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Frédéric Verdavaine (Nexity) : « Nous sommes au croisement de nombreux enjeux de société structurants pour l’avenir »





Le 30 Septembre 2019, par Jean-François Moreau

Directeur général délégué de Nexity, plateforme de services immobiliers, Frédéric Verdavaine pilote la branche dédiée aux services aux particuliers. Des activités qui occupent une place croissante et qui constituent, selon le dirigeant, un des principaux leviers de création de valeur du secteur dans les prochaines années.


Quels sont les nouveaux usages observés chez vos clients ? Comment Nexity adapte-t-elle ses services pour y répondre ?
 
On observe beaucoup d’évolutions dans les usages des clients. Les plateformes comme Seloger et de plus en plus BienIci deviennent incontournables en permettant d’avoir accès à une offre très large en un minimum de temps. Plus de 90 % de nos clients vont sur ce type de site puis en agence pour concrétiser le projet.
 
Ces plateformes sont des outils au sens large. Elles permettent de développer des sites immersifs ou encore de visualiser les quartiers et les logements en 3D (BienIci). Elles offrent ainsi la possibilité au client de se concentrer avec l’aide du conseiller immobilier sur les problématiques à forte valeur ajoutée (arbitrage entre neuf et ancien, financement, optimisation fiscale…). Nous avons d’un côté une société de plus en plus virtuelle grâce à des outils digitaux et de l’autre, une volonté de créer du lien, au travers d’une véritable relation humaine. Nous observons exactement le même paradigme dans l’engouement pour le co-working et le co-living.  
 
Dans cet esprit, nous avons conçu Eugenie pour chaque logement neuf que nous livrons. Cette application comprend des solutions domotiques - on peut, par exemple, piloter le chauffage avec son smartphone - mais répond aussi au désir de communauté : connaître ce qui se passe dans l’immeuble, en étant en contact avec les autres résidents, pouvoir échanger des services, tout en étant ancré dans la ville et en restant informé des actualités du quartier. Nous échangeons aussi avec des associations qui proposent d’intervenir auprès des habitants.
 
Même si on vit dans un monde qui est assez individualiste, il y a une envie de collectif. C’est très vrai pour les étudiants par exemple. Notre objectif est de leur apporter des solutions qui répondent à leurs besoins. Ils attendent de la flexibilité, de la rapidité, de la dématérialisation - pouvoir interagir, 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 - mais aussi de véritables relations humaines, entre eux et avec l’équipe d’animation de la résidence.
Nous cherchons à dématérialiser tout ce qui relève de l’administratif pour faciliter la vie des gens. L’enjeu est de savoir se montrer très réactifs pour réussir et simplifier l’expérience et le parcours client. Pour autant, nous ne négligeons pas du tout la relation humaine, qui apporte de la confiance et génère du lien social.
 
Revenons sur la résidence étudiants. Nous nous sommes aperçus que cette population est en demande de parties collectives plus grandes que les parties privatives. Les parties privatives peuvent faire 16, 17 ou 18 m2, comprendre un lit et un espace pour travailler. Pour autant, ils préfèrent travailler entre eux, pouvoir échanger et discuter. Autre expérience très concrète, le cas de la blanchisserie. Nous nous sommes, au fil de nos expériences, aperçus que celle-ci était devenue un lieu d’échange. Nous la pensons désormais comme tel en la localisant non plus au sous-sol mais au RDC : elle devient ainsi un véritable lieu de vie.
 
Nous avons longuement travaillé le concept de résidence en faisant en sorte que les parties collectives soient importantes mais aussi et surtout, qu’elles répondent aux usages. Les gens cherchent, de plus en plus, à vivre ensemble. Enfin, nos clients souhaitent aussi avoir voix au chapitre. Nous les associons très fréquemment à l’élaboration de nos offres.
 
Comment avez-vous intégré le digital et la technologie pour améliorer la qualité de service, au-delà de la co-construction ?
 
Nous avons un cahier des charges dans nos logements, dans nos immeubles, dans nos résidences. Nous avons plusieurs façons d’intégrer le digital. Nous avons notamment créé un incubateur interne. Il nous sert à développer notre écosystème et à intégrer les acteurs les plus innovants et pertinents au sein de nos projets. Par exemple, nous avons incubé une startup qui travaille sur la question de l'arbitrage. En parallèle, nous avons développé des liens puissants avec des fonds spécialisés.
 
Le digital est un vecteur de dématérialisation et de simplification. Par exemple, en France, on ne répond pas assez à la problématique des étudiants internationaux. D'ici 2025, on va avoir une forte augmentation du flux d'étudiants internationaux, notamment de culture asiatique. Quand vous êtes un parent et que votre enfant fait ses études loin de chez vous, vous souhaitez que les choses soient simples. Là encore, la dématérialisation est un atout. Pour nos résidences étudiants, le digital est donc pour nous un facteur de développement international. Le digital nous permet d’entrer en contact avec différents écosystèmes, de développer des synergies positives avec l’ensemble des acteurs.
 
Les startups apportent de l’agilité. Comment arrivez-vous à en tirer le maximum de bénéfices ?
 
Nous avons la chance de pouvoir nous appuyer sur une direction de l’innovation et des nouveaux métiers très compétente, qui compte des profils parfaitement acculturés à l’écosystème des startups. Notre objectif est de développer des business models et des business plan solides. Si une idée peut sembler belle et innovante, la mise en œuvre opérationnelle demeure parfois délicate. À la créativité et à l’innovation, nous apportons de la formalisation, de la rigueur, au travers de méthodes de travail précises qui permettent de faire de l’idée initiale une réussite opérationnelle. C’est un challenge vital pour un grand groupe comme le nôtre. Et nous y faisons face très volontiers.  
 
Comment avez-vous intégré la technologie dans votre organisation interne ?
 
On entend souvent parler d'expérience client augmentée, rarement d'expérience collaborateur enrichie. Trop d’organisations laissent prospérer ce décalage entre l’exigence d’innovation et d’optimisation de l’expérience client et celle qui est proposée aux collaborateurs. Aujourd’hui, l’ensemble des parties prenantes attend de la transparence. Et le premier ambassadeur de l’entreprise, c’est le collaborateur, celui qui vit le quotidien de celle-ci.

Quand on parle de digitalisation, nous évoquons en réalité deux dimensions. D’abord, la dimension administrative, à faible valeur ajoutée, chronophage pour nos collaborateurs sans être perçue par le client. La technologie doit permettre de réduire un maximum cette dimension pour redéployer du temps sur des activités à haute valeur ajoutée et redonner de la disponibilité pour le temps pour le contact client. En d’autres termes, le quotidien de nos collaborateurs s’enrichit, ses activités sont plus valorisantes car reconnues par le client
Mais la technologie, c’est aussi une manière de solidifier et, à terme, de proposer l’offre la plus parfaite possible et d’obtenir de meilleurs résultats.

En tant qu’employeur, nous souhaitons intégrer des collaborateurs capables d’embrasser la technologie, la modernité, d’attirer des talents différents. Par exemple, nous avons développé un outil qui permet de flécher des demandes clients précises aux collaborateurs spécialisés sur la thématique en question, ce qui rend les process plus rapides et fluides. Nous avons beaucoup de solutions de ce type, sur des sujets aussi vastes que la traçabilité ou la satisfaction client. La digitalisation et la technologie sont autant bénéfiques pour notre client interne (le collaborateur) que pour notre client externe.
 
Pourriez-vous dégager quelques grandes tendances structurantes sur les prochaines décennies dans vos métiers ?  
 
La première tendance majeure, c’est l’idée très prégnante de communauté. Aujourd’hui, nous sommes dans l’époque du « co ». Dans nos métiers, cela se traduit par le co-living ou le co-working. Cela implique de repenser le concept de résidence et d’une façon générale du vivre ensemble en proposant des services à forte valeur ajoutée.

Le deuxième élément est que l’on arrive, de mieux en mieux, à saisir le meilleur des deux mondes, le digital et le physique. Les deux expériences doivent se marier. Penser que le client souhaite uniquement du digital est faux, il aspire aussi à une relation physique et humaine de proximité.

Autre sujet de fond, les données, qui demeurent un enjeu majeur et un vrai sujet de société. Nous travaillons avec l’Institut Montaigne à la compréhension de l’impact des datas sur la ville de demain.  Une ville intelligente, c’est une ville capable de traiter des quantités considérables d’informations. Par exemple, à Singapour, nous sommes déjà capables de réguler le flux des feux rouges en fonction de l’intensité de la circulation et, dans une large mesure, de réduire la congestion. Et ces exemples se multiplient ! La Smart City, c’est aussi l’utilisation des données au service du vivre ensemble.

Enfin, tout particulièrement dans nos métiers, la responsabilité sociétale de l’entreprise est au cœur des préoccupations du comité exécutif de Nexity. Pour nos métiers de service, ce sont la rénovation et l’efficacité énergétique des bâtiments, la pollution intérieure dans les logements, la logistique du dernier kilomètre en recourant toujours davantage aux mobilités douces. Mais aussi la capacité à proposer une ville avec moins de voitures, en songeant à réutiliser les parkings, par exemple. Notre activité s’inscrivant au cœur de la vie quotidienne des populations, nous sommes au croisement de nombreux enjeux de société structurants pour l’avenir. C’est un challenge passionnant.
 
 



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