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Urbanisme : la notification des recours contre les autorisations d’urbanisme délivrées à une société





Le 25 Octobre 2021, par Frederic Rose-Dulcina

Par un arrêt en date du 20 octobre 2021, le Conseil d’État a jugé que, lorsqu’une autorisation d’urbanisme a été accordée à une société, la notification d’un recours contre cet acte doit être regardée comme régulière quand elle est adressée au siège social d’une société et non à l’adresse mentionnée sur l’acte attaqué. Cette décision de justice est l’occasion de rappeler l’importance de la procédure organisée par l’article R.600-1 du Code de l’urbanisme.


Aux termes de l’article R.600-1 du Code de l’urbanisme, « en cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l’encontre d’un certificat d’urbanisme, ou d’une décision relative à l’occupation ou l’utilisation du sol régie par le présent code, le préfet ou l’auteur du recours est tenu, à peine d’irrecevabilité, de notifier son recours à l’auteur de la décision et au titulaire de l’autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l’annulation ou à la réformation d’une décision juridictionnelle concernant un certificat d’urbanisme, ou une décision relative à l’occupation ou l’utilisation du sol régie par le présent code. L’auteur d’un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d’irrecevabilité du recours contentieux qu’il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du recours administratif ».

Selon le deuxième alinéa de l’article précité, la notification doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du déféré ou du recours. La notification du recours à l’auteur de la décision et, s’il y a lieu, au titulaire de l’autorisation est réputée accomplie à la date d’envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception. Cette date est établie par le certificat de dépôt de la lettre recommandée auprès des services postaux.

Les dispositions du présent article ne sont pas applicables en cas de contestation d’un permis modificatif, d’une décision modificative ou d’une mesure de régularisation dans les conditions prévues par l’article L. 600-5-2 du Code de l’urbanisme.
Le bon accomplissement des formalités prévues par l’article R.600-1 du Code de l’urbanisme conditionne la recevabilité d’un recours contre une autorisation d’urbanisme.

Il est donc important de veiller soigneusement au respect de cette disposition.
À ce titre, se pose la question de savoir si cet article doit être considéré comme respecté en cas d’erreur sur l’adresse du destinataire de la notification ou plus exactement si la notification est réalisée à une adresse différente de celle indiquée sur l’autorisation d’urbanisme attaquée ?

Il a déjà été jugé par le juge administratif qu’il « résulte des termes mêmes de l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme, dont le but est d’alerter tant l’auteur d’une décision d’urbanisme que son bénéficiaire de l’existence d’un recours contentieux formé contre cette décision, dès son introduction, que cette formalité peut être regardée comme régulièrement accomplie dès lors que la notification est faite au titulaire de l’autorisation désigné par l’acte attaqué, à l’adresse qui y est mentionnée ; qu’en revanche lorsque cette notification est accomplie à une autre adresse, elle ne peut être regardée comme étant régulièrement accomplie que s’il est établi que son destinataire a effectivement réceptionné le pli » (CAA Marseille, 1er juillet 2016, n° 15MA0027).

Qu’en est-il des notifications R.600-1 réalisées au siège social d’une société bénéficiaire d’une autorisation d’urbanisme alors que cette adresse n’est pas celle indiquée sur ladite autorisation ?

Cette question a été tranchée par le Conseil d’État dans un arrêt en date du 20 octobre 2021 qui sera mentionné aux tables du recueil Lebon (CE, 20 octobre 2021, n° 444581).

Dans cette affaire, le maire d’Angers avait délivré à la société Bouygues immobilier un permis de construire valant division et comprenant des démolitions, l’autorisant à édifier vingt logements individuels groupés par deux ou trois et deux immeubles collectifs de trente-neuf logements. Les voisins du projet ont alors demandé l’annulation de ce permis au Tribunal administratif de Nantes.
Mais, leur requête a été rejetée et ce jugement a été confirmé par la Cour administrative d’appel de Nantes.

La Cour administrative d’appel de Nantes avait jugé le 17 juillet 2020 qu’à l’égard du titulaire de l’autorisation, la formalité prévue par l’article R.600-1 du Code de l’urbanisme doit être regardée comme régulièrement accomplie lorsque la notification est faite au titulaire de l’autorisation tel que désigné par l’autorisation d’urbanisme attaquée, à l’adresse qui y est mentionnée. Or, les requérants avaient notifié leur recours au siège social de l’entreprise bénéficiaire du permis de construire en cause et non à l’établissement dont l’adresse était portée sur l’arrêté de permis contesté. En conséquence, selon la Cour, les formalités de notification prévues par les dispositions de l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme ne pouvaient être regardées comme ayant été régulièrement accomplies.

Le Conseil d’État censure cette argumentation.

Saisie à son tour, la haute assemblée affirme en effet que les dispositions de l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme « visent, dans un but de sécurité juridique, à permettre au bénéficiaire d’une autorisation d’urbanisme, ainsi qu’à l’auteur de cette décision, d’être informés à bref délai de l’existence d’un recours gracieux ou contentieux dirigé contre elle. Si, à l’égard du titulaire de l’autorisation, cette formalité peut être regardée comme régulièrement accomplie dès lors que la notification lui est faite à l’adresse qui est mentionnée dans l’acte attaqué, la notification peut également être regardée comme régulièrement accomplie lorsque, s’agissant d’une société, elle lui est adressée à son siège social ».
Or, « pour juger irrecevable, sur le fondement des dispositions précitées, le recours contentieux formé par M. et Mme N. et M. et Mme C. contre l’arrêté du 29 janvier 2015, la cour administrative d’appel de Nantes a jugé que les requérants n’avaient pas régulièrement satisfait à leur obligation de notifier leur recours gracieux à la société titulaire de l’autorisation contestée en expédiant cette notification à l’adresse de son siège social, située à Issy-les-Moulineaux, et non à l’adresse de son établissement secondaire, située à Angers, figurant sur l’arrêté du 29 janvier 2015 et sur le panneau d’affichage du permis accordé par cet arrêté. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent qu’en statuant ainsi, la cour a entaché son arrêt d’une erreur de droit ».

Cette décision de justice doit être saluée, car elle évite de consacrer tout excès de formalisme dans le cadre de l’accomplissement des formalités prévues par l’article R.600-1 du Code de l’urbanisme.

Frédéric ROSE-DULCINA
LEX SQUARED AVOCATS


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