Journal de l'économie

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Dieu est mon droit ? Non justement !





Le 9 Octobre 2019

Il est dommage que des événements dramatiques à la Préfecture de Police de Paris semblent donner raison aux vitupérations d’Eric Zemmour et fassent passer Christophe Castaner pour le Lucky Luke de la déclaration, tirée plus vite que son ombre alors que le politique n’est pas un technicien de terrain.


Dieu est mon droit ? Non justement !
La religion est une question de foi mais leur multiplicité sur Terre montre qu’elle est aussi une question culturelle fruit de la société et de l’histoire du lieu ou du peuple qui l’a vu naitre. Une anecdote à méditer, quand les Juifs sont arrivés en Inde un souverain local a regardé avec méfiance cette communauté qui lui était étrangère en tout, pour le rassurer, le rabbin a fait apporter une vasque pleine de lait à ras bord y a jeté une poignée de sel, sans la faire déborder, pour témoigner du poids de sa communauté et du fait que son intégration ne troublera pas les équilibres de la société les accueillant.

Cette histoire amène à rappeler deux évidences. Aucune religion, au-delà de l’énoncé de ses principes moraux ou philosophiques, n’a vocation à être la règle de droit de nos vies quotidiennes. Certaines religions ne sont pas naturellement solubles dans les sociétés qui ne les ont pas vu naitre à peine de déséquilibrer leurs fondements.

En France, cette double réalité s’est vu apporter une réponse au travers de la laïcité. Cette dernière n’est pas ontologiquement parlant un obstacle à l’exercice de la religion, bien au contraire, elle est le cadre qui permet une liberté d’exercice de sa religion dans un cadre privé ou publique (cérémonies, fêtes, jours fériés…). Dans ce contexte toute interférence entre l’exercice d’une religion et la vie en société telle que nous la concevons doit être immédiatement corrigée et ce dès l’apparition de ce que l’on pourrait qualifier de signaux faibles.

Le fait religieux en entreprises – privées ou publiques – revient sur le devant de la scène et doit interpeller. Laissons aux politiques les réactions opportunistes oublieux qu’un geste fou ou prémédité n’a jamais été empêché par une loi. Demandons-leur plutôt de prendre leurs responsabilités en tant que législateur et d’adapter nos textes et codes à une pression religieuse qui n’est pas une simple poignée de sel. Quand une religion vise à imposer ses dogmes comme règles de la vie en société il convient soit de se soumettre – merci Houellebecq de l’avoir si bien décrit dans la première partie de « Soumission » – soit de l’empêcher en posant des règles de vie en communauté qui ne peuvent être transgressées y compris au nom de sa foi.

Sans reprendre les 12 questions que Napoléon posa en vue de créer le Consistoire et d’organiser, certes à sa main mais 200 ans plus tard c’est encore en place, la pratique de la religion juive on peut penser que quelques questions devraient être posées au culte musulman pour que l’assimilation (et non l’intégration) de cette pratique dans la société française soit possible. Certaines de ces questions, sept sur douze, excusez du peu, sont toujours pertinentes dans leur transposition :
 
  • Quelle juridiction de police exercent les religieux ? Quelle police judiciaire exercent-ils parmi eux ?
  • Ces formes d'élection, cette juridiction de police et judiciaire sont-elles voulues par leurs lois, ou seulement consacrées par l'usage ?
  • Une musulmane peut-elle se marier avec un Chrétien, et une Chrétienne avec un Musulman ? ou la loi veut-elle que les Musulmans ne se marient qu'entre eux ?
  • Aux yeux des Musulmans les Français sont-ils leurs frères ou sont-ils des étrangers ?
  • Dans l’un et l’autre cas quels sont les rapports que leur loi leur prescrit avec les Français qui ne sont pas de leur religion ?
  • Les Musulmans nés en France et traités par la loi comme citoyens français regardent-ils la France comme leur patrie ? Ont-ils l'obligation de la défendre ? Sont-ils obligés d'obéir aux lois et de suivre toutes les dispositions du Code civil ?
  • Qui nomme les Imams ?
Ces questions, leurs réponses actuelles et celles qui devraient être dans le futur, posent la problématique de l’intégration/assimilation d’une religion dans un espace démocratique et républicain qui n’a pas été conçu pour elle. Qui plus est d’une religion qui ontologiquement vise à imposer un mode de vie (la Charia) à ses pratiquants ou à ceux qui la subissent.

Napoléon avait eu l’autorité pour les poser et y apporter, en creux, les réponses qu’il attendait.
Aujourd’hui qui les posera ? Assurément pas ceux qui font de la discrimination et de l’exclusion le lit de leur programme. Ni ceux qui, oublieux des leçons de l’Histoire, font de la tolérance sans contrôle, au nom d’une conception permissive de la démocratie, un mode d’(in)action qui créait des abîmes juridiques dans lesquels s’engouffrent ceux qui veulent saper les fondements de notre pacte social et y instaurer le leur.

Le droit et le politiquement correct qui interdirait d’appeler un chat un chat sont deux notions différentes.
Le discours prononcé par Emmanuel Macron ce 8 octobre en hommage aux quatre fonctionnaires de la DRPP assassinés par leur collègue, tendrait à montrer qu’une prise de conscience politique est peut-être en cours. Elle ne pourra pas rester au stade de la déclaration et devra se traduire dans notre droit pour que le concept de tolérance zéro soit aussi à l’égard de ceux qui, par leurs propos, attitudes ou actions mettent en péril la devise de la République.

L’observation et la communication de signaux faibles ou forts de comportements radicalisés ou en voie de l’être ne doivent pas être freinées, mais rendues possibles et analysées. Ce droit n’existe pas encore, il est à créer avec à l’esprit le vrai sens du mot laïcité. Le modèle de ce qui a été mis en place pour les lanceurs d’alerte devrait être inspirant et permettre de penser que sa transposition pour des lanceurs d’alerte « radicalisme religieux » est possible.
 
 

Nicolas Lerègle 
Avocat à la Cour – Lex Squared 
Conférencier en sécurité économique labélisé Euclès
 


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