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L’implantation d’un nouveau Centre Pompidou à Shanghai, le « soft power » à la française face au défi chinois





Le 7 Février 2020, par Christine de Langle

Né d’une volonté de la municipalité de Shanghai de développer une visibilité mondiale à l’égale de Hong Kong, Shenzen ou Singapour, et du désir d’entrer dans la modernité par la culture, le Shanghai West Bund est le nouveau quartier culturel qui se développe le long du fleuve Huangpu sur une dizaine de kilomètres.


Vue du West Bund Museum
Vue du West Bund Museum
Le choix de Shanghai
 
Depuis dix ans en effet, Shanghai a décidé de consacrer un quartier à l’art, la photo et les nouvelles technologies. L’objectif de Shanghai est aussi de s’affirmer face à Hong Kong dans le domaine de l’art et du marché européen. Avant l’ouverture du West Bund Museum, « Un chinois intéressé par l’art moderne devait se rendre à Londres ou Paris pour admirer Matisse ou Picasso. » précise Serge Lasvignes, le président du Centre Pompidou.

Nauman
Nauman
Un partenariat franco-chinois
 
La loi chinoise interdit l’implantation des musées étrangers. Le partenariat franco-chinois s’est donc fait par l’intermédiaire de la société d’aménagement du West Bund chargée de réaménager les rives du fleuve, de créer une densité culturelle et un environnement susceptible d’attirer les talents de l’intelligence artificielle. Première implantation en Chine d’un grand musée étranger, ce Centre Pompidou est en réalité une enclave temporaire. Le contrat de partenariat est signé jusqu’en 2024.  Cette grande réussite du « soft power » français a été pendant 15 ans un véritable défi diplomatique et a connu une gestation complexe. Et rien n’en assure la pérennité alors même que les grands musées anglo-saxons préparent leur implantation en Chine. De son côté, la direction Centre Pompidou a évoqué pudiquement les négociations avec la toute-puissante administration de la censure qui refuse les oeuvres à caractère politique ou érotique.

En effet, à la différence du Louvre Abou Dhabi qui était un projet négocié entre Etats,  cet « emménagement » du centre Pompidou à Shanghai a été directement négocié avec le district local du West Bund pour une durée de cinq ans. Lors de l’inauguration, le 5 novembre 2019, le Président Macron a été accueilli par le maire du district en l’absence de son homologue Xi Jinping ou même d’un vice-ministre chinois, car le gouvernement chinois ne voulait pas en faire une affaire politique. Cette « absence de portage » politique du gouvernement chinois est confirmée par la partie française et constitue une interrogation pour pérennité de ce projet inédit. Mais dans le contexte international actuelles des relations tendues entre les Etats-unis et la Chine, la France apparait comme un pays refuge « Il y a encore une vraie admiration pour la culture française dans toute l’Asie et en particulier en Chine », selon Serge Lasvignes.

Kandisnky
Kandisnky
L’expertise française

Dans un bâtiment de 25 000 m2 conçu par l’architecte britannique David Chipperfield, le Centre Pompidou s’est engagé à présenter trois exposition permanentes sur cinq ans et deux exposition temporaires par an. La première exposition permanente présent la modernité occidentale. L’artiste japonais Nile Koetting ouvre ce cycle des expositions temporaires avec le thème « Observation ». Cette installation montre comment nous sommes observés et comment nous observons. Elle dénonce la société ultra-connectée d’aujourd’hui en la comparant à une sorte d’apocalypse. « Il restera toujours un mystère chinois » s’interroge Serge Lasvignes, surpris qu’elle n’ait pas été dénoncée par la censure. 

Reconnue mondialement pour son expertise en terme de médiation culturelle et de programmation, la France a envoyé son personnel scientifique pour mettre en place les espaces de médiation et les ateliers, assurer la bonne marche du musée, former le personnel chinois. En échange, la Centre Pompidou accueille à Paris un exposition d’artistes chinois. Le partenariat est également financier. Dans les opérations de partenariat menées avec Malaga, Metz et Shanghai, l’institution récolte environ 13 millions d’euros pour vendre son expertise et montrer ses collections à l’étranger sur un budget d’environ 100 millions d’euros par an.
 
L’ouverture du Centre Pompidou à Shanghai résume bien la complexité et l’ambiguïté du dialogue franco-chinois.  Du côté chinois, une crainte de l’art occidental, un nationalisme très fort, un désir d’ouverture des jeunes à l’art et du côté français, l’éternelle question du « pays des droits de l’homme » face à un pouvoir politique fort. Serge Lasvignes a tranché « Il vaut mieux y être que de faire de la dénonciation longue distance ».

Christine de Langle



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