Journal de l'économie

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Le grand choix





Le 8 Février 2022, par Bernard Landais

Consommation ou investissement ? Voilà la question un milliard pour les économistes ! Bernard Landais, Professeur émérite de Sciences économiques à l’Université solve ce grand choix dans son dernier livre « Réagir au déclin ; Une économie politique pour la Droite française » chez VA Éditions. Dans cet ouvrage, il nous dévoile une nouvelle approche macroéconomique pour la croissance de la France.


Pour les économistes, le choix fondamental est : « Consommation ou Investissement ? » Les sociétés évoluent différemment selon qu’elles donnent la priorité à l’un ou à l’autre. C’est l’un des enjeux de ce scrutin présidentiel.

Ecartons d’abord  l’idée simpliste selon laquelle il y aurait un autre but à l’activité économique que la consommation. Toute société économique est une société de consommation ! Le développement et la croissance sont des phénomènes naturellement tournés vers plus de consommation. Personne n’échappe à cette logique ; un moine ou un philosophe qui lit un livre pose un acte de consommation ! Donc, nous n’avons pas à mépriser la consommation et le désir qu’elle suscite normalement. On peut même dire qu’elle apporte le plus d’utilité marginale aux plus pauvres et à ce titre qu’elle mérite un authentique respect moral.

La question doit donc se poser différemment. A un moment donné du temps quelle part (C) de nos ressources consacrons-nous à la satisfaction immédiate de nos besoins et quelle part (I) destinons-nous à satisfaire les besoins de consommation future ? C’est l’unique clé du taux de croissance du PIB à long terme.

Pour le passé, la question est déjà réglée et chacun admettra que notre consommation et le développement économique contemporain ont été préparés par les investissements matériels et culturels des générations passées, nos parents, les parents de nos parents...

Pour le futur, les questions sont d’abord celles de la responsabilité des générations présentes vis-à-vis des générations qui suivront. Leur laisserons-nous assez de capital et de cultures diverses pour leur faire gagner de bons salaires et une bonne consommation ? Aurons nous vraiment ce souci avec assez de liens de solidarité nationale ou familiale ? Mais heureusement, ne serons-nous pas nous-mêmes en mesure de profiter dans un futur plus proche de nos efforts d’investissement actuels ?

Dans ce contexte, le pays recroquevillé sur sa consommation du moment privilégie le présent, renie l’apport du passé et se fiche du futur. Par exemple, la France est devenue un pays sans espérance, celui qui joue la défense et préfère ne pas encaisser de buts ; c’est le camp des moindres risques. C’est le monde des « après moi le déluge ! », des Bobos ou de « l’ici et maintenant !» du père François. C’est la France qui commence avec Giscard et qui finit après Macron, celle de l’égalitarisme, de l’assistanat, celle du « pain et des jeux » et d’une spéculation stérile sur actifs existants ; celle qui ne se souvient de rien, ne prépare rien ; celle qui pense l’avenir comme un avatar du présent, vers une société mondiale dirigée d’ailleurs.

Cette priorité donnée à l’immédiat a été aussi, chez les baby-boomers, la conséquence de leurs erreurs et illusions. Premièrement, ils ont d’emblée sous-estimé l’effort considérable consenti par les générations qui les ont précédés ; c’est le sens de mai 1968, un sommet de l’ingratitude. Deuxièmement, les économistes de l’époque disaient que le progrès technique est une variable exogène, garantissant ad vitam aeternam une progression du niveau de vie, le tout sans effort identifiable. Troisièmement, ils ont cru que l’intégration européenne leur donnait gratuitement la clé du progrès, même après les années 1970. Désormais, à mesure que l’on constate que toute croissance exige des actions fortes, la donne a profondément changé.

Le choix de la consommation immédiate est en gros celui de la Gauche et des progressistes. Depuis 1975, il accompagne notre déclin et l’amplifie dans une sorte de cercle vicieux. Les Français qui voient fondre leurs salaires réels demandent à l’Etat des compensations dans un « quoi qu’il en coûte » suicidaire.

Choisir l’investissement implique déjà que les efforts des générations passées sont reconnus : le capital des entreprises, les équipements et la science accumulés mais encore toutes les cultures intellectuelles et morales qui contribuent à notre prospérité relative et à notre bonheur quotidien. Mais pour autant,  reconnaître l’apport du passé n’est pas une marque de passéisme car c’est aussi implicitement accepter la mission pour un meilleur futur.

Le déclin français ne peut s’interrompre qu’en portant les ressources du pays vers les investissements. C’est ce qu’en son temps on a appelé l’Economie de l’Offre. Les responsables de l’économie française l’ont mise en œuvre dès les années 1960, avant même que le concept soit défini aux Etats Unis et en Grande-Bretagne, avec deux points forts : la libéralisation du commerce en Europe et la politique énergétique et de puissance.

Mettre en œuvre les réformes qui orientent les moyens vers le succès économique futur c’est réaliser l’Economie de l’Offre pour notre temps. Elles impliquent toutes mesures d’incitation  induisant une progression vive des facteurs de production, capital physique et niveau scientifique en tête. Mais parce que nous comprenons mieux que la puissance, les cultures humaines et les mentalités ont un rôle décisif à jouer dans ce projet, la politique doit se généraliser à tous les investissements immatériels et à leur transmission. Elle englobe aussi le champ des autonomies personnelles et de la liberté sans lesquelles les Français n’ont aucune incitation forte à investir et transmettre, y compris pour ce qui concerne la natalité. Le résultat bénéfique à attendre d’une politique de l’offre élargie est la montée progressive de la productivité et en corollaire celle des salaires réels à long terme.

Parce que l’Etat s’est accaparé une place énorme depuis le début du siècle dernier, notre société française n’est plus en mesure de réagir spontanément au déséquilibre entre la consommation et l’investissement, sans faire appel à un puissant élan politique. Va-t-il se concrétiser en 2022 ?  Telle est la question !

L’option de l’investissement ne peut être que celle de la Droite, gardienne des valeurs nationales et attachée à la liberté personnelle. La plupart des réformes structurelles dont le pays a besoin sont en rapport avec le choix d’investir et en accord avec son orientation vers plus de liberté et d’esprit national.



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