Journal de l'économie

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Avec la Covid-19, 5 scénarios s’ouvrent pour les années 20





Le 15 Décembre 2020, par Philippe Cahen

La Covid-19 a fortement secoué les scénarios dessinés pour les années 20 il y a un an. Fortement, mais pas tout à fait, c’est le premier scénario, les années molles, qui s’ajoute. Disons que sans renier ces six scénarios, ni même ces six autres scénarios, la Covid marque brutalement notre présent et engage notre futur avec hésitation. Et tout d’abord, quand se terminera cette sombre histoire ?


Photo pxhere
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En mars 2020, nous espérions septembre 20, aujourd’hui, en décembre 2020, nous savons que septembre 21 n’est qu’un souhait. Sanofi a retardé son vaccin à base de protéine à la fin 2021, AstraZeneca veut combiner le sien avec le russe SpoutnikV utilisant l’adénovirus Ad26. Or les humains à vacciner se comptent par milliards sur une durée d’immunisation du vaccin notamment ARN messager en cours de vaccination qui est inconnue.

Imaginons des futurs. Enjambons le présent gris. Allons vers l’avenir. Faisons de la prospective à partir des signaux faibles détectés.
Les scénarios prospectifs s’appuient sur 3 bras principaux - sauver le présent, sauver la Terre, sauver le futur – en croisant les options avec deux futurs, celui sur lequel le monde est lancé depuis des décennies, devant nous ; celui vers lequel on devrait sauver la Terre, de côté.
 
Scénario 1 : les années molles

Les années molles, c’est une sortie sans fin de la maladie. Même si la maladie contamine de moins en moins, le passé reste accroché à nos basques. Nous trainons le monde d’hier comme un boulet.

La France (comme d’autres pays) est dans ce scénario : sauvons ce qui est sauvable de l’existant aux normes d’hier comme le rail, la route (automobile), l’aviation, le spatial façon Europe ; et quoi qu’il en coûte, assurons un revenu minimum à ceux qui ne peuvent pas travailler alors que des branches entières manquent de bras (agriculture, bâtiment, soin à la personne…). Ce qui n’empêche le record de 2 millions d’inscrits au RSA. L’endettement explose et certains s’interrogent même sur la nécessité de rembourser. Les années à venir auront pour mission de remettre le pays sur les rails. Les choix écologistes (abandon du nucléaire et de la 5G par exemple) ne sont pas adaptés à l’économie du pays. Les investissements sur les virages à prendre sont trop partiels, mal attribués ou absents ou soudains, ils assurent plus le passé qu’ils n’inspirent le futur. On reste les deux jambes dans le présent, voire le passé.
Les années molles sont subies, lourdes, stériles. On devient spectateur du monde.

Scénario 2 : les années auréoles

Les années auréoles sont comme un ruban de gymnastique tenu par un bâton. Le ruban s’agite doucement dans les airs en faisant des ronds qui se suivent et qui nous émerveillent.

De nombreux pays sont sur cette tendance engagée depuis plusieurs années : transition énergétique et numérique sont les maitres mots. Les années Covid jouent comme des accélérateurs du temps. En quelques mois, ce sont des années de gagnées : e-commerce, télétravail, télémédecine, téléenseignement… ou des réinventions par exemple, les « dark kitchen », les restaurants sans salle. Multiplication des éoliennes, des panneaux solaires, de la biomasse, de la géothermie. Des sauts en génétique, en nanotechnologie, en industrie 4.0. Fermeture de centrales à charbon, à gaz, à énergie nucléaire (quoique…). Ce sont les années auréoles, car ce sont des cercles concentriques qui se multiplient par effets positifs, une jambe dans le futur.
Les années auréoles recréent de l’espoir par l’emploi. Les objectifs climatiques de la COP21 sont à la traine, mais assumés : l’Homme avant la Terre.

Scénario 3 : les années camisoles

Les années camisoles sont une obligation d’objectifs : si l’on veut sauver l’Homme, sauvons d’abord la Terre.

Dans ce scénario, les écologistes surtout collapsologues, voire survivalistes sont dominants. Ces années se vivent comme un confinement quasi définitif et négligent les actifs existants : plus d’énergie nucléaire, plus de transport à énergie carbone, production industrielle et agricole localisée… Une camisole enferme le ou les pays concernés. La brutalité du changement du modèle économique et social ruine le(s) pays… provisoirement. La verdurisation des villes et la vie associative n’effacent pas la mauvaise humeur sociale. Il faut plusieurs années pour retrouver une autosuffisance alimentaire, une production répondant aux normes imposées de santé, etc. La lutte contre le réchauffement climatique et ses causes reste vaine, car non universelle. Ce sont les deux jambes sur le côté.

Les années camisoles des collapsologues donnent à certains beaucoup d’espoirs dans les premières années. Pas à tous. Le temps de la nature est long et décalé vis-à-vis des pays partenaires.

Scénario 4 : les années cabrioles

Les années cabrioles sont des années auréoles à plusieurs rubans de couleur où l’un puis l’autre contribue à une forme de danse parfois hardie comme les sauts du cabri.
Ces années cabrioles sont des passages incessants des arguments des scénarios auréoles et camisoles par concertation circulaire. Transition énergie + transition numérique+ conscience écologique + conscience humaine souvent ignorée. La prise de conscience du poids du carbone est universelle et se concrétise par un compte carbone individuel et d’entreprise pour l’instant incitatif et non punitif : transports et tourisme se réinventent à grands pas. Par exemple : plus de nucléaire, c’est plus d’énergie carbone = on décale en facilitant l’installation d’éoliennes marines, d’énergie biomasse et d’autres énergie renouvelables. Par exemple : la voiture électrique ou hybride est exigeante en matériaux rares et technologies importées, est distributrice de particules fines identiques notamment par freinage et usure des pneus = il faut passer à un système de transports autonomes divisant par 5 la production de voitures à confort comparable en usage, plus en propriété. Par exemple : la viande ou le poisson de synthèse a pour l’instant un coût carbone et matériaux rares non compatibles avec la conscience humaine quand bien même le bien-être animal est respecté. Des années cabrioles car il faut sans cesse trouver la réponse la moins mauvaise à chaque proposition concertée. Une jambe dans le futur, légèrement de côté, la tête dans futur.

Les années cabrioles sont une harmonie d’une gouvernance de consensus convaincue d’aller vite, fort et loin pour largement effacer le temps perdu et reprendre l’avenir en main.

Scénario 5 : les années folles

Les années folles sont explosives, positives, créatives. Comme une décompensation des deux à trois années lugubres et enfermantes de Covid, c’est la Libération !
Les années cabrioles sont ici accélérées par la profusion d’idées. La 6G arrive plus rapidement que prévu et le quantique est opérationnel. Le stockage de l’énergie est inventé en petits volumes ce qui facilite l’exploitation des constellations de satellites, les drones de toutes tailles, les essaims de tracteurs ultralégers, etc. La puissance du numérique contribue à diminuer l’énergie consommée et à maitriser l’économie circulaire. La domination encore partielle de l’Homme sur la Nature devient quasi totale pour la qualité de la production alimentaire majoritairement localisée, associée à la préservation des espèces de faunes et de flores. Mais surtout la création artistique et philosophique reprend ses droits : de nouvelles formes d’art naissent grâce au temps Covid et à la facilité technologique, la ville se réinvente, la campagne se dépollue, le tourisme se réinvente avec moins de déplacements et autant sinon plus de plaisirs, la hausse des températures se maitrise petit à petit. Tête et jambes dans le futur vers un monde plus sain pour l’Homme et la terre : soyons fous !

Les années folles, les années Libération, existeront si l’on prépare le futur, si l’on crée immédiatement le CNR, le Conseil National de Réinvention.
 
Comme dans tout travail de prospective, chaque scénario a du juste ou de l’injuste selon le futur que l’on souhaite. Mais la prospective depuis une trentaine d’années est marquée par son imprévisibilité. Pour ne prendre qu’un seul exemple, la Chine, qui fut qualifiée d’« usine du monde », est la « recherche du monde ». Techniquement et climatiquement, le futur est à un tournant. Sera-t-il brutal ou souple ? Nous ne le savons pas. Mais nous pouvons le prendre en main pour espérer le maitriser.
 
Je repars en plongée…

Philippe Cahen
Conférencier prospectiviste
Dernier livre : « Méthode & Pratiques de la prospective par les signaux faibles  », éd. Kawa
 


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