Votre livre met en évidence une variété de situations financières, des plus aisées aux plus démunies. Quels sont les plus grands défis économiques que vous avez observés au fil de votre carrière et comment ces défis ont-ils évolué ?
J’ai exercé ma profession à Paris et en proche banlieue. J’ai travaillé dans des quartiers très favorisés. J’ai eu à affronter des contestations plus ou moins justifiées de membres de la haute bourgeoisie, d’hommes politiques, d’artistes, de grands industriels, de journalistes, parfois dans un climat venimeux. À l’autre extrémité de l’éventail social, à la porte de la Chapelle ou à Aubervilliers, les rapports humains ont une autre teinture : pénétrer à six heures du matin dans un squat occupé par des dizaines de clandestins nécessite d’user d’une rhétorique différente. La question qui vient naturellement à l’esprit est de savoir si notre société pourra supporter encore longtemps le fossé qui se creuse.
En tant qu’huissier, vous avez une vue unique sur la santé économique des ménages. Selon votre expérience, quel impact la crise économique actuelle a-t-elle eu sur le nombre et la nature des cas que vous traitez ?
Tout au long de mon exercice professionnel, je me suis rendu chez des milliers de mes concitoyens en difficulté. J’ai vu la situation des ménages se dégrader, année après année, alors que les statistiques officielles prétendent l’inverse. Je ne sais pas expliquer cette contradiction.
Selon votre expérience, quelles mesures économiques pourraient aider à améliorer la situation des personnes que vous rencontrez dans votre travail ?
En région parisienne, notamment, mais pas seulement, le coût du logement me semble être la dépense qui a augmenté dans des proportions les plus importantes. Il grève l’équilibre économique des Français, qu’ils soient locataires ou accédants à la propriété. La fiscalité immobilière en général et la fiscalité des revenus fonciers en particulier, me paraissent très nuisibles. Elles sont en grande partie responsables de la situation qui va encore se dégrader avec l’augmentation du coût du crédit et de la construction. Il faut absolument favoriser l’investissement locatif et sécuriser le contrat de bail.