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Autorisations d’urbanisme : attention aux maires intéressés !





Le 9 Novembre 2023, par Frédéric Rose-Dulcina

Par une ordonnance du 30 octobre 2023, le juge des référés du Tribunal administratif de Poitiers a estimé que seul le conseil municipal peut désigner un de ses membres pour décider de délivrer un permis d’aménager à la place du maire intéressé (TA Poitiers, 30 octobre 2023, n° 2302662).


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Selon l’article L.422-7 du Code de l’urbanisme, “si le maire ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale est intéressé au projet faisant l’objet de la demande de permis ou de la déclaration préalable, soit en son nom personnel, soit comme mandataire, le conseil municipal de la commune ou l’organe délibérant de l’établissement public désigne un autre de ses membres pour prendre la décision”.

Par sa décision du 30 octobre 2023 susvisée, le juge des référés du Tribunal administratif (TA) de Poitiers est venu rappeler les exigences de cette disposition légale assez méconnue.

Saisi par l’association de protection, d’information et d’études de l’eau et de son environnement (APIEEE), le juge des référés a estimé que la maire de la commune de Val-du-Mignon était intéressée au projet de retenue d’eau de Priaires, car dirigeante d’un groupement agricole devant bénéficier des eaux de cette retenue et membre de la coopérative de l’eau à l’initiative de ce projet.

Constatant ensuite que le conseil municipal n’avait pas désigné un autre de ses membres pour prendre la décision à la place de la maire, le juge des référés a suspendu en urgence, du fait du début des travaux, le permis d’aménager accordé à la coopérative de l’eau des Deux-Sèvres. Le TA a en effet constaté que “ l’arrêté contesté du 4 août 2023, accordant selon son intitulé, un « permis d’aménager délivré par le maire au nom de la commune » a été signé « pour le maire » et « par délégation », par Mme L., adjointe au maire. Il ressort des pièces du dossier et des affirmations non contredites de la société requérante que Mme B., maire de la nouvelle commune de Val-du-Mignon et maire auparavant de la commune de Priaires sera directement bénéficiaire, en sa qualité de dirigeante du groupement agricole d’exploitation en commun (GAEC) de l’Éole, d’une part importante des réserves d’eaux devant être stockées dans la retenue en litige située à proximité de son exploitation et que ce GAEC est d’ailleurs membre de la société coopérative anonyme de l’eau des Deux-Sèvres qui a la qualité de pétitionnaire.

Si les défendeurs font valoir que le permis en litige a été signé par une adjointe déléguée, cette circonstance ne rend pas le moyen inopérant, dès lors que la procédure prévue par les dispositions précitées et prévoyant l’intervention du conseil municipal n’a pas été mise en œuvre. Les défendeurs font également valoir que l’arrêté en litige a été, en réalité, pris par la maire au nom de l’État, dès lors que la commune nouvelle de Val-du-Mignon ne dispose pas encore d’un plan local d’urbanisme. Toutefois, à supposer même cette circonstance établie alors que l’ancienne commune de Priaires disposait d’une carte communale, la maire de Val-du-Mignon est bien l’auteur de l’arrêté en litige. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce qu’elle était intéressée au projet et que les dispositions précitées de l’article L. 422-7 du code de l’urbanisme n’ont pas été mises en œuvre parait, en l’état de l’instruction, de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de l’arrêté contesté”.

Cette décision doit être approuvée, car elle respecte strictement la lettre de l’article L.422-7 du Code de l’urbanisme. Elle fait d’ailleurs suite à d’autres décisions des juges du fond allant dans le même sens. Ainsi, le 15 octobre 2020, le TA de Bordeaux avait déjà jugé que “le maire est tenu d’exercer pleinement sa compétence en matière de délivrance des autorisations d’urbanisme. Il n’en va autrement, réserve faite de l’hypothèse où cette autorité a délégué ce pouvoir à un adjoint dans les conditions prévues par le code général des collectivités territoriales ou de l’application des règles de suppléance, que lorsque le maire se trouve dans le cas prévu à l’article L.422-7 précité du code de l’urbanisme. Dans cette dernière hypothèse, le conseil municipal, après s’être assuré que le maire est effectivement intéressé au projet, est tenu de désigner en son sein, par délibération spéciale, un conseiller municipal pour prendre la décision sur l’autorisation d’urbanisme sollicitée. En refusant de désigner un conseiller municipal en son sein, alors qu’il ne contestait pas que le maire était effectivement intéressé au projet, le conseil municipal d’Arbanats a méconnu les dispositions de l’article L.422-7 du code de l’urbanisme” (TA Bordeaux, 15 octobre 2020, n° 1904300).

Frédéric ROSE-DULCINA
Spécialiste en droit public et en RSE
DEA Droit public des affaires
DESS Droit de la construction et de l’urbanisme
LEX SQUARED AVOCATS

 


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