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La provenance : un atout de valeur pour l’œuvre d’art





Le 24 Mars 2019, par Yadira Castellanos Estrabao, Expert

La notion de valeur de l’objet d’Art est à la fois objective et ô combien subjective. L’expertise nous donne des éléments concrets d’appréciation comme l’attribution, la datation, la technique utilisée…


La notion de valeur de l’objet d’Art est à la fois objective et ô combien subjective. L’expertise nous donne des éléments concrets d’appréciation comme la datation, la technique utilisée… Mais que dire de l’ère du temps et de la personnalité des précédents propriétaires eux-mêmes ! Un meuble ayant appartenu à Napoléon, un service de verres à Talleyrand, ont une valeur historique qui entre subjectivement en ligne de compte dans l’expertise. L’histoire de l’objet est une partie intégrante de sa valeur. Une valeur vivante, fluctuante en fonction des modes, imprécise et non absolue.

Prenons un exemple. Ces derniers jours, la vente de la collection d'art de George Michael Cofondateur du groupe Wham, rapporte plus de 10 millions d'euros à Londres. Le produit de la vente «sera utilisé pour poursuivre l'œuvre philanthropique de George Michael» indique Chistie’s. Connu pour ses tubes, Il était également collectionneur et avait pris part au collectif britannique contemporain Young British Artists (YBAs), à la fin des années 80. Nul doute que sa personnalité et sa notoriété ont contribué au bon résultat de cette vente même si Damien Hirst n’est pas non plus un inconnu des collectionneurs ! 

La provenance est donc devenue au fil du temps un facteur majeur de l’évaluation de l’objet sur le marché de l’Art. 
Face aux travers du marché et aux évolutions de la législation,  documenter le passé d’une œuvre est aujourd’hui, plus que jamais, un élément indispensable de l’expertise. Il est en effet  nécessaire pour conforter la légalité de la transaction. Il est malheureusement trop fréquent d’être exposé à son insu à des objets volés, issus de trafics, de faussaires. N’oublions pas non plus les œuvres spoliées aux Juifs lors de la Seconde Guerre mondiale par les nazis.

La mission première de l’expert est de s’assurer que la pièce est authentique et que son attribution est correcte. Mais la dimension historiographique d’un objet est centrale. Comme nous l’évoquions dans notre exemple, une provenance décrite offre non seulement du rêve, mais également un lien physique, palpable avec le passé et avec son propriétaire. L’objet est une occasion unique de voyager dans le temps. Il suffit de le toucher, de fermer les yeux, et l’amateur se transporte. Moment de bonheur suspendu. 

Ainsi, le  28 mars prochain, à Paris, sera dispersé un dessin de Charles Le Brun et atelier qui aurait été l’une des feuilles qui complètent le programme iconographique du décor du plafond de la Galerie Apollon du Louvre. Cette feuille a du être approuvée par Colbert et Louis XIV en 1663, car le chantier du décor fût en partie réalisé par Le Brun lui-même jusqu’en 1667, puis complété au XVIIIe et même au XIXe par Delacroix… nous touchons l’histoire et quelle histoire ! C’est par ailleurs, l’une des rares feuilles de Le Brun dans des mains privées, car à la mort du Maître en 1690, Louis XIV confisqua l’ensemble des dessins de son atelier et ils sont pour la plupart conservés au Louvre. Outre les qualités stylistiques évidentes de cette feuille, la résonance prestigieuse de sa provenance est a elle seule capable de conforter l’estimation de prix annoncée de 40 000 euros.   

Ainsi, le travail scientifique de l’Expert, s’il apporte des éléments indiscutables à la connaissance de l’œuvre, n’est pas suffisant. Il doit également mener des recherches historiques extrêmement poussées. Elles viendront pour la grande histoire comme la petite, donner un supplément d’âme à l’objet. En identifiant le contexte historique sous ces aspects factuels, mais également sociologiques et d’usage, l’Expert doit se faire conteur du passé. Un rôle qui exige de multiples qualités. 

Yadira Castellanos Estrabao, Expert


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