Journal de l'économie

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Réinsuffler de l’audace dans la politique RSE des entreprises





Le 28 Janvier 2022, par Mathilde Aubinaud

À force de faire parler d’elle, la RSE s’est banalisée, au point d’être devenue un sujet récurrent, voire parfois ringard. Pourtant, plusieurs exemples récents nous montrent qu’une politique RSE audacieuse est possible et plus que jamais souhaitable. À condition d’être transversale et globale et surtout, d’avoir un impact systémique sur la société. La RSE donne l’occasion aux entrepreneurs de renouer avec leur philosophie première : l’esprit de conquête et d’innovation d’outils encore inexplorés.


La politique de responsabilité sociétale de l’entreprise (RSE) offre l’opportunité de revenir à l’esprit originel des entrepreneurs, en étant une démarche à la fois positive et inclusive. Un état d’esprit aventurier, où l’on veut être l’un de ceux qui réinventent et façonnent autrement et collectivement. Une politique RSE audacieuse permet de panser le présent et de penser demain, pour l’entreprise comme pour la société. Avoir une politique de RSE forte, c’est refuser que le futur durable ne soit qu’un concept.

Ici et maintenant

R.S.E. D’un apparent code pour initiés, ces trois lettres se sont transformées en sésame pour envisager l’entreprise dans ce qu’elle a de grand. Voici la RSE enfin inscrite dans les agendas comme dans les imaginaires. Il était temps. Parce que les parties prenantes se mobilisent et manifestent, sans détour, leurs attentes, les entreprises ont compris combien les initiatives qu’elles prennent sont importantes.
 
Les entreprises sont, aujourd’hui, sur la même scène que les gouvernements, les associations, les individus ou encore les organisations internationales. Elles sont régulièrement appelées « à prendre leur part » face aux grands enjeux de l’époque. Sous la pression conjuguée des consommateurs et des pouvoirs publics, les entreprises s’affirment, de ce fait, comme des protagonistes résolument engagées. En témoignent leurs prises de parole et leurs initiatives concrètes sur des sujets majeurs à l’image de la lutte contre la violence faite aux femmes, l’inclusion des personnes en situation de handicap, le respect du vivant ou encore le combat contre les inégalités sous toutes leurs formes.
 
À travers les opérations qu’elles mettent en place pour leurs équipes et d’autres publics, il serait faux de considérer que les entreprises demeurent étrangères aux grands défis actuels. Tant mieux. Pourtant, rares sont les politiques RSE qui aspirent à avoir un impact vraiment global sur la société. Selon une récente étude, 57 % des salariés considèrent que la politique RSE de leur entreprise relève avant tout d’un objectif purement communicationnel et 70 % d’entre eux réclament d’être plus associés à la réflexion. En termes d’engagement-collaborateur, une politique RSE ambitieuse est désormais un préalable.

Jouez le grand jeu

Quelle tristesse que la tiédeur ! Les entreprises, en matière de RSE, ne doivent pas se contenter d’une demi-mesure qui ne sera pas véritablement efficace dans la durée. En effet, les initiatives prises ne doivent pas se cantonner à un seul département dans les organisations ou bien se restreindre à figurer dans un onglet, actualisé de temps en temps, sur un site internet corporate. Bien trop souvent, les projets portés se retrouvent cloisonnés, peu coordonnés et peu visibles des parties prenantes. Un soutien financier par-là, une aide ailleurs… Avec, souvent pour seul horizon, la perspective d’une belle publication sur les réseaux sociaux. Changer d’échelle offrira, par conséquent, la possibilité de proposer autre chose que des seules actions dispersées et sans liens véritables. Il ne peut s’agir uniquement d’une addition d’actions ponctuelles si l’on souhaite que les externalités positives de l’entreprise soient globales.
 
Décidons d’inventer et de réinventer ensemble. Pensons véritablement une politique RSE forte pour l’entreprise. Sans concession ni détour. Celle-ci doit s’inscrire au cœur de la stratégie de l’entreprise afin d’être cohérente. Cette cohérence, le cercle de réflexion, d’analyse et d’action consacré aux thématiques RSE, « Raisons d’être », a décidé de la mesurer en publiant le baromètre RSE 360Impact. Celui-ci évalue l’impact positif des entreprises à travers un prisme économique, social et environnemental et en offrant une approche intégrative allant, par exemple, de la féminisation des postes d’encadrement aux impôts payés en France. Le baromètre propose des critères pérennes et engageants en prenant appui sur l’étude de 50 entreprises françaises et étrangères dans 19 secteurs d’activité. S’il n’est encore qu’un classement parmi d’autres, il permet de faire émerger certaines grandes tendances. Le classement d’une entreprise est ainsi corrélé à sa capacité à avoir un impact global sur la société.
 

La RSE doit aspirer à changer d’échelle

Plusieurs entreprises ont posé de solides fondamentaux d’une politique RSE, en se positionnant sur des thématiques où elles n’étaient pas attendues. LVMH s’est, ainsi, illustrée pendant la crise sanitaire de la Covid-19 en s’exhaussant comme un hub industriel capable de fournir en masques et gel hydroalcoolique des hôpitaux en détresse. En réorientant sa formidable force de frappe industrielle vers la confection d’outils de protection individuels, l’entreprise a très vite endossé un grand rôle social face à la pandémie et a, dans les esprits, prouvé qu’elle était capable de s’adapter à une « économie de guerre » pacifique contre la Covid-19.
 
Schneider Electric a, de son côté, aligné ses objectifs environnementaux et sociaux sur les très ambitieux Objectifs de Développement Durable (ODD) de l’Organisation des Nations Unies, alors même qu’ils ne sont pas légalement contraignants. Dans le domaine bancaire, les engagements en faveur de la réorientation des investissements vers des modes de production d’énergie éminemment soutenables, comme les renouvelables, couplés à un retrait des énergies fossiles, s’inscrivent aussi dans cette tendance. Dans ces différents cas, le changement d’échelle est perceptible : une bonne politique RSE a désormais le monde comme terrain d’action.

Retour à la philosophie des premiers entrepreneurs

C’est également l’exemple du groupe Carrefour dirigé par Alexandre Bompard, à la tête du secteur commerce, d’après le baromètre RSE 360Impact. Le groupe porte ainsi une grande attention à la lutte contre le réchauffement climatique en témoigne la note A attribuée par le Carbon Disclosure Project (CDP). Cité dans le top 3 du secteur transport, CMA CGM continue son engagement pour la décarbonation. En effet, le groupe de Rodolphe Saadé a, ainsi mis en service un navire aux dimensions exceptionnelles. C’est le premier d’une série de neuf nouveaux navires, propulsés au gaz naturel. Dans le domaine sensible du transport de marchandises, l’audace industrielle se conjugue désormais avec la politique RSE et renvoie, encore une fois, à l’esprit d’aventure et d’innovation des premiers entrepreneurs.
 
Et si l’on mettait un peu d’audace dans la formidable aventure de la RSE ? L’entreprise mettra en avant son engagement et sa volonté d’obtenir un impact réel et tangible tant pour l’économie que pour la société. La politique RSE sera pertinente parce qu’elle est pensée sur le long terme. Elle a, dès lors, des traductions concrètes, efficientes et bien articulées. Décider d’agir, fort d’une vision, c’est faire le pari de l’effet d’entraînement, assumer sa responsabilité et son exemplarité.

Mathilde Aubinaud est enseignante en communication. Elle a écrit plusieurs livres dont La Saga des Audacieux (VA Editions).
 



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