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Le gigantisme en construction navale a-t-il une limite ?





Le 3 Octobre 2013, par

Le 2 juillet 2013, les chantiers navals Sud-Coréens Daewoo Shipbuilding & Marine Engineering (DSME) ont livré à la compagnie maritime danoise Mærsk Line le Mærsk Mc-Kinney Møller, premier porte-container de la classe Triple E, qui comptera à terme 20 unités. C’est le plus grand navire en service au monde.


Le Mærsk Mc-Kinney Møllerla de la compagnie maritime danoise Mærsk Line (crédit Wikimedia.org)
Le Mærsk Mc-Kinney Møllerla de la compagnie maritime danoise Mærsk Line (crédit Wikimedia.org)
Ce n’est pas le plus grand navire de l’histoire maritime, ni le plus lourd : en 2009, les chantiers de démolition d’Alang en Inde ont reçu le Seawise Giant pour son dernier voyage. Ce pétrolier appartenait à la catégorie des Supertankers ULCC, pour Ultra Large Crude Carrier. Après agrandissement, aussi appelée « Jumboïsation », ce monstre marin atteignait près de 460 mètres de long pour environ 70 mètres de large. A pleine charge, il déplaçait 650 000 tonnes avec un tirant d’eau de plus de 24 mètres, ce qui rendait impossible son accès aux canaux transcontinentaux (Suez et Panama) mais aussi … à la Manche.

Depuis la destruction du plus grand engin motorisé jamais construit par l’homme, le Mærsk Mc-Kinney Møller, du nom d’un ancien directeur de la Compagnie Mærsk Line, est devenu avec ses 399 mètres de long le plus grand navire en service, dépassant en longueur et en capacités les porte-containers de classe Marco Polo de CMA-CGM. Il peut transporter jusqu’à 18270 containers EVP (équivalent vingt pieds, soit dans notre système métrique, 6.01 mètres de long pour 2.44 de large,  2.59 de haut et un volume de 19.3 m3). En théorie, les navires de classe Triple E peuvent donc emporter à chaque voyage plus de 352 000 m3 de marchandises. Cette capacité de transport inédite permet de drastiquement réduire la facture énergétique par container acheminé, et de réduire de 50% l’empreinte carbone globale par rapport à la moyenne des autres navires. Selon le site Mer et Marine, ces bâtiments doivent d’ailleurs leur nom de classe Triple-E au triptyque Efficience énergétique, Economies d’échelle et Environnement.

Le coût unitaire de ces bâtiments est assez faible comparativement à leur taille : 185 millions de dollars l’unité, soit un prix inférieur à celui d’un seul Boeing 787 (environ 190 millions de dollars). Mais ces bâtiments ont en général un coût d’usage élevé, compte tenu des frais de carburant. A titre d’illustration, sur les bâtiments de classe Emma Mærsk, l’unique moteur Wärtsilä/Sulzer 14RT-flex96C à 14 cylindres consomme 3.4 litres de fioul lourd à la seconde. Néanmoins il faut ajouter que ce moteur pèse à lui seul 2300 tonnes. Le Mærsk Mc-Kinney Møller présente l’originalité de disposer de deux moteurs et de deux lignes d’arbres indépendantes, contrairement à la majorité de ses congénères. Moins puissant que ses collègues Emma Mærsk, 59360 kW contre 88000 kW, il lui faudra environ 20 jours à 23 nœuds pour relier Hong-Kong à Algésiras, premier port desservi en Europe. Quatre autres sister-ships devraient être livrés cette année à la compagnie danoise, les quinze autres devant être construits et livrés avant 2015.

Plus de 80% du commerce mondiale s’effectue par voie maritime. En attendant l’hypothétique ouverture au niveau du pôle Nord d’une voie navigable toute l’année, l’axe Europe-Canal de Suez-Inde-Chine devrait rester l’une des routes commerciales les plus fréquentées du monde, avec des besoins sans cesse croissants en termes de capacités de transport. L’Europe, qui ne dispose pas de beaucoup de nouveaux projets de ports en eaux profondes, devra faire l’effort d’adapter ses infrastructures existantes pour ne pas se priver des bénéfices de l’utilisation de ces géants des mers.


Grégoire Moreau
Journaliste et blogueur, je me suis fait avec le temps une spécialité des questions techniques et... En savoir plus sur cet auteur


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