Un plan en deux temps pour réformer les cotisations patronales
Astrid Panosyan-Bouvet, récemment nommée ministre du Travail, a présenté les grandes lignes du projet gouvernemental visant à modifier les allègements de cotisations patronales, lors d’une réunion avec les partenaires sociaux. L’objectif affiché est ambitieux : récupérer 5 milliards d’euros par an sur trois ans. Cette somme serait réinjectée dans le budget de la Sécurité sociale, en accord avec les recommandations du récent rapport des économistes Antoine Bozio et Étienne Wasmer.
Le dispositif actuel d’allègements de cotisations, particulièrement concentré autour du Smic, sera revu pour réduire les effets de seuil qui augmentent le coût pour les employeurs lorsque les salaires progressent. La ministre a évoqué un plan en deux phases, en 2025 et 2026, pour relever les cotisations au niveau du salaire minimum. Cette stratégie progressive permettrait d’atténuer l’impact financier pour les entreprises.
Le projet a suscité des réactions parmi les représentants syndicaux présents lors de la réunion. Selon Pierre Jardon, représentant de la CFTC au Haut Conseil des rémunérations (HCREP), « la ministre envisage une réduction des exonérations de cotisations patronales au niveau du Smic et une modification de la pente des allègements sur deux ans ». Ces exonérations, aujourd’hui valables jusqu’à 3,5 Smic, pourraient être limitées à 3 Smic à l’avenir. Le ministère du Travail n’a pas encore donné de détails supplémentaires sur cette réforme, mais a confirmé les grandes orientations du projet.
Vers une répartition plus équitable des allègements
L’augmentation significative du nombre de salariés rémunérés au Smic en France justifie en partie cette réforme. En effet, au 1er janvier 2023, 17,3 % des salariés français étaient payés au Smic, un chiffre en forte hausse ces dernières années. Ce contexte économique complexifie les augmentations de salaires pour cette catégorie de travailleurs, en raison des coûts élevés pour les employeurs.
Le rapport Bozio-Wasmer souligne que pour une personne seule sans enfant au Smic, une augmentation de revenu disponible de 100 euros par mois entraîne un surcoût de 483 euros pour l’employeur. Cette réalité, couplée aux effets de seuil, freine les entreprises dans leur volonté d’améliorer les conditions salariales de leurs employés.
Astrid Panosyan-Bouvet souhaite donc aller vite, en intégrant les conclusions du rapport dans le projet de budget de la Sécurité sociale pour 2025, qui sera présenté très prochainement. Ces changements devraient être discutés dans les semaines à venir, alors que les syndicats et les représentants du patronat scrutent de près les ajustements proposés.
La révision des allègements de cotisations est un sujet délicat, car elle touche directement à l’équilibre économique des entreprises et au pouvoir d’achat des salariés. Pour les économistes du rapport, la répartition actuelle, concentrée autour des bas salaires, pourrait être mieux équilibrée pour faciliter les augmentations salariales. Cependant, toute modification des allègements doit être accompagnée d’une attention particulière aux impacts qu’elle pourrait avoir sur l’emploi et sur la compétitivité des entreprises.