Journal de l'économie

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COVID 19 ; le monde d’après ou une simple parenthèse ?





Le 11 Janvier 2021, par Guillaume Vétillard

Difficile de prédire à quelle vitesse l’économie récupérera de la pandémie même si tout laisse penser que la présidence Biden prolongera voire accentuera le soutien de l’économie américaine avec des politiques monétaires ultras accommodantes et des plans de relance massifs.


Intensification de l’hélicoptère money, c’est-à-dire d’argent distribué sans contrepartie réelle.
 
L’administration Trump a adressé directement des chèques à tous les Américains en dessous d’un certain seuil de revenu pour soutenir la consommation.
Biden ne fera pas moins et les bourses américaines l’ont bien compris en renouant avec des niveaux historiques, au-dessus de leur niveau d’avant pandémie ; l’action Tesla a pris 300 % en 2020, le Nasdaq 40 %.
 
Moins il y a d’activité dans le monde réel, plus la valeur des actifs monte.
 
Les conséquences de ces mesures non conventionnelles et inédites sont imprévisibles.
La BCE a emboité le pas de la FED en décidant de prolonger tous les systèmes d’aide en place. Son Conseil des gouverneurs a augmenté de 500 milliards d’euros à 1,850 milliard l’enveloppe du programme d’achats d’urgence face à la pandémie.
La BCE détiendra près de la moitié des obligations souveraines allemandes à la fin de la pandémie.
 
On peut logiquement anticiper un rebond cyclique de la consommation dans la mesure où le pouvoir d’achat des ménages a été préservé, parfois même augmenté par les confinements. Les Français (ceux qui pouvaient) ont épargné de manière massive.
 
L’économie européenne bénéficie à plein de ces largesses ; la valorisation de son secteur immobilier est totalement corrélée aux taux bas et à la perspective qu’ils durent. Mieux encore, la prime de risque du secteur est encore importante et peut clairement permettre d’amortir le trou d’air.
Les expertises annuelles COVID ne sont pas encore sorties et les premières ne feront vraisemblablement que soustraire une prime théorique aux valorisations antérieures dans la mesure où les effets de la pandémie ne seront pas encore pleinement matérialisés dans les comptes et les transactions .
 
Nul doute qu’il y aura de fortes disparités entre les secteurs, entre les types d’actifs, mais cela découlera moins du COVID que de l’accélération des mutations déjà initiées avant la pandémie.
 
Les valorisations de nombreux actifs commerciaux vont baisser, non pas du fait de la pandémie, mais de l’effondrement du sous-jacent locatif ; les commerces, les hôtels obsolètes non transformables, les zones de bureaux de troisièmes couronnes ; ces phénomènes vont peser globalement, mais inégalement sur les loyers. Quand la demande diminue, les actifs obsolètes se vident tandis que les plus en pointe continuent de progresser.
 
Pas de moratoire sur les loyers pour le moment, mais des négociations individuelles qui pèsent sur les rendements 2020 et qui pèseront sans aucun doute sur ceux de 2021.
 
Pas de monde d’après en perspective (les banques centrales sont à la manœuvre), mais une parenthèse violente qui a tout accéléré.
 
L’obsolescence des vieux concepts et l’effondrement des modèles économiques en fin de vie, la transformation des modes de consommation et de travail et les hiérarchies mondiales.
 
En France, tout se jouera lorsque les entreprises devront renégocier leur dette.
 
On peut logiquement anticiper que les banques ne pourront pas abonder directement sauf à déroger à leurs règles prudentielles et que des mesures non conventionnelles seront à nouveau mises en œuvre ; on peut spéculer que ces dettes seront reconduites à l’infini sur la base de taux dits accommodants. Autant dire qu’elles pourraient être indolores.
 
 On retiendra de cette période, un état protecteur, mais avait-il le choix ? On retiendra également une grande inégalité de traitement entre les indépendants et les salariés, entre les grandes entreprises et les TPE ; mais là encore pouvait-il faire autrement ?
 
Dans la mesure où la rentabilité de ces investissements se mesure sur le long terme, il est assez logique d’imaginer que les conséquences de cette crise seront totalement gommées sur une détention de 10 à 15 ans. D’autant que cette crise a très vraisemblablement permis le maintien de taux d’intérêt très bas au-delà du calendrier envisagé et a amené les banques centrales à injecter des centaines de milliards dans les économies qui ont contribué à maintenir voir à augmenter la valeur des actifs.
 
Cela ne présage pour autant pas de la suite, car le COVID n’était pas le seul risque, tant s’en faut, qui pesait sur les grands équilibres économiques. Les disparités entre les bénéficiaires de ces mesures accommodantes et ceux qui n’en bénéficient pas augmentent dans des proportions qui ne seront plus tenables d’autant qu’à la pauvreté créée par les inégalités de la financiarisation se cumule la pauvreté importée et ce cocktail est explosif.
 
La plupart des modèles économiques étaient à bout de souffle et créaient des rendements déconnectés de la croissance réelle, mais les banques centrales avaient pris la main depuis 2009 avec la crise des supprimes ; elles n’ont fait que passer la seconde avec le COVID.
 
Pourra-t-on créer indéfiniment de la valeur sans croissance en démultipliant le levier d’une dette de plus en plus difficile à rembourser. Les effets salvateurs de la compression des taux et de l’injection massive de liquidités finiront inévitablement par s’estomper, car ces politiques sont des politiques de crise. 
En 2009 on décrivait ces injections de liquidités comme un fusil à un coup que l’on ne pourrait réarmer ; on peut faire le constat que les coups peuvent se répéter ; mais jusqu’où et avec quelles conséquences ? Grâce à ces mesures de protection, les Européens comme les Américains vont conserver leurs économies et leur patrimoine, mais leur valeur réelle se dépréciera à due proportion avec le temps. Ce sont les possédants qui ont capté la manne de la FED et de la BCE, à proportion de leur richesse, les autres n’ont vu que les ruissellements.
 
Peut-être devra-t-on renouer avec le monde d’avant, celui où la création de valeur était plus ou moins le reflet de la croissance créée.
 
On reproche, à juste titre, au monde politique d’occulter le réel, mais le monde économique lui a largement emboité le pas.
 
L’important n’est plus ce que l’on voit, mais ce qu’il faut faire voir.
 
Guillaume Vétillard
Of Counsel Real Estate Director
ANSLAW AVOCATS AREIMA


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