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Pôle de compétitivité, gouvernance et parties prenantes







Flickr (CC) / OpenSource.com
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Le développement des pôles de compétitivité, initiés en 2005 sous l’égide des pouvoirs publics, pose la question du mode de gouvernance entre des acteurs de cultures et de légitimités différentes (Etat, entreprises, associations, laboratoires de recherche ou organismes de formation). En effet, contrairement aux districts industriels et aux clusters nord-américains, les pôles de compétitivité ont été labellisés par l’Etat qui exerce son influence sur ces formes d'organisations collaboratives et leurs modes de développement, au même titre que les régions. Ainsi, les membres des pôles de compétitivité sont par nature hétérogènes et rassemblent des acteurs publics et privés, sans liens hiérarchiques évidents, et ayant bien souvent des horizons temporels (priorités) différenciés.
L'une des difficultés réside par conséquent à faire converger dans la durée des intérêts et motivations parfois disparates au service de l'innovation industrielle et technologique. Les pôles de compétitivités se présentent ainsi comme des lieux de confrontation et d’ajustement (1), visant à rechercher le meilleur équilibre entre des intérêts locaux (attractivité du territoire, développement économique local, création d’emplois) et le "global" (stratégie internationale, chaîne de valeur, relations de coopérations).Il s’agit non seulement de faire travailler ensemble les grandes et les petites entreprises avec les laboratoires de recherche, mais aussi avec les universités et les collectivités locales. L’activité de l’entreprise ne se limite donc pas à ses frontières juridiques, mais est bâtie sur une gestion en réseau (entreprise étendue), intégrant de multiples partenaires d’affaires, autour d'un partage de ressources et une coordination des activités
Un des rôles de la gouvernance en matière de pôles consiste donc à gérer les tensions entre des forces contradictoires qui peuvent freiner la dynamique collective des projets. Il s’agit en particulier de limiter les risques de comportements individualistes de certaines entreprises, à travers des phénomènes de captation de ressources (informations, personnel, compétences) et une focalisation sur leurs activités propres. L'une des difficultés liée à ce type de gouvernance tient à la gestion du couple autonomie-contrôle. Le contrôle peut selon les cas, être instauré par une firme-pivot ou un groupe d'acteurs dominant, ou par d'autres formes d'autorité, comme les pouvoirs publics locaux ou nationaux, qui participent la plupart du temps à la structuration du territoire, dans le cadre de modes de gouvernance mixte public-privé. Plusieurs actions peuvent ainsi contribuer à aider au développement de ces pôles sur nos différents territoires.
 
Une première action consiste à bien saisir le rôle des différents acteurs (entreprises, laboratoires, associations) et la nature des institutions publiques selon leur niveau d’intervention (local, régional, national) et leurs modes d’influence (directe ou indirecte), en fonction du mode de gouvernance retenu. Une autre forme d’action concerne le rôle stratégique de la grande entreprise, dont l’internationalisation est a priori difficilement compatible avec un ancrage local. Il est donc essentiel de favoriser le développement d'actions collectives pour faire émerger des projets de R&D entre les multinationales et des petites entreprises locales, avec le soutien des autorités locales ou nationales. Un troisième levier porte plus précisément sur les spécificités des PME et TPE, qu'il convient d'aider en valorisant leurs compétences et savoir-faire à l’international, par une politique d’accompagnement et de transfert de ressources financières, organisationnelles ou humaines. Enfin, le management des pôles doit contribuer à impliquer davantage les acteurs du territoire, en communiquant sur leurs actions (initiatives, projets, partenariats) et les résultats obtenus sur le plan économique (activités) et social (emplois), mais également aux niveaux local et international. L’articulation entre ces différentes actions est, en effet, au centre de la réalité stratégique de ces pôles, dont le succès dépend principalement de la capacité à maîtriser des objectifs multiples, allant de la sauvegarde des emplois à la recherche d’innovation, en passant par une plus grande visibilité internationale.

Notes

(1) Voir sur ce point, les travaux sur Callon et Latour appliqués à la gestion des pôles de compétitivité, autour de la question des mécanismes de coordination et de "traduction".


Olivier Meier
Olivier Meier est Professeur des Universités, HDR (Classe exceptionnelle), directeur de... En savoir plus sur cet auteur


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