Journal de l'économie

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Pourquoi la voiture électrique est-elle tout sauf une bonne idée





Le 1 Mars 2021, par Philippe Cahen

La ruée des Européens pour la fabrication de voiture électrique est tout sauf une bonne idée. Ce seront des milliards d’engloutis à perte. Remplacer des véhicules thermiques par des véhicules électriques ne change rien au trafic, mais tout au climat et aux droits de l’Homme dans le sens inverse de celui communément admis et répandu. Et ce ne sont pas des signaux faibles qui le détectent, ce sont des signaux forts, très forts ! La raison de cette mauvaise idée tient en deux points.


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La fabrication de la voiture électrique en Europe : une fausse bonne idée industrielle

La course à la fabrication de voitures dans le monde va être impactée par deux aspects : la reprise du marché de l’automobile, et course à la voiture électrique, y compris la voiture hybride thermoélectrique.

Sur le premier point, il ne faut pas se leurrer. Pour un marché mondial d’environ 100 millions de véhicules neufs annuels, la Chine en représente 25 %, dont 10 % en nouvelles énergies (électricité et hydrogène, hybrides) et sa croissance est supérieure aux autres pays notamment l’Europe et les États-Unis.

Or l’Europe a poussé ses usines de construction de voitures de l’Est (Europe de l’Est) à l’extrême Est, à la Chine. Que ce soit Volvo S90, Dacia Spring, BMW iX3, Smart, DS9 de Stellantis,… les voitures construites en Chine par les européens, donc la fabrication est délocalisée, ne manquent pas et ont pour vocation d’être en partie importées en Europe, car les ventes des européens en Chine n’ont plus les succès d’il y a 10 ou 20 ans !

En Chine, la qualité est comparable aujourd’hui à la qualité exigée en Europe, parfois à quelques adaptations prêtes. Les usines y sont ultramodernes. D’autant que si les constructeurs chinois ont beaucoup appris auprès des européens achetés (Geely fabrique Volvo), ils ont beaucoup copié, comme les Japonais il y a 60 ans, en mieux, et plus rapidement. Les nouveaux constructeurs chinois sont foison et exportent en Europe. Le coût de transport et les taxes (10 %) n’entament que peu leur compétitivité quand bien même les taxes augmenteront.

Le second point est la course à la voiture électrique. Il mérite d’être détaillé.

La voiture électrique : le propre chez nous, le sale chez les autres

La ruée sur la voiture électrique est le fruit d’un immense mensonge, ou d’une immense impasse de connaissance, ou d’une naïveté affligeante. Il est couramment admis qu’une voiture électrique (VE) qui roule pollue moins en CO2 (-77 % en France, car l’électricité y est relativement propre grâce au nucléaire) qu’une voiture thermique et ne pollue pas en NOx. C’est vrai.

Mais il faut d’abord construire cette voiture. Non seulement au départ son coût écologique est comparable à celui d’une voiture thermique, mais il faut ajouter la batterie. Une batterie normale pèse 10 à 30 kg. Une batterie de voiture électrique pèse environ 250 kg. Elle contient du lithium, du cobalt, du manganèse, du graphite, etc., soit des matériaux rares dont on ne sait d’ailleurs pas s’ils existent en quantité suffisante pour satisfaire les ambitions des constructeurs et de toute la politique de « transition énergétique ». Et nous ne parlerons pas de l’exploitation inhumaine et désastreuse pour l’environnement de ces matériaux faite en grande partie… en Chine.

Une batterie de VE est un assemblage de batteries individuelles dites cellules. Il faut donc construire ces cellules et les assembler. Ce qui constitue une autre charge en cuivre, silicium, etc. Une voiture électrique aurait autant pollué qu’une voiture thermique ayant parcouru 100 000 km… avant même de commencer à rouler.

La voiture qui devrait nous aider à respirer en ville est avant même de rouler une catastrophe écologique.

N’abordons pas l’autonomie en kilomètres de la VE, la durée de vie de la batterie, le réseau de recharges électriques, la disponibilité de l’électricité. Et n’abordons surtout pas la fin de vie du VE, son recyclage qui reste un grand mystère surtout pour la batterie. Il est de 95 % pour un véhicule thermique en France. Il est légitime d’imaginer des progressions d’autonomie, de réseau de recharge… et de recyclage.

Lorsque les produits industriels seront accompagnés d’une taxe de carbone importé et d’un coût de recyclage réel de fin de vie, le prix final sera un prix réel de fabrication et d’environnement, alors la voiture électrique, fabriquée en Europe ou en Chine, sera un objet de luxe vintage.

La voiture électrique trop chère à construire en Europe

Au-delà de ces deux points (la construction automobile bascule en Chine) et la voiture électrique saine est un leurre), l’Europe ne sera pas compétitive en voiture électrique.

Revenons à la Chine. Tesla est la première voiture électrique vendue au monde. La seconde est la Hongguang Mini EV. Son prix est de 3 500 € (trois mille cinq cents euros ! oui !). Il s’en est vendu 35 000 en décembre 2020 (elle a été mise en service pour la première fois en juillet 2020) sur le seul marché chinois. En France, une voiture électrique coûte au bas mot entre 20 000 € et 40 000 € et bénéficie au minimum d’un bonus écologique de 7 000 €.

La Hongguang rappelle la Logan à sa création : avec les options, elle atteint le prix d’une voiture d’occasion. Même une autonomie inférieure à 170 km pour l’instant trouve son marché. On peut imaginer une taxe carbone de la construction de la voiture, le prix et les progrès techniques ne seront pas des obstacles à son importation.

Or la valeur d’une voiture électrique est à 70 % dans son électronique. Et les voitures actuelles ne sont que la première étape vers la voiture autonome, le système de transport autonome. On parle pour Tesla d’un smartphone sur quatre roues.

Le véhicule autonome est le nœud du futur

C’est là que se situe le nœud que l’Europe ne doit pas manquer. Il faudra rapidement résoudre le trafic des villes et payer au réel le prix d’une voiture. Ce n’est plus une prospective hasardeuse, c’est un futur proche de quelques années.

La voiture individuelle va disparaitre au bénéfice d’un système de transport, une prolongation de la mobilité sur abonnement. Le nœud du futur sera dans la maitrise du système électronique de transport et plus dans la performance individuelle du véhicule. Aujourd’hui, Waymo (de Google / Alphabet) est bien placé, car peut investir 2 à 3 milliards $ par an, comme Apple d’ailleurs ou les constellations Starlink de Elon Musk ou Blue Origin de Jeff Bezos. Huawei s’y oriente, ce qui est tout à fait envisageable. Ou Samsung. Les maitres des transports de demain sont parmi ces noms.

La voiture électrique est la fausse bonne idée. Elle n’est qu’une étape vers la voiture autonome, vers le véhicule autonome, vers le transport autonome. Alors peut-être que le monde automobile « made in China » ne pourra plus rouler en Europe et réciproquement. Que la voiture - et les véhicules transportant plus de cinq personnes - soient électriques ou pas sera un débat dépassé ! Un débat de l’Ancien Monde.
 
Je repars en plongée…

Philippe Cahen
Conférencier prospectiviste
Dernier livre : « Méthode & Pratiques de la prospective par les signaux faibles  », éd. Kawa
 


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