra fast fashion (Primark, puis Shein, Temu), prennent 1 % de part de marché par an. Les enseignes de milieu de gamme s’effondrent (Pimkie, Gap, Camaïeu, DPAM, Naf Naf, …) après le soutien massif des années COVID.
Si Aristide Boucicaut a créé les grands magasins, la France a cru avoir créé le « commerce moderne » avec la « distribution » (concept franco-français) et les « hypermarchés » (concept franco-français imposé dans quelques pays latins).
Depuis une trentaine d’années, le commerce français a fait long feu hors des frontières, et aujourd’hui sur le territoire national, amplifié par la gourmandise de l’Etat et des bailleurs et par la méconnaissance du commerce par les villes. Au lancement du projet Grand Paris, (2008), le mot « commerce » était absent …nnTransition démographique : nous vivons sur des certitudes du passé proche
Difficile de faire admettre que la démographie française passe d’en berne à négative. Le signal faible lisible depuis une dizaine d’années n’est compris que lorsqu’il devient un signal fort.
Admettre que le présent immédiat n’est déjà plus le passé proche demande un effort considérable. Pourtant par ces quatre exemples – énergie, numérique, commerce, démographie – c’est une évidence : les signaux faibles clignotent, le futur est autre.
La transition peut être lente ou brutale : la transition c’est de passer d’un état à l’autre. L’important est de ne pas se laisser surprendre.
Je repars en plongée.
Philippe Cahen
Prospectiviste
Dernier livre, juin 2023 : « Le chaos de la prospective et comment s’en sortir », éd. Kawa