Présenté comme un budget “de responsabilité”, le texte dévoilé par Sébastien Lecornu multiplie les prélèvements sans réformes réelles. Derrière l’affichage de rigueur, l’État renoue avec la vieille recette : taxer le capital productif et retarder les économies. En ciblant les holdings patrimoniales, le gouvernement recrée un impôt sur la fortune sous une autre forme, au détriment des entrepreneurs et de l’investissement.
Un budget politique plus que budgétaire
Présenté ce mardi 14 octobre, le projet de loi de finances 2026 n’est pas un texte d’économie, mais un texte de survie politique. Sébastien Lecornu l’a conçu dans l’urgence pour éviter une censure parlementaire et maintenir un équilibre fragile entre les blocs. L’objectif affiché de déficit à 4,7 % du PIB pourrait glisser vers 5 %, signe que la rigueur est d’abord un discours. La promesse de ne pas recourir au 49.3 est saluée comme un geste démocratique, mais traduit surtout une absence de ligne claire. Le budget n’a pas de colonne vertébrale : il reprend la copie laissée par François Bayrou et y ajoute quelques ajustements pour calmer la majorité et l’opposition. Le résultat est un texte inachevé, où le gouvernement préfère concéder plutôt que décider. La France, elle, reste bloquée dans un cycle d’immobilisme budgétaire.
La taxe sur les holdings : un ISF déguisé version Zucman
La mesure phare du budget, présentée comme un symbole de “justice fiscale”, est en réalité un coup porté aux entrepreneurs. Le gouvernement introduit une taxe sur les actifs “non opérationnels” détenus dans les holdings patrimoniales. Le taux retenu, proche de 2 %, rappelle celui défendu par l’économiste Gabriel Zucman dans son projet de taxe mondiale sur les grandes fortunes. C’est, littéralement, une taxe Zucman à la française, appliquée à un public beaucoup plus large qu’il n’y paraît. Elle frapperait les patrimoines supérieurs à cinq millions d’euros, soit des entrepreneurs ayant vendu leur entreprise ou réinvesti dans le capital productif. Ces “riches” sont en réalité les acteurs de la croissance : dirigeants de PME, fondateurs de start-up, investisseurs familiaux. Or, leurs holdings ne sont pas des abris fiscaux mais des outils de réinvestissement. En taxant ces structures, l’État s’en prend au cœur de l’économie réelle. On parle d’un rendement potentiel de 1,5 milliard d’euros, dérisoire à l’échelle du déficit, mais d’un signal désastreux pour l’investissement. C’est une fiscalité de la jalousie, pas de la production. Le gouvernement veut donner des gages idéologiques à la gauche tout en prétendant ménager les entreprises : il réussit surtout à brouiller la confiance.
Aucune économie, aucun courage
Sur le volet des dépenses, le budget reste une coquille vide. Les “économies” affichées, une dizaine de milliards, reposent sur des gels : retraites, salaires, prestations sociales. Rien n’est réformé, tout est simplement suspendu. Les ministères (hors défense) verront leur budget comprimé sans que leur structure soit revue, et les collectivités locales subiront un rabot mécanique. Aucune réforme de fond, aucune remise à plat du modèle social ou de la fonction publique. Autrement dit, la France continue de dépenser sans transformer. Le pays reste prisonnier d’un État obèse, d’une fiscalité dissuasive et d’une dette qui enfle. Ce budget n’a ni souffle ni vision. Lecornu a eu peu de temps pour le préparer, certes, mais il s’inscrit dans la continuité de gouvernements qui préfèrent la politique à l’économie. En réalité, ce texte n’est qu’un instrument pour tenir quelques mois, éviter une motion de censure et donner l’illusion de la maîtrise. Pendant ce temps, les entrepreneurs, eux, paient la facture.
Le budget 2026 manque de tout : de réformes, de clarté et surtout de courage. Il ne traite ni la dépense, ni la dette, ni la compétitivité. Il taxe plus ceux qui produisent, et ne réforme rien de ce qui coûte. Un budget de convenance politique, construit dans l’urgence, qui condamne encore la France à l’immobilisme fiscal et à la fuite du capital productif.


