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Le nouveau parquet européen, pour la défense des intérêts de l'UE ?





Le 23 Février 2021, par Olivier de Maison Rouge

Le parquet européen a été récemment institué sur le fondement de l’article 86 du TFUE, « pour combattre les infractions portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union », à savoir la lutte contre les fraudes financières et budgétaires : TVA, corruption, blanchiment de capitaux, etc. Il est issu du règlement (UE) 2017/1939 du Conseil du 12 octobre 2017.


Le nouveau parquet européen, pour la défense des intérêts de l'UE ?
En 2011, l’UE estimait que « du fait des différences entre les cadres juridiques des États membres et des entraves aux enquêtes transfrontalières qui en résultent, les intérêts financiers européens ne sont pas protégés de manière uniforme dans l’ensemble de l’Union ». C’est dans cet esprit que le Parquet européen a été érigé, sur la base d’un mécanisme de coopération renforcée.
 
Sans être l’équivalent du Department of Justice (DOJ) rencontré dans les affaires BNP PARIBAS, ALSTOM, SIEMENS, CREDIT AGRICOLE etc., il n’en demeure pas moins que l’Union européenne a fait le choix manifestement de se doter d’une structure judiciaire de poursuite pénale dirigée contre les fraudes financières. Ses missions : enquêter et engager des poursuites pour toutes infractions portant atteinte au budget de l’UE (escroqueries à la TVA, détournement de fonds publics, etc.). Sur ce fondement, pour avoir truqué les comptes de la Grèce afin d’accéder à l’Euro monétaire, la banque Goldman Sachs – qui a donné tant de dirigeants des institutions européennes – aurait pu être poursuivie.
 
Il faudra également compter à l’avenir sur le projet de Règlement UE e-évidence, destiné à harmoniser une procédure électronique européenne (recueil et communication de preuves, injonctions de communiquer intracommunautaires, conservation électronique centralisée, etc.) destinée également à faire échec aux procédures extraterritoriales telles que celle instituée par le Cloud Act US de 208 (cf. rapport du député Gauvain de juin 2019 sur la souveraineté économique).
 
Un organe européen indépendant compétent en matière pénale
 
Structure indépendante, cette instance européenne est dotée de la personnalité juridique et dispose de compétences judiciaires propres en matière pénale à l’échelon européen.
 
Institué en novembre 2020, le Parquet européen siège auprès de la CJUE et de la Cour des comptes de l’UE, installées à Luxembourg.
 
Il rassemble 22 états (Allemagne, Autriche, Belgique, Bulgarie, Croatie, Chypre, Espagne, Estonie, Finlande, France, Grèce, Italie, Lettonie, etc., à l’exclusion de la Hongrie, du Danemark, de l’Irlande, de la Pologne et de la Suède) qui désignent chacun un procureur, soit 22 procureurs, placés sous un procureur général : Laura Codruta Kövesi (Roumanie). Ses membres sont désignés pour 6 ans.
 
Le Parquet repose sur un mode de fonctionnement à deux niveaux : un échelon centralisé à Luxembourg composé notamment du chef du parquet européen et des 22 procureurs européens et un échelon décentralisé constitué de procureurs européens délégués dans chaque État membre.
 
On regrettera cependant que la langue de travail retenue soit l’anglais, à l’heure où du fait du Brexit, la Grande-Bretagne, seul pays ayant pour langue officielle l’anglais a quitté l’Union européenne ; il eut été mieux inspiré d’adopter le français, comme cela est déjà la règle devant la CJUE.
 
 Articulation avec la procédure pénale française
 
Concernant la législation française, l’article 4 de la loi n° 2020-1672 du 24 décembre 2020 relative au Parquet européen, à la justice environnementale et à la justice pénale spécialisée a introduit dans le Code des douanes sous les nouveaux articles 344-1, une section dédiée à ce Parquet européen.
 
Par ailleurs, le nouvel article 696-108 du Code de procédure pénale précise :
 
« Les procureurs européens délégués sont compétents sur l’ensemble du territoire national pour rechercher, poursuivre et renvoyer en jugement les auteurs et complices des infractions pénales portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union européenne mentionnées aux articles 4, 22, 23 et 25 du règlement (UE) 2017/1939 du Conseil du 12 octobre 2017 mettant en œuvre une coopération renforcée concernant la création du Parquet européen, qui sont commises après le 20 novembre 2017 »
 « Les procédures dont sont saisis les procureurs européens délégués relèvent de la compétence des juridictions de jugement de Paris, tant en première instance qu’en appel »
 
Le Code de procédure pénale énonce encore que les signalements doivent être adressés au Parquet européen « par l’intermédiaire du procureur de la République compétent ».
 
Le nouvel article 696-112 du Code de procédure pénale indique que :
 
« Lorsque le Parquet européen décide d’exercer sa compétence, le procureur de la République ou le juge d’instruction saisi d’une enquête ou d’une information portant sur des faits relevant de l’article 696-108 est tenu de se dessaisir de la procédure au profit du Parquet européen ».
« Tant que le Parquet européen n’a pas statué sur l’exercice de sa compétence, il n’y a pas lieu d’examiner la recevabilité d’une plainte avec constitution de partie civile déposée devant le juge d’instruction pour des faits susceptibles de relever de l’article 696-108 du présent Code. La prescription de l’action publique est suspendue jusqu’à la réponse du Parquet européen ».

Par Oliver de MAISON ROUGE
Avocat Lex-squared
 


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